Gapyeong J100 Corée du Sud

Le jeu des différences

Ecrit le 23 juin 2016 à Gapyeong (Corée du Sud) – km 4200 (je fête mes 10.000 Kms effectués depuis le départ en Normandie !)

Un jour un grand sage (mon hôte warmshower Stephane de Tokyo) m'avait raconté : commencer mon tour d'Asie par le Japon pouvait comporter un risque, celui de rendre fade le reste de mon voyage. C'est un peu vrai, au Japon j'avais l'impression de rouler au paradis des cyclistes. Je redescends sur terre en Corée du Sud, et du coup je ne peux pas m'empêcher de me prendre au petit jeu des comparaisons entre voisins. En voici quelques une, en vrac ...
 
Niveau cuisine, c'est parfois super épicé ! Les feux rouges et passages piétons sont de nouveau considérés comme des options. Les vitres des voitures sont très souvent teintées en noir, c'est aussi le retour des sempiternels chauffards. La musique dance de mauvaise qualité - à fond les ballons - remplace la douce musique d’ascenseur dans les supermarchés. C'est moins cher, généralement. Les convenient stores (combinis) ne sont plus aussi « convenient ». Il y en a aussi beaucoup moins, le ravitaillement en nourriture se complique un petit peu. Niveau wc, je perds le délicieux jet nettoyant du popotin japonais, mais je gagne une apaisante musique classique d'ambiance. Du coup, je peux me soulager pépère en écoutant du Schubert, déféquer pénard en écoutant du Mozart. 
 
Les coréens sont fondus de vélo. J'emprunte en ce moment une longue piste cyclable de 600-700 bornes qui relie Busan dans le sud à la capitale Séoul dans le nord. Je me frotte à une faune de pédaleurs assez hétéroclite : sportifs de haut-niveau, cyclistes du dimanche, randonneurs occasionnels, vieillards qui ont fait de la petite reine leur moyen de déplacement principal … Cela me fait un point commun avec tous ces gens et m'attire bien souvent leur sympathie. Je note aussi l'usage répandu du vélo-radio. Ils adorent rouler en musique. Je peux donc monter sans vergogne le son de ma petite enceinte portative achetée à Hiroshima. Et rejoins ainsi mélodieusement la grande famille des usagers à deux roues coréens. 
 
Cette voie verte comporte ses avantages et inconvénients. Les mêmes que ceux de l'Eurovélo 6, à vrai dire. Difficile de se motiver pour en sortir et j'imagine que je passe à côté de pas mal de choses. Les infrastructures sont excellentes et les endroits à bivouac nombreux (mention spéciale à ces petites maisons en bois destinées au pic-nic, elle me feront un excellent abri lorsque la saison des pluies commencera). Sortir de ce sentier balisé signifie affronter un trafic parfois dense et se frotter à de gros dénivelés. Ceci dit, même au bord de la rivière, on doit souvent se coltiner des grimpettes à plus de 10 % (voire 15 ou 20 …). Parait-il, c'est la manière « Korean Style » d'appréhender les pentes, et on peut aisément effectuer une analogie avec le développement économique rapide du pays sur ces dernières années … Tout droit, plus vite !
 
Le style coréen, c'est aussi de la gentillesse débordante. Je récolte moins de sourires qu'au Japon, mais plus de petits cadeaux. J'ai même pensé à rebaptiser mon blog avec le titre « Forever Caravane du Tour de France ». Les petits vieux adorent me parler, en coréen, bien sûr, et même si je ne pige rien cela semble faire l'affaire. Car ici rien que les patronymes sont déjà imprononçables, alors une phrase complète … Cependant, c'est toujours avec un grand plaisir que j'apprends ces nouveaux mots-clefs et ces nouvelles habitudes alimentaires. C'est inhérent à la découverte d'une contrée.
 

Le mercure commence à grimper nettement avec des températures dépassant maintenant les 30°C dans l'après-midi. Grosses chaleurs qui n'empêchent cependant pas la coquetterie : j'applique avec un soin quotidien mes crèmes de jour de nuit : protection solaire indice 50 le matin et spray anti-moustique le soir. En définitive, la Corée du Sud m'offre un bref aperçu des menus difficultés qui se présenteront sur ma route asiatique. Sans pour autant perdre de vue mes objectifs principaux : expérimenter la liberté, rencontrer de belles personnes et profiter sereinement de ce que la route a à m'offrir. 

 

Après une traversée en solo depuis Busan jusqu'à Chungju, j'ai goûté à nouveau pendant quelques jours au plaisir du voyage en groupe. Avec mes acolytes Anais et Gilles que j'avais déjà rencontré au Japon sur le Shimanami Kaido (nous avons même pu supporter ensemble nos équipes respectives pour le dernier match de poule de l'Eurocup : France-Suisse) et une neophyte dans le monde du cyclotourisme, Carolina. Avant cela, je n'ai jamais eu le loisir de me sentir seul … Je remercie les Jung, Jay, Dong, Seungha, James et Katie, et les autres sympathiques personnes rencontrées sur le chemin qui m'ont permis de découvrir de la meilleure des manières la chaleur de l'hospitalité coréenne : le plus souvent autour d'un copieux et succulent repas. 
 

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Fukuoka J84 Japon

Cap sur la Corée !

Ecrit le 7 juin 2016 à Fukuoka – km 3566

Le Japon en quelques chiffres

Plus de 2700 km au compteur
Entre 10 et 12 jours de pause (pendant les lesquels je me balade le plus souvent à vélo !)
Une moyenne de 52-54 km par jour
3 cols à plus de 1000 m (dont un à 1500m)
Une route barrée m'occasionnant un rebrousse-chemin (arrivé à 1500 m)

62 nuits :

> 42 nuits en bivouac dans 38 lieux différents - dont 3 terrains de camping gratuit
> 10 nuits chez 6 hôtes warmshower
> 7 nuits chez 4 hôtes couchsurfing
> 3 nuits chez l'habitant, sur 2 invitations (hors réseau d'hospitalité)


0 crevaison (!)
1 chaîne neuve
2 nouvelles paires de freins
1 problème mécanique non résolu


Quelques trous dans ma tente :/ (?)
Une nouvelle espèce de moustiques anthropophages


Et de nombreuses et nombreux :
Belles rencontres, bento box, onsens ... et surtout souvenirs impérissables !




Ces quelques statistiques ne peuvent cependant pas résumer l'expérience qu'a représenté pour moi cette traversée du Japon. J'en rêvais depuis longtemps, cette fois-ci le vécu a dépassé l'imaginaire ... Je suis allé de surprises en découvertes, de découvertes en ravissements. Avec l'Inde, c'est le pays qui m'a procuré le plus grand dépaysement, dans un style tout à fait différent. Alors que le pays du dodelinement de tête me proposait un défi constant passant par une rude mise à l'épreuve des nerfs et un arc-en-ciel d'émotions, le Japon m'a bercé dans sa sécurité (parfois outrancière), la bienveillance désintéressée de ses autochtones et l'harmonie ronronnante entre technologie et tradition. Je me suis peu à peu débarrassé de toute la pression inhérante à la recherche d'un bivouac quotidien en Europe méditerranéenne pour une sérénité absolue, me donnant la possibilité de profiter calmement de chacun des événements de la route. Au Japon, c'est le vélo sans pression. Et je signe tout de suite pour la continuité en Corée du Sud, mon prochain pays étape.


Je quitte donc le Japon avec un petit pincement au cœur, mais avec une excitation certaine de découvrir une nouvelle contrée, une nouvelle culture ! Je retourne cette fois-ci sur le continent, pour un pays présentant toutefois de nouveau un profil insulaire car cerné par les eaux et la Corée du Nord (qui pour le moment n'est guère plus pédalable que la mer de Chine). On dit aussi de ce pays qu'il fait la symbiose entre la Chine et le Japon, dans la mentalité et la cuisine notamment. Je me prépare aussi à affronter la saison des pluies, qui a commencé hier à Fukuoka. Je voulais prolonger de quelques jours mon séjour sur Kuyshu, l'île la plus au sud de l'archipel nippon, mais la météo me dirige tout naturellement vers un débarquement rapide à Busan, qui accueillera ces grosses précipitations annuelles un peu plus tard (en tous cas c'est ce que j'espère).


Ces derniers jours ont été un temps d'intense réflexion sur la suite de mon voyage. Avant ce nouveau départ en mars dernier, j'avais plus ou moins planifié la route jusqu'à Séoul, et me voilà à un peu moins de 800 km de coups de pédales de cet objectif intermédiaire. Beaucoup de facteurs sont à prendre en compte, comme la durée des visas et leur lieu d'obtention (ce qui me pose un problème pour la Chine), la météo asiatique de cette période pas vraiment hospitalière (pluie, fortes chaleurs, typhons), et les modes de transport à employer pour palier aux deux problèmes suscités. Il y aura peut-être un moment où je devrais poser mon vélo quelques temps ... La réflexion est en cours.


Depuis les îles paradisiaques de Shimanami Kaido, j'ai traversé une zone côtière urbanisée pas franchement agréable, autour d'Hiroshima (à un jour près je serrais la main d'Obama qui lui n'a pas fait le chemin en vélo, le fainéant). Avec en "high-light" le mémorial de cette catastrophe nucléaire survenue à l'issu de la seconde guerre mondiale. A vrai dire, ce fut un peu un musée des horreurs didactique, tout y est fait pour qu'on se rende compte progressivement de l'ampleur et l'inutilité de ce crime contre l'humanité. Puis après un repli stratégique dans l'intérieur montagneux et campagnard du pays, j'ai eu les surprises des villages historiques Iwakuni et Tsuwano, de la balnéaire Hagi et de l'atypique plateau d'Akiyoshido. Pelé des sempiternels arbres, on s'y croirait presque en Irlande. Sur ce même plateau j'ai visité une immense grotte, avec de curieuses formations rocheuses. C'est ici aussi que j'ai rencontré la famille de Claire et Yoshi, couple taiwano-japonais qui m'a sympathiquement invité au gîte et au couvert à Fukuoka. Finalement, c'est là-bas dans cette ville portuaire que je vis mes derniers instants nippons, je trouve le repos et me resociabilise grâce au réseau couchsurfing.


 

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Imabari J66 Japon

Le voyageur persévérant

Ecrit à Imabari, le 22 mai 2015 - km 2880

 

La persévérance. Je crois bien que c'est la qualité première du cyclocampeur. S'il n'en a pas, il l'apprend, et s'il l'a déjà, et bien on peut dire que cette forme de voyage lui sied parfaitement. Les distances d'un de ces longs périples à vélo peuvent sembler interminables au regard d'une mappemonde. Mais le baroudeur pédaleur, lui, sait qu'à la force de ses cuisses il pourrait rejoindre n'importe quelle destination. En prenant son temps. Il ne s'agit pas ici de visiter un maximum de spots touristiques, ni de cocher triomphalement les cases d'une hypothétique « to do list », mais plutôt de se focaliser sur un objectif, et d'apprécier à leur juste valeur chacun des kilomètres qui le séparent de celui-ci. Avec plaisir, opiniâtreté et endurance. Apprendre à ne pas obtenir tout, tout de suite. De la persévérance, il m'en faudra donc pour atteindre mon but final, Bangkok. 

 

Je fais donc de mon mieux d'ici là pour célébrer chaque portion de mon chemin. De m'attarder sur certains détails, d'essayer de sauvegarder mon esprit contemplatif. Les ultimes kilomètres me donnent matière à cela. Shikoku, l'une des 4 îles majeures de l'archipel nippon, me procure beaucoup de joie dans les paysages, le bestiaire et les efforts consentis pour les mériter. Depuis Kyoto, je traversais une longue zone urbanisée, plate, qui m'a redonné les forces physiques et l'envie de me replonger dans quelques reliefs montagneux. Les hauteurs modestes de la vallée d'Iya et des gorges avoisinantes ont été ce sain détour. 

 

 

Mais la ville n'a pas démérité pour autant, car elle m'a donné l'opportunité de mieux comprendre la culture japonaise. Avec Osaka la tentaculaire (merci Maasa pour le couchsurfing), Kobe la balnéaire et Nara et ses sympathiques daims en liberté (et un super warmshower chez Tiphaine et Tristan). Sans oublier l'île d'Awaji, qui m'a offert une belle route côtière et un idéal bivouac en bord de mer. Après Shikoku, cela a encore été une affaire d'îles … Il faut dire qu'au Japon il pourrait difficilement en être autrement. J'ai trouvé le repos et fait quelques rencontres sympas sur le petit archipel de Shimanami situé entre Imabari et Onomichi, une chouette halte avec des airs de Caraïbes, en empruntant une idyllique voie vélo traversant de nombreux ponts.

 

Avec le retour des températures estivales, je redécouvre le plaisir du bivouac facile. Je n'ai plus la pression d'absolument armer la tente avant le coucher du soleil, car je peux m'attarder la nuit sans pour autant commencer à me geler les orteils. Ajouté à cela, trouver un spot de camping au Japon est une mission des plus aisées, car si l'on veille à ne gêner personne, on vous laissera tranquille. Au contraire, ce sera sous le regard surpris voire amusé des curieux promeneurs de l'aube que l'on se réveillera et pliera son paquetage. Cela m'ouvre la porte au campement dans les parcs publics, les aires de repos, et toute sorte d'endroits dans lesquels je n'aurai pas osé planter le piquet dans la plupart des pays d'Europe.

 

Le Japon, c'est aussi le pays de la musique d'ascenseur. J'avais déjà mentionné le fait qu'ici tout se fait en musique. J'avais apprécié ces petits jingles amusants pour signifier qu'une tâche était finie, comme récupérer l'argent dans le DAB, le changement du feu rouge au vert piétonnier, le marquage des heures clés de la journée (midi, 17h ou 18h) … On vit ici au rythme de ces petites mélodies. Au départ, je m'étais aussi pris de sympathie pour ces musiques de salle d'attente un peu ringardes qui sévissent dans tous les supermarchés, combinis et autres lieux publics. Jusqu'à ce que je me rende compte que ce sont les même titres qui passent partout en boucle … Je soupçonne même l'objet du crime d'être un seul et même album, une sorte de best-seller de la musique d'ambiance, composé de reprises de U2 à la clarinette ou du dernier tube de Taylor Swift façon Jean-Michel Jarre. Un véritable cauchemar pour les nerfs. Ah, les pauvres employés qui doivent endurer ce châtiment quotidien !

 

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Kyoto J54 Japon

Le Japon des samouraïs

Ecrit le 8 mai 2016 à Kyoto - km 2200

Ma première rencontre avec la civilisation nipponne il y a un mois de ça, fut de nuit en sortant de l'aéroport l'un de ses petits magasins que les locaux appellent "konbinis", abbréviation japonisante de l'anglais "convienent store", en français épicerie. En fait, le konbini, c'est bien plus que cela. Pour le cyclocampeur, c'est le lieu de ravitaillement ultime. On y trouve de tout : de l'eau chaude, de l'eau froide, des toilettes (propres), de l'électricité, des distributeurs automatiques de billets (les seuls qui acceptent les cartes étrangères avec ceux de la Poste) ... et de la nourriture bien sûr ! Les fameux bentos offre pour moins de 5 euros un plateau-repas équilibré, varié et délicieux. Un véritable bonheur quotidien. Et surtout, c'est le seul et unique endroit où je peux déposer mon petit sac de détritus du jour, car bizarrement, au Japon, on croule sous les emballages, mais il n'y a pas de poubelles publiques. Pour moi, c'est un hommage aux valeurs du pays, pour sa propreté, son côté pratique ("convenient", donc) et pour la politesse et délicatesse de ses employés. 
 

Entre 2 conbinis j'entame ma troisième vague de découverte, placée sous le signe de l'apprentissage. Elle est intimement associée aux rencontres, que je fais notamment via les réseaux d'hospitalité Warmshower et Couchsurfing. C'est par ce biais que j'en apprends chaque jour plus sur la culture autochtone, sur les bonnes manières à adopter (merci Patrice de Nagoya), sur l'histoire du pays, sur les coutumes et les aspects pratiques de la vie quotidienne (merci Gilles de Gifu).

 

Depuis Matsumoto, j'ai eu l'occasion de m'immerger dans le Japon de l'époque des samourais. Tout d'abord en visitant (de près ou de loin) des chateaux chargés d'Histoire (Nagoya, Mastumoto, Itayama, Gifu), puis en traversant des petits villages traditionnels avec ses temples et maisonettes faites de bois foncé (Narai-juku, Tsumago-juku, Magome-juku, Samegai-juku ...). Ce sont les petites routes et les itinéraires bis qui m'ont révélé toutes ces merveilles. Dès que j'en ai l'occasion, je m'éloigne de la route principale, et ceci est possible depuis que je suis sorti des chaussées de montagne.

 

Après, ce ne fut pas la période idéale pour la fréquentation des lieux touristiques, car ici, c'est la "Golden week", semaine où la plupart des employés sont en congés. La visite de leur propre pays reste un must pour la plupart d'entre eux. C'est à dire, à ce moment de l'année, un village pittoresque isolé peut aisément se transformer en Disneyland un week-end de la toussaint. Mais bon, je fais avec, et de bon coeur, car cela me donne moultes occasions de tailler la bavette avec le chalant et de récolter une belle moisson de sourires. Finalement, en déambulant avec mon vélo chargé, la principale attraction touristique, j'ai parfois l'impression que c'est moi !

 

Mes sensations de cycliste s'affinent, mes cuisses se durcissent, ces nombreux dénivélés m'ont forgé une excellente condition physique et la plupart des douleurs de position appartiennent (presque) désormais au passé. J'ai une santé de fer, mais le plus important dans un voyage au long cours, c'est d'avoir un moral d'acier. J'ai passé le cap de ces 2 mois sur la route avec quelques accents nostalgiques des moments passés avec amis et famille. Rien de plus normal, après tout. Ce qui ne change pas par contre, c'est ce bonheur intense que me procure ces premiers coups de pédales matinaux, après une ou deux journées de pause. A ce moment, j'oublie tout, mon esprit vagabonde puis se réjouit à l'idée de partir encore une fois à la découverte de l'inconnu.

 

Je ne pouvais pas mieux terminer cette portion de parcours qu'en passant par Kyoto. Tout ce que j'ai vu clairsemé depuis Matsumoto est dans cette capitale culturelle ici concentré : temples bouddhistes, temples shintoïstes et autres monuments emblématiques, cahutes traditionnelles en bois, quartiers historiques, parcs zen et verdoyant ...  le tout saupoudré par une belle ribambelle de japonaises qui se parent de leur plus beau kimono pour arpenter les rues. Kyoto, c'est cool. Et c'était un petit challenge pour moi d'y passer 3 jours en mode camping urbain. Pari réussi et même une belle option pour l'avenir, la liberté de circuler à vélo et de choisir son lieu de bivouac en ville donne une indépendance et et autonomie accrue !

 

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Matsumoto J44 Japon

L'adaptation du cyclocampeur

Ecrit le 26-04-16 à Matsumoto - km 1665

Ma découverte du Japon procède par vagues ...Si la première a été celle de l'émerveillement (vague qui n'est pas encore retombée), la seconde serait celle de l'adaptation. Par exemple, il m'est assez compliqué de trouver ce que je recherche en général. Des choses simples (en théorie) ! Tout d'abord parce que les produits ne sont pas tout à fait les mêmes, ensuite parce que c'est impossible pour moi de déchiffrer les kanjis et enfin, par le déficit de communication. A l'instar de mes compatriotes, les japonais semblent délaisser la langue de l'empire, de manière assez répandue. Je ne vais pas les blâmer, bien au contraire, mais cette langue d'habitude si pratique pour la communication qu'est l'anglais ne trouve ici que guère quelques pratiquants rôdés et réguliers. Alors je cherche, je fouille les magasins, et le plus souvent je sors bredouille ... 

 

S'il n'y a une chose que je ne découvre plus, c'est bien la gentillesse des locaux. Ils ont toujours un petit mot sympa pour moi (enfin c'est que je suppose), des encouragements (Gambate !) ou des expressions d'admiration (de l'effort physique je présume, on demande souvent à voir mes cuisses). Parfois, je me fais ravitailler tel un coureur du Tour de France. La caravane locale m'a déjà provisionné en biscuits, café, caramels et même serviette de toilettes. Je dois avoir des airs de Laurent Jalabert. 

 

J'apprécie aussi tout le réconfort et l'hygiène que me procurent les « onsens ». On y vient pour profiter des sources thermales, d'une bonne douche revigorante et d'un endroit pour se reposer. Un véritable oasis pour le cyclocampeur. Si je ne trouve aucun camping sur ma route (encore un autre mystère), je peux au moins sauvegarder une certaine fraîcheur et propreté. 

 

Une des motivations pour laquelle j'avais attaqué la montagne, c'était aussi pour continuer à voir éclore les fameux et splendides « sakuras » (cerisiers du Japon). L'altitude décale leur période de floraison. Alors qu'à Tokyo on voyait déjà tomber les derniers pétales, à Nikko, 800 m d'altitude, ils venaient tout juste d'ouvrir leur premiers bourgeons. Un vrai enchantement. Mais à partir de 1300-1500 m, les paysages semblent ne pas être encore sortis de la torpeur de l'hiver. Au point que  je me suis retrouvé confronté à une route coupée. Un barrage saisonnier. Et oui, au Japon à ce moment de l'année, la plupart des chaussées de haute-montagne (les cols à plus de 2000 m) sont encore recouverts de neige ! Et il faudra attendre le déblaiement de ceux-ci pour pouvoir à nouveau les emprunter. Je suis arrivé trop tôt dans les Alpes japonaises, à contre-coeur j'ai du faire demi-tour et reconsidérer mon itinéraire … Quand je mentionnais la difficulté d'obtenir une information ;)

 

Ce rebrousse-chemin m'a tout de même permis de comtempler des paysages magnifiques, et ce site inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco, le temple shintoiste de Toshogu, à Nikko. Et puis j'ai fait étape dans un village-onsen, Kutsasu, et pu profiter d'une source d'eau chaude acide en plein air. J'ai traversé un haut-plateau, et visité le temple Zenko-ji à Nagano, où j'ai pu assister à une célébration religieuse. Enfin, je fais étape dans cette ville lovée entre deux massifs montagneux, Matsumoto, célèbre pour son château. C'est aussi mon premier hôte couchsurfing depuis Tokyo. Cette partie du périple se révèle donc très physique (je ne compte plus les dénivelés journaliers encaissés par mes pauvres cuisses endolories), mais pas avare en découvertes !

 

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Tokyo J30 Japon

A la découverte du Japon

Ecrit le 12-04-16 à Tokyo (Japon) – km 1000

L'adage dit que pour voyager, il faut garder son âme d'enfant, pour rester ouvert et émerveillé face aux découvertes faites en chemin. En arrivant au Japon, c'est le contraire qui se produit, c'est le voyage qui me procure cette rafraîchissante cure de jouvence ! Je me replonge dans les séries animés de mon enfance, celle du Club Dorothée, et constate à quel point cette émission a œuvré pour rapprocher les français de ma génération et la culture japonaise. Je retrouve des éléments d'Olive et Tom par ici, d'autres de "Juliette je t'aime" par là ... De tous ces mangas animés qui traitaient de la vie quotidienne des nippons.

 

Et puis, toutes ces nouveautés ! Je suis le plus souvent étonné et fasciné par mes incessantes trouvailles. Par exemple, pour traiter les soucis de la vie quotidienne, ce pays a parfois opté pour des solutions bien différentes des nôtres. En général, c'est très fonctionnel et bien pensé, et fait appel à la technologie dernier cri. Les choses simples comme aller au restaurant ou faire la cuisine, aller aux toilettes ou prendre sa douche sont le plus souvent sujet à quelques interrogations assez cocasses. Cela relève même du rite initiatique !

 

La nourriture de l'archipel me dévoile aussi tous ses mystères dans la joie des papilles gustatives. Je ne vais pas le cacher, j'aadoore les sushis ;) Et puis tout le reste aussi : ramen, sashimis, rouleaux de printemps, tempura, soba, korokke, gyoza, et autres brochettes ... Tout est délicieux ! C'est un régal quotidien, et il me reste encore pas mal à découvrir. De plus, c'est assez facile de choisir son plat, car généralement les appellations nominatives de chacun des plats sont accompagnées des photos correspondantes dans les menus.

 

Cette iconographie se voit aussi transposée dans la rue. Je pensais avoir du mal à m'en sortir avec les kanjis (signes de l'alphabet japonais), mais la plupart des signalisations sont accompagnées d'idéogrammes assez didactiques. On verra si ce sera toujours le cas en dehors de Tokyo, mais pour le moment, j'apprécie ce sens de l'organisation pointu.

 

Leur sens du détail, aussi. Comme donner délicatement et avec considération (c'est à dire en le tenant avec les deux mains) un simple ticket de caisse, les petites musiques qui accompagnent la fermeture des parc et des magasins, et les jingles amusants des distributeurs automatiques. Je suis enthousiasmé par toutes ces petites choses qui rendent l'ordinaire plus agréable et harmonieux. 

 

Si Tokyo est une ville tentaculaire, il est par contre très aisé de s'y déplacer à vélo. Tout y est pensé pour faciliter la vie du cycliste. Les transports en commun, si je n'ai pas eu encore à les utiliser, semblent fonctionner à merveille. Du coup, on n'a pas cette impression de compression propre au chaos du trafic routier de certaines autres grandes métropoles, comme j'ai pu le ressentir par exemple à Athènes ou Istanbul. De nuit comme de jour, c'est un plaisir de parcourir à pédales la capitale nippone, à condition d'avoir en sa possession une bonne carte et un bon sens de l'orientation (ou un GPS bien à jour) !

 

Bien sûr, il y a quelques bizarreries et illogisme. Comme l'absence de poubelles publiques et l'impossibilité de parquer son vélo aisément (avec menace réelle de fourrière … tellement incompréhensible que personne ne respecte cette interdiction). Il y a aussi ces pachenkos, sorte de casino manga ultra bondés, où les addicts au «gambling» dépensent leur argent dans une atmosphère enfumée et un vacarme assourdissant. Je pourrais mentionner aussi ces micro-bars qui peuvent contenir jusqu'à 4-5 personnes maximum. Dans ces derniers, on a l'impression que le barman nous fait rentrer dans son intimité, et que les clients sont en fait les potes de toujours. 

 

Vraiment, le Japon n'a pas fini de me surprendre, et m'offre de bien belles promesses de voyage. Je fais aussi d'agréables rencontres. Chacune d'entre elle me donne l'occasion de constater la gentillesse et l'hospitalité des autochtones, qui mettent un point d'honneur à m'expliquer aimablement les particularités de leur culture. Je remercie particulièrement Kana de m'avoir si gentiment aider et guider à travers la ville, et ses adorables parents de m'avoir accueilli à bras ouvert (dans leur maison à l'architecture typiquement locale) ! Ma première impression générale des japonais est celle d'une population respectueuse de l'espace vital de chacun, et qui pour autant ne se laisse pas tomber dans une indifférence blasée. 

 

Je suis arrivé dans la soirée du 6 juin à l'aéroport de Naruta, à 70 km de Tokyo. J'ai ensuite remonté mon vélo sur place et passé la première nuit dans la nature, complètement « jetlagué ». J'ai ensuite été accueilli par 3 hôtes warmshower différents, pour 5 nuits au total (Merci Yoshi, Stéphane et Makiko, Akira). J'ai encore eu un sacré coup de chance, car je suis arrivé pile poil pour la semaine de floraison des sakuras (cerisier à fleurs), période pendant laquelle les habitants de l'archipel fêtent l'arrivée du printemps. C'est magnifique et je ne pouvais rêver mieux ! Après escale chez les parents de Kana, donc, me voilà reparti en direction des Alpes japonaises. Au programme, températures fraîches et plusieurs cols pouvant aller jusqu'à 2250 m. C'est un défi physique que je m'impose là, surtout chargé comme je suis, mais je voudrais connaître le Japon de l'intérieur, après avoir connu les extravagances de Tokyo. 

 

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Istanbul J22 Turquie

Sur les rives du Bosphore

Ecrit à Istanbul le 6 avril 2016 - km 815

Il y a des villes qui font rêver, d'autres qui ne laissent pas indifférents. Istanbul fait pour moi partie de ces deux catégories à la fois. Non seulement mon imaginaire de la ville a été comblé, mais j'ai aussi découvert une ville agréable, atypique, où il fait bon vivre. Les locaux m'ont tous assuré qu'après les explosions la ville est beaucoup moins fréquentée, que les gens sortent moins. J'y ai toutefois constaté une stimulante activité, qui peut rivaliser avec les animées Barcelone et Amsterdam. Elle fait partie de ces endroits où je me verrais bien séjourner pour un peu plus qu'une simple visite … J'ai aimé la présence de l'eau du Bosphore, les multiples petits quartiers à forte personnalité et l'animation des rues. J'ai beaucoup moins aimé le trafic routier chaotique et l'incivilité des chauffeurs, la faible offre de transport en commun et de voies cyclables, ce qui fait d'Istanbul l'une des pire villes à vivre à vélo. 

 

Istanbul, de part sa position, est une ville carrefour. On y ressent la rencontre des cultures européennes et orientales. Mais bizarrement, elle n'est pas vraiment cosmopolite, en tous cas pas encore (il y aura bien un moment où Ryanair y ouvrira une ligne régulière). J'ai essayé de découvrir pourquoi en parlant ici et là, en recueillant quelques infos et il s'avère qu'elle le fut dans le passé, bien avant qu'on y chasse (ou assassine) les nombreux grecs et arméniens. A Istanbul, on y vient donc de toute la Turquie, c'est une vibrante et puissante métropole, mais qui n'a pour le moment pas encore effectué complètement sa mue en « ville-monde ».

 

C'est ici aussi pour moi la transition vers une autre aventure, encore plus exotique et lointaine, car je continuerai la route depuis Tokyo, au Japon. J'ai donc eu ces derniers jours de nombreuses préoccupations d'organisation. C'est à ce moment que je me suis rendu compte que ma bonne étoile de voyageur me suivait toujours, car j'ai été fort bien entouré et aidé par mes hôtes warmshower, qui m'ont grandement facilité la vie et les démarches. Je tiens donc à remercier Sinan, mais aussi et surtout Burak et son adorable famille pour ce soutien réconfortant et logistique. 

 

Au final, je quitte Istanbul avec des envies d'y revenir, et de traverser le pays qui va avec. La Turquie m'a laissé entrevoir une hospitalité sans faille de ses habitants, des paysages intéressants, une cuisine riche et bon marché, des locaux curieux et accueillants … Pour tout cela, j'y remettrai les roues un jour. 

 

***

J'effectue actuellement mes premiers moulinets au Japon, et le dépaysement est total !  C'est aussi un total plaisir de s'y déplacer à vélo, même dans cette immense cité qu'est Tokyo. Je m'y sens presque en sécurité. Je prends continuellement en plein visage une foule de petites nouveautés que j'assimile au fur à mesure. C'est un pays plein de promesses, et je suis enchanté à l'idée d'y rouler quelques semaines ... 

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Otmanli J10 Turquie

Un nouveau départ à Thessalonique

Ecrit à Otmanli le 23-03-16, km 555, jour 10

J'ai eu pendant cette pause toutes les raisons d'être heureux. J'ai revu ma famille et constaté que tout roulait pour eux, même sans vélo. J'ai revu mes amis, et me suis rendu compte à quel point j'étais chanceux de les avoir, eux et ma famille. J'ai continué à faire de belles rencontres, même hors contexte du voyage. Je suis revenu dans le bain de mon environnement proche avec l'aura et l'audace du voyageur, ouvert et positif, apaisé et constructif. Que ces moments sont passés rapidement, à tel point qu'en un coup de pédale me voilà de nouveau à enfourcher mon fidèle destrier.

 

Aussi enthousiasmant et excitant que peuvent se révéler les projets et le futur, pour le moment, mon avenir immédiat, c'est le voyage. Et c'est avant tout une remise à niveau vers le présent : c'est ici et maintenant que je dois vivre les moments, les apprécier et leur donner de la valeur. Me remettre sur la route est avant tout un retour dans l'immédiat.

C'est aussi une piqûre de rappel d'optimisme. Malgré les petites galères inhérentes à l'itinérance et à la bicyclette, chaque jour me rappelle à quel point il est important de les relativiser pour rester ouvert aux bons moments, qui eux sont au moins tout aussi nombreux (si ce n'est plus) que ces petits problèmes du quotidien.

Puisque j'en suis à parler de petites galères, mon vélo semble avoir toujours autant de succès avec les chiens, qui semblent s'être reproduits comme les pains de Jésus. Plusieurs fois par jour, je dois m'arrêter pour faire face à la colère territoriale de ses canidés enragés, devant moi aussi montrer les crocs pour prétendre à continuer mon chemin. Un véritable fléau. Et je ne blâme pas forcément ces pauvres bêtes, mais plutôt la négligence complaisante de leurs maîtres.

 

Et parmi les bons moments, je pourrais évoquer la générosité quotidienne des grecs et des turques, leur côté amical et protecteur. Les chouettes bivouacs que je déniche aussi chaque jour, ces coins semblaient parfois m'attendre depuis toujours. Les cadeaux inattendus, les découvertes culinaires fortuites, se sentir de mieux en mieux physiquement ... Mis bout à bout, ils me procurent une saine sensation de bien-être et de vie. Voyager à vélo, c'est vraiment le pied !

 

Cette première portion de périple, c'est avant tout un parcours en solitaire. Je trace, je mange, je campe, je profite des moments d'accalmie. Comme si j'avais ce besoin de me remettre dans l'esprit du voyageur rêveur, de me concentrer de nouveau pleinement sur la route. Et puis surtout, je crois bien que j'ai très envie de commencer au plus tôt l'aventure asiatique. Depuis la Turquie, c'est un peu différent, je fais plus de recontres, quelques pauses tchai ... J'ai aussi ralenti le rythme juste avant d'arriver à Tekirdag.

 

Je suis arrivé à Athènes par avion, et après quelques jours de préparation et de maintenance de mon vélo (je tiens à remercier particulièrement mon ami Spiros pour m'avoir tant aidé dans cette étape, et Véronique encore une fois pour m'avoir procuré ce point de chute si important) j'ai pris le train pour Thessalonique, où j'ai retrouvé le temps d'un dîner la famille avec qui j'avais voyagé quelques jours en Allemagne. Un très bon moment, qui m'a remis dans le bain de la baroude. Je leur souhaite d'ailleurs un super beau voyage, ils ont dorénavant troqué leur vélo contre des chariots de marche et ont l'ambition de remonter jusqu'à Venise à pattes. 

 

Et puis de Thessalonique, c'est un nouveau départ à deux roues sur la route d'Istanbul. Puisque c'est d'actualité, oui, j'ai vu des réfugiés, notamment non loin de Kavala, sur la côte. Encore une autre occasion de souligner l'hospitalité et la générosité des locaux qui en Europe se retrouve bien seul pour faire face à cet afflux migrateur massif. 

Que l'aventure commence !

 

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Athènes

Le bilan du cyclocampeur

Écrit sur le chemin du retour le 22/12/15

C'est l'heure de faire le bilan du voyage !

Ce périple … c'est (entre autres) :
  • 5 mois et demi (dont un mois de pause à Vienne suite au vol)
  • 6000 km
  • 9 pays traversés : La France, la Suisse, l'Allemagne, l'Autriche, la Slovénie, la Croatie, le Montenegro, l'Albanie et la Grèce (plus 2 villes visitées en Italie et Slovaquie : Trieste et Bratislava)
  • 2 vélos (gloups)
  • 4 crevaisons (dont 2 le même jour)
  • 5 cols à 800-1000 m d'altitude
  • (presque) jamais malade
  • 4 piquets de tente perdus
  • 1 chute (à l'arrêt à cause du vent)
  • 4 jeux de piles pour ma lampe frontale
  • beaucoup de sandwichs
  • encore plus de sourires
  • quelques potes animaux (dont 1 corbeau, j'en veux un pour moi !)
  • 1 piqûre de guêpe ...
  • infiniment plus de piqûres de moustiques ! ...

Mes nuits :
  • 44 bivouacs différents
  • 23 nuits dans 21 campings
  • 64 nuits chez 17 hôtes Warmshower (dont 37 nuits à Vienne)
  • 3 nuits chez 2 hôtes Couchsurfing
  • 5 nuits invité spontanément par 4 rencontres de la route (dont 2 nuits en mode camping)
  • 3 nuits dans 2 auberges de jeunesse
  • 8 nuits chez des amis (1+7)
  • 19 nuits dans 8 appartements de location (avec mon groupe)
  • 4 nuits chez 2 hôtes Airbnb (lors de la visite de mon amie Joy)
  •  
L'autre jour, à Athènes, on me demandait ce qui m'avait le plus marqué pendant ce voyage. Spontanément, j'ai répondu la solidarité qui a suivi le vol de mon vélo. Ce moment signifie tout à fait la large palette de sentiments que j'ai pu ressentir lors de ce road trip … Être en contact permanent avec la nature, les gens, les éléments, tout cela intensifie profondément les émotions, et l'on passe ainsi du bonheur au chagrin, de la souffrance à l'extase, du désespoir à l'euphorie, chaque micro-événement affecte de manière disproportionnée par rapport à ce que l'on pourrait vivre de manière sédentaire. Sur la route, on se sent vivre ! J'imagine que c'est aussi cette quête d'émotions fortes dans les plaisirs les plus simples qui m'a motivé chaque jour à découvrir un nouvel environnement.
 
Bien avant le début du voyage, on me demandait parfois la première intention de mon voyage. C'était avant tout une volonté délibérée d'expérimenter la liberté. 6 mois plus tard, est-ce un pari réussi ? Je dirai oui et non. D'une certaine manière, j'ai été libre. De choisir mon itinéraire, des personnes avec qui je parle, de mon rythme journalier … J'ai vécu une presque totale indépendance : voyager avec mon matériel de camping m'a donné la possibilité de ne pas dépendre des offres de logements, pédaler m'a affranchi des stations d'essence. Cependant, il y a toujours des éléments dont on va dépendre : le temps imparti pour atteindre un objectif donné, par exemple pour rejoindre un hôte, ou pour composer en fonction de la météo. J'ai parfois eu l'impression d'être prisonnier de certains paramètres. La bonne nouvelle, c'est que les objectifs dépendent uniquement de la personne qui les fixent. Il ne tient donc qu'à moi de ne plus m'en fixer. Barouder ainsi sans fin ni but, au gré du vent, est-ce cela la vraie liberté ? Honnêtement, je ne sais pas si je suis prêt à voler de la sorte, chaque cible auto-fixée m'ayant procuré une réelle motivation supplémentaire. Sans compter le plaisir de l’achèvement ! Il doit y avoir un juste milieu dans tout ça, à moi à l'avenir d'affiner ces réglages pour enfin goûter à mon Graal, cette liberté tant recherchée.
 
Et j'aurai la possibilité de peaufiner tout ça, car je continuerai ce voyage. En mars. Dans un premier temps, je reprendrai mon vélo à Athènes et me dirigerai en direction d'Istanbul. J'ai encore plus de 2 mois pour penser à la suite. Avec 2 options majeures : continuer sur ma lancée en Turquie pour enchaîner sur l'Iran et les pays en stan, ou alors prendre un avion à Istanbul et voler directement vers le grand Est pour une destination plus exotique comme le Japon. Prendre la décision de continuer ce voyage a été l'une des décisions les plus naturelles que j'ai eu à prendre. J'ai la motivation, le temps, la santé et il me reste des économies. Comment aurai-je pu concevoir un seul instant arrêter de faire ce qui me rend heureux ? Je me trouverai peut-être fort dépourvu quand la bise sera venu, mais avec quelques précieux trésors en mémoire. Certains investissent dans la pierre, moi j'investis dans le souvenir. 
 
Le dernier tronçon de la baroude a été nettement plus urbain. J'ai tout d'abord apprécié Patras et son ambiance détendue de vie estudiantine, où j'ai eu la visite de mon amie coréenne Joy. Et puis la campagne d'Egio, où nous avons fait la connaissance de Nikos et de son adorable famille. Ce fut ensuite la dernière ligne droite vers Athènes en solo, la côte nord du Péloponnèse, de plus en plus dense en population, de plus en plus aride, entre différentes teintes qui allèrent des multiples nuances de bleu du ciel et de la mer jusqu'au gris-ocre et de la terre. J'ai beaucoup aimé la capitale hellène, vivante et historique. Véronique, une amie française rencontrée en Inde, m'y a très gentiment laissé son appartement alors qu'elle n'y était même pas ! C'est sa fille, Athéna, qui fut donc mon dernier hôte et qui m'a fait sentir comme à la maison ! Athènes, j'y retournerai, alors j'aurai l'occasion de l'apprécier une fois de plus … To be continued :)
 

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Gefira Mpania J159 Grèce

La balade grecque

Ecrit le 07-12-15 à Patras (Grèce), km 2900 (+2700) - Jour 159

- Deutchland ? (deux options : ou je ressemble au prototype du cyclocampeur allemand, ou alors c'est une petite vérification d'un ennemi potentiel)
- No, France
- Ah, Holland ...
- No no, France
- Yes, François Hollande !
- Aaaah, OK :)

(On ne rate jamais une bonne blague avec notre François national)

Ainsi parfois un brin surréalistement les grecs entreprennent de briser la glace. Car ils ne manquent jamais de faire fonctionner leur curiosité, à mon plus grand plaisir. Dès lors que je m'arrête de pédaler, je me prépare à l'éventualité de tenir quelques bribes de conversations avec les gens de passage. On m'invite à boire un café, on m'offre des oranges, on me demande d'où je viens, où je vais. On ne perd jamais une occasion de me sourire et de me saluer. Yassou ! Ou bien Yass, Ya-Ya, Ya, Yassin,Ya filé, sans compter autres kalimera et j'en passe, énoncer le bonjour se décline à l'infini. Ou comment se présenter en entretenant la surprise. Le mieux dans tout ça, c'est que cette gentillesse est tout à fait gratuite. Oui, les grecs sont sympas par pur plaisir, ils n'ont rien à vendre au touriste de passage que je suis, seulement un moment à partager. Et je parierai même qu'ils sont tout aussi aimables avec le cyclocampeur allemand :)
 
Ce qu'on m'avait promis pour la côte croate, c'est finalement en Grèce que je le trouve. Une belle route littorale, sauvage, peu empruntée, avec des paysages à couper le souffle, une belle succession de montées et descentes maîtrisées, des petits villages de pêcheurs où le temps semble s'être arrêté … Longer l'Adriatique grecque me rend serein et heureux. Elle m'offre une toute nouvelle plénitude. Lorsque cette chaussée est complétée par un noble sentier de montagne, parées de ses plus chatoyantes couleurs d'automne, je peux vous assurer tranquillement que c'est l'itinéraire idéal pour cette fin de périple, un bel atterrissage en douceur. Le tout sur fond de températures encore estivales au cœur de la journée (jusqu'à 20°C et un soleil qui cogne) avec des nuitées nettement plus fraîches.
 
C'est une expérience en solo, de nouveau. Nos routes se sont séparées à Igoumenitsa, au second jour de notre sortie d'Albanie. Ce fut de bien belles semaines, intenses, à se découvrir puis s'apprécier. Je suis très heureux d'avoir partager ces moments avec Calvin, Max et Mona. C'est aussi une manière de voyager assez différente que prendre la route en solitaire. Le groupe prime sur l'individu, les décisions doivent être prises à l'unisson, un équilibre se créée, se perd, se retrouve. C'est un petit concentré de vie en communauté ! Au final, je sors de ce mois en équipe avec l'impression de connaître ces joyeux drilles depuis fort bien longtemps. 
 
Cependant, rouler pour ma pomme me manquait aussi (tout autant que mes ex-acolytes me manquent actuellement). Prendre mes propres décisions, m'arrêter inopinément pour photographier, m'attarder sur un détail, dénicher à l'improviste un endroit pour y passer la nuit … Je peaufine de nouveau mon art du bivouac, et goûte avec un petit plaisir égoïste les moments passés seul en compagnie des arbres, du sable et des couchers de soleil … Et même parfois de quelques renards !
 
Il y a toutefois une petite ombre au tableau : les chiens. En temps normal, je les adore. Ils deviennent cependant pour le cycliste l'ennemi héréditaire n°1, une menace qui a commencé à se manifester depuis la Croatie et qui prend ici une toute autre dimension. Ils défendent crocs et griffes leur territoire, avec zèle et acharnement. Tout va bien lorsqu'ils sont attachés ou séparés de mes cuissots par une clôture. Mais il arrive parfois quelques surprises : des portails mal fermés ou bien des chiens errants qui eux aussi ont leur soucis de gestion de lopin de terre … Je reste donc sur mes gardes à chaque aboiement, vérifiant par ici si la laisse est bien accrochée, par là si le grillage est bien ficelé. Avec dans la poche un petit caillou à brandir qui fait toujours son effet mais qu'heureusement je n'ai jamais encore eu à utiliser. C'est devenu ma caillasse porte-bonheur, dont j'espère n'avoir jamais à me séparer.
 

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Ksamil J150 Albanie

L'attente du cyclocampeur

Ecrit le 27/11/15 à Ksamil (Albanie) - Jour 150 - Km 2472 (+2700 km ancien compteur)

Ces derniers jours, j'ai pris deux décisions importantes pour la suite de mon voyage. Tout d'abord, de rentrer en France pour les fêtes de fin d'année. Ensuite, de reprendre la route à l'éclosion des premiers bourgeons. Il me reste donc un hiver à remplir, ce qui me donnera le temps de réfléchir aux prochaines cibles accessibles pour ma fléchette à deux roues. Une seule certitude, le point de nouveau départ sera l'arrivée finale du périple actuel: Athènes. J'ai en effet la possibilité d'y faire hiberner mon vélo chez une amie (Merci Véronique !). Quelque part, ce sera comme si je ne stoppais pas le voyage en cours, comme si je n'effectuais qu'une simple pause. Cette idée me plaît car je n'ai pas envie de m'arrêter en si bon chemin. J'évite ainsi le rude hiver qui se prépare et recharge sereinement mes batteries auprès des miens.
 
Car c'est vrai, l'hiver européen n'est pas vraiment la meilleure des saisons pour le cyclotouriste. Voguer toujours un peu plus vers le sud permet de retarder l'échéance de la rudesse des conditions météorologiques sans pour autant l'éviter éternellement. Nous sommes actuellement coincés dans le sud de l'Albanie depuis plusieurs jours (Himare, Sarande, Ksamil), attendant la fin des giboulées et autres orages pour pédaler de nouveau au sec. Le ciel est changeant, imprévisible, et seul s'armer de patience nous permettra d'économiser ces précieuses réserves de force mentale. Rouler mouiller, c'est une des principales craintes du cyclocampeur. 
 
C'est par contre un temps propice à la réflexion et pour prendre soin de son corps, reposer son esprit. Au menu des occupations quotidiennes nous comptons sur les jeux de cartes, l'épluchage des films de mon disque dur (lorsqu'il n'y a pas de coupure d'électricité), la mise à jour des lectures en cours et quelques conversations métaphysiques. C'est aussi dans ce genre de situation que la notion de groupe prend tout son sens. 
 
Les derniers 800 kilomètres qui me séparent d'ici à Athènes risquent donc d'être parcouru à un rythme un peu plus soutenu que prévu. Je ne me mets pourtant aucune pression. Ce qui compte avant tout : profiter de ce que la route m'offre comme j'ai tenté de le faire jusqu'à présent. Il y a quelques temps le fait de penser à une éventuelle fin de parcours m'aurait rendu triste et anxieux, mais la douce projection de retrouver famille et amis suffit à mon bonheur et me permet d'aborder ce dernier tronçon de route en toute quiétude, avec le sentiment d'avoir déjà vécu une aventure extraordinaire.
 
Depuis Tirana, nous avons traversé la morne plaine de la côte adriatique. Les paysages ne furent pas franchement hospitaliers. Il s'y prépare manifestement pour la prochaine décade une gigantesque invasion de touristes : les bâtiments en cours de construction pullulent, sans vraiment savoir si on aura un jour le privilège de pendre leur crémaillère.  Pour renouer enfin avec la splendeur de la nature, nous avons du franchir un rude col à plus de 1000 mètres d'altitude (le mont Cka), avec son lot de pentes raides et de transpiration inhérente. Aussi, j'ai eu la possibilité de découvrir le site archéologique de Butrint, inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco. Il témoigne de l'activité débordante de la région depuis l'Antiquité jusqu'au Moyen-Age, et rassemble en son seing de nombreux vestiges d'époques variées, cette petite presque-île ayant été dominée successivement par les grands empires grecs et romains (avec même un bref épisode de colonisation normande). L'Albanie est définitivement un pays différent, riche de par la chaleur de ses habitants et de par son histoire, et qui propose un réel dépaysement à celui qui saura apercevoir la beauté sous ce vernis de misère. J'aimerai y retourner un jour.
 
De la Grèce, je garde un souvenir impérissable des colonies de vacances où j'avais fêté mes 14 ans. Un séjour itinérant à découvrir les féeriques Cyclades : Amorgos, Santorin, la Crête … Plus j'y repense et plus j'ai l'intime conviction que c'est lors de cette première expérience encadrée de Liberté que j'ai été piqué la première fois par la mouche du voyage. En revenant ainsi sur mes traces d'apprenti backpacker, je boucle peut-être mon premier grand cycle de vie de baroude, ouvrant la voie à un nouveau que je souhaite encore plus riche et palpitant !

Je me souviens aussi des villages aux maisons blanches et volets bleus, du sourire des habitants et de l'excellente et saine cuisine des îles. J'imagine qu'après toutes ces années je vais mettre les pieds dans un tout autre pays. La crise étant depuis passée par là, je ne sais pas du tout à quoi m'attendre. Finalement, c'est peut-être mieux comme ça, de me laisser surprendre et d'écrire ce nouveau chapitre de mes aventures à partir d'une page totalement vierge. 

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Shkallnur J139 Albanie

Le Sourire Albanais

Ecrit à Shkallnur (Albanie) le 16/11/15 - km 2150 nouveau compteur (+2700 ancien compteur)

Bien sûr, nous sommes tous marqués par cet ignoble tragédie. 

Nous l'avons appris, en cette douce matinée d'automne, alors que nous nous réveillions paisiblement dans la demeure de la famille d'Izmir. A l'improviste, nous avons été chaleureusement invité à prendre part aux rituels domestiques alors que le soleil se couchait et que nous commençions à spéculer nerveusement sur la teneur de la nuit qui allait suivre. Alors même que se déroulait les attaques, nous vivions un intense moment de fraternité et d'amitié interculturel et inter-religieux, bien éloigné des principes intolérants qui ont conduit ces quelques tarés à répandre la terreur sur mon beau Paris. 
 
L'Albanie est d'ailleurs un exemple concret de cohabitation religieuse pacifique dans un pays à forte dominante mulsulmane. Dans les grandes villes se cotoient harmonieusement clochers et minarets, dans une atmosphère de paix sereine. Cette force tranquille, elle vient probablement du caractère enjoué et curieux des autochtones, à la fois protecteurs et chaleureux pour nous touristes à vélo. Le plus beau paysage que peut nous offrir ce pays, c'est le sourire de ses habitants... L'âme de l'Albanie.

A la simple évocation de mon pays d'origine, c'est avec un sincère désarroi que les albanais témoignent leur sympathie pour mes compatriotes. C'est un vif message de fraternité que je veux partager avec vous. Face à ce drame, nous devons rester unis dans la douleur, toute nationalité ou religion confondue. Pour combattre la haine, pour faire renaitre l'espoir, pour continuer à aspirer à la Liberté.
 
Concernant l'expérience baroudeuse, ce pays propose le premier réel dépaysement depuis le départ. J'ai bien cru retrouver sur bien des points ma chère et tendre "Mother India" : le chaos ambiant, le sourire et la curiosité des passants, les sympatoches chiens errants, les quelques vaches parsemées sur le chemin, la relativement haute densité de population, les petites boutiques spécialisées, le bruit des klaxons, le dodelinement de tête d'acquiescement, les enfants mendiants, la pauvreté et richesse apparente ... Tout ce qui fait de l'Inde un cocktail détonnant, l'Albanie le possède, sans pour autant exercer sur le touriste la même pression surréaliste. C'est un vrai plaisir de découvrir ce pays, à la fois si proche géographiquement et si loin dans les us de notre Europe. Reste un mystère à élucider : 70-80 % du parc automobile est composé de bonnes grosses berlines Mercedes, allant du tas de taules jusqu'au coupé rutilant. Magie du marketing ? Prédominance de l'apparence ? Confiance aveugle en la robustesse allemande ? 
 
Avant cela, malgré la beauté de la Croatie, rien ne nous avait préparé à la majesté des paysages monténégrins. Nous avons traversé une baie féérique, gravi un col à 1100m, bivouaqué à la belle étoile 100 m plus bas, savourant inoubliables coucher et lever de soleil. Nous avons campé au bord d'un marais, nous réchauffant au feu de bois, bivouaqué au pied d'une église ... Le Monténégro a été le tampon idéal entre ces deux grands pays, nous offrant le meilleur du spectacle naturel croate et une porte ouverte vers la chaleur des albanais. Jusqu'à Pogdorica, capitale sans âme de ce pays atypique. 3 nuits au paradis. 
 
Voyager à plusieurs se révèle aussi une expérience enrichissante. Le groupe lui-même se présente comme une entité vivante qui évolue au fil du temps. Tout d'abord en nombre : de 4 nous sommes à 7, puis à 8, ensuite à 6 pour enfin revenir enfin au nombre initial. Et puis en terme de relation : nous apprenons à nous connaitre, à gérer nos humeurs et rythmes différents. Une complicité se créée et les "privates jokes" se multiplient. Cette entité se présente sous la forme d'un cocon protecteur, nous donnant la force et la sécurité du nombre, l'envie de composer un destin commun. Toutefois, j'aspire aussi à tenter ma propre expérience du pays, de me remettre dans l'esprit du voyageur photographe, et pour cela, il me faudra quitter à contre-coeur cette joyeuse tribu qui est la mienne depuis plus de 2 semaines. Avec l'espoir non dissimulé de pouvoir rouler de nouveau à leur côté un jour prochain. Nos karmas sont dorénavant liés. 
 
Je pense aussi très fort à ma famille en France. Loin des yeux près du coeur, je vous envoie toutes mes ondes positives et mon affection à distance, et chaque kilomètre parcouru est pour moi l'occasion d'appliquer nos valeurs partagées de générosité et de respect. Je voyage aussi avec vous et vous embrasse bien fort. Avec des bises toutes spéciales à mon papy et ma mamy que j'adore.
 

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Dubrovnik J129 Croatie

Le rythme du cyclocampeur

Écrit à Dubrovnik le 06/11/2015 – km 1768 nouveau compteur (+ 2700 km ancien compteur)

Lorsque j'avais imaginé mon voyage automnal, je m'étais figuré les caprices de la météo et les fluctuations de fréquentation touristique. Cependant, j'avais oublié une notion essentielle : la durée d'ensoleillement. Car c'est elle qui conditionne le rythme de la journée du cyclocampeur. Souhaitant rouler au clair, lorsque le crépuscule pointe le bout de son nez à 17h00, il est préférable de commencer à chercher le bivouac à partir de 16h00. Il n'est même pas rare que je me retrouve dans les bras de Morphée bien avant le début du journal de 20h, alors plongé dans la nuit froide et humide. Le changement à l'heure d'hiver n'arrange rien et me décale d'autant plus du monde civilisé. Avec comme conséquence fâcheuse de raccourcir considérablement le temps de pédalage journalier, et donc le nombre de kilomètres potentiellement accomplis en un tour de soleil. 

 

De jour, le contraste est saisissant. Le soleil s'installe, cognant comme un aoûtien et assurant au voyageur d'air libre une salvatrice assistance morale. Et bien, je dois avouer, cela fait plaisir ces vacances à l'intérieur des vacances. Ne pas avoir à lutter contre la pluie ou le vent apporte réjouissance et matière à enthousiasme. Sourire que semble aussi avoir retrouvé les locaux. Il n'est désormais pas rare de se faire encourager par un coup de klaxon amical (ou pas) ou de répondre à l'aimable salutation d'un badaud. Finalement le soleil est le meilleur remède contre la morosité. 

 

Après Skradin, j'ai ralenti le rythme pour la première fois depuis Vienne. Tout d'abord, un hôte Warmshower (que je n'ai même pas le loisir de rencontrer) a eu la bonté de me laisser un minimaliste appartement pendant 6 jours, à Kastela, tout proche de Split. C'est un petit village de pêcheurs où le tourisme ne semble pas encore avoir eu prise, avec son esprit de quartier et son historique patrimoine architecturale. J'ai adoré me laisser happer par le faux-rythme de la vie locale, sans penser à avancer, à contempler le soleil se coucher où observer les vagues se briser. Et puis j'ai fait ma première rencontre croate, Malo, qui m'a montré quelques coins sympas de Split et quelques tips pour essayer de mieux comprendre les autochtones. 

 

Un autre changement majeur dans mon voyage, je voyage désormais en groupe. Je ne l'ai pas cherché, mais l'opportunité s'est présentée avec des cyclocampeurs que j'ai apprécié dès le premier jour. Et qui aussi, point essentiel, ont un rythme analogue au mien : une cinquante-soixantaine de kilomètres par jour (ou moins). Voyager en solitaire comporte ses avantages, importants à mes yeux, qui m'ont d'ailleurs poussé à penser mon voyage comme un « one-man trip». Mais le groupe me révèle une autre facette de l'aventure, socialement enrichissante car la rencontre se déroule plus sur le long terme que celle d'un local que l'on devra laisser un moment ou un autre sur le bord de la route. Côté matériel, il y a un autre avantage non négligeable : on partage les frais de bouche et de logement, et l'on gagne ainsi en confort tout en faisant des économies. J'imagine que d'une manière ou d'une autre le voyage me préparait à cette éventualité, et que j'étais enfin mûr pour accepter de partager la route. 

 

Nous somme donc 7. Groupe qui a été composé en 2 étapes. J'ai d'abord rejoint le noyau initial composé de Mona (Suisse), Max (France) et Calvin (Nouvelle-Zélande). Et quelques jours plus tard, c'était Tim (Suisse), Antoine (France) et Lydia (Hollande) qui venaient grossir les rangs. Tous partis de France (à l'exception de Lydia), nous traçons dorénavant la route en convoi, et dieu seul sait lorsque nos chemins se sépareront. Une seule certitude comme objectif commun : rejoindre la Grèce dans l'espoir d'un hiver meilleur. 

 

Parcourir la côte croate se présente comme un émerveillement quotidien. Malgré les routes parfois inhospitalières à la pratique du vélo, nos yeux s'écarquillent sur ces beautés de la nature et ces petits bijoux architecturaux. Après Split, nous avons pris le ferry direction l'île de Korcula et son relief accidenté. Au menu routes de bord de falaise somptueuses, passages au beau milieu de vignobles généreux et ma première baignade dans la mer adriatique, par une douce matinée de début de mois de novembre. Je n'ai pas pu résister au plaisir de nager dans cet eau presque chaude, le soleil levant venant me chatouiller gentiment la peau. Enfin, cerise sur le gâteau, Dubrovnik la blanche élégante nous dévoile ses charmes et nous permet de conclure en beauté cette traversée de la Croatie, parfois éprouvante, parfois douloureuse, parfois déroutante, mais surtout sublime et majestueuse.

 

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Skradin J116 Croatie

Les décisions du cyclocampeur

Ecrit le 24-10-15 à Skradin (Croatie) – km 1420 (+2700 ancien compteur)

Le cheminement du cyclo-campeur se construit suite à une série de décisions qui le mèneront ici ou ailleurs. Le choix de la route étant vaste, il est parfois des choix qui deviennent cornéliens. L'idéal serait de passer par toutes les routes ... Mais voilà, voyager à vélo, ce n'est pas comme se balader en voiture, chaque option de parcours implique une fine évaluation du coût temporel et en efforts physiques. Un gros détour pour visiter un endroit fort recommandable est tout à fait possible donc, mais il faudra étudier au préalable les pours et les contres en un laps de temps relativement court. Finalement, l'épopée cycliste devient une métaphore de la vie : il faudra faire le « deuil » de certaines routes et savoir accepter avec plaisir et ouverture ce que nous offre la voie que l'on emprunte. Pour sauvegarder ce pouvoir d'émerveillement, non entaché d'amertume et de regret. Le vélo enseigne l'humilité. 
 
Et puis il y a les rencontres. Warmshower reste toujours le moyen privilégié de les provoquer. Malheureusement, il semble encore être peu développé dans les pays des Balkans. J'ai toute de même fait la sympathique rencontre de Bertie, joueur de poker anglais qui vient passer quelques semaines par an dans sa résidence secondaire sur les bords de la côte sud d'Istrie. Une vue magique, un lieu splendide, et une chouette soirée à parler de tout et de rien. Non loin de là, à Moscenice, une paisible petite bourgade perdue dans les collines, j'ai été superbement accueilli par la Famille Kumicic. Olivier est originaire du coin, mais a grandi en France. Et Loetitia est originaire de Bueil, village se situant à quelques kilomètres de chez moi en Normandie ! Nous avons été mis en relation par l'intermédiaire de nos parents respectifs. Une très belle rencontre, qui m'a donné une porte d'entrée sur la culture du pays …
 
… Qui cependant n'a pas encore porté ses fruits. J'ai beaucoup de mal à établir le contact avec les locaux. Si je devais utiliser un seul mot pour les caractériser (en toute subjectivité), j'emploierais l'adjectif « placide ». Là où auparavant ma monture provoquait la curiosité et me servait de brise-glace, les croates y restent au contraire assez indifférents. Ne pas être au centre de toutes les attentions peut comporter certains avantages, mais sûrement pas celui de tisser du lien. Parfois je me dis, un extra-terrestre pourrait traverser la Croatie sur une brouette, cela ne les émouvrait pas plus que ça. A moi de redoubler les efforts, donc. Je n'ai pas dit mon dernier mot. Et puis la route me tient fort bien compagnie, elle devient à défaut de mieux une rencontre en soi-même.
 
De toutes façons, je ne suis jamais seul. Après la pluie, c'est le vent qui est venu m'accompagner quelques jours dans mes pérégrinations. La Bora (prononcez « BBourra ») se manifeste par rafales allant du continent vers la mer, pouvant allégrement atteindre les 50 km/h (correction du 29 octobre : on m'annonce des vents jusqu'à 200 voire 270 km/h, heureusement je n'ai pas eu à tester cet extrême !). J'en suis resté tellement soufflé qu'une fois je me suis retrouvé à terre avant même d'avoir pu poser le pied sur la pédale. Après l'Istrie, j'ai fait le choix de la montagne et d'aller découvrir la vallée de la rivière Lika, une région qui a été au centre du conflit balkanique des années 90. La région porte encore de nombreux stigmates visuels de cette période, en témoigne les nombreuses maisons abandonnées criblées d'impacts de balle et les vastes parcelles de terrains pas encore déminées. Avec les bourrasques, il y régnait comme une ambiance de fin de monde …
 
En se rapprochant de la côte, je peux enfin profiter de températures plus estivales. J'ai été aujourd'hui pendant mon jour de repos aller visiter les chutes d'eau du parc naturel Krka (prononcez comme vous voulez) : cela a été ma merveille de la semaine. Et puis j’écris ses lignes depuis une reposante plage d'eau douce. Le repos du guerrier. Je n'ai pas encore rejoint la côte, je fais un peu durer un peu le plaisir en prolongeant ma visite dans l'arrière-pays.
 

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Rovinj J106 Croatie

La météo du cyclocampeur

Écrit à Rovinj (Croatie) le 14/10/15 - km 940 sur nouveau compteur (+2700 ancien compteur)

Traverser les petits villages d'Istrie se révèle être un épisode fort agréable. En empruntant la Panrenzana, ancienne voie ferrée reconvertie récemment en route cyclable, on commence à Trieste en Italie pour finir à Porec sur la côte adriatique croate, en passant par la Slovénie (Piran) et puis les bucoliques villages des collines d'Istrie (Buje, Grozjnan …). Si en Slovénie on a de la bonne piste asphaltée, en Croatie, c'est un chemin terreux et caillouteux que l'on doit sillonner. Un moment de plaisir tant que le soleil est de la partie, mais qui se transforme en cauchemar lorsque la pluie s'en mêle. Depuis Ljubljana j'ai réussi à rouler entre les gouttes, j'ai même eu des journées de bonheur presque estivales … Mais voilà, depuis deux jours, j'essuie averses sur averses et j'ai du quitté à regret la champêtre Panrenzana pour épargner la gadoue à mes mécaniques, et puis reléguer toutes mes priorités derrière celle de me trouver un toit au sec pour la nuit. Quitter ce chemin cabossé m'a de facto porté sur les plus grands axes, partagés avec certains chauffeurs qui ne semblent pas se soucier des limitations de vitesse. 

 

Car sur la côte istrienne, les petites routes de campagne n'existe pas vraiment. Si l'on veut s'écarter de l'axe principal, on doit forcément goûter de la terre. Comme j'ai hâte que cette pluie en finisse pour à nouveau pouvoir les emprunter ! Ce que m'a montré la Croatie pendant ces trois premiers jours, ce sont des bourgades d'une beauté exquise, malheureusement parasitées par le tourisme de masse. Les bannières publicitaires king size font partie intégrantes du paysage, pour inciter le chaland à dépenser son argent. Je suis heureux de pouvoir parcourir cette région en octobre, c'est à dire en hors-saison. Je ressens toutefois tout ce potentiel « business » par le nombre colossal d'offres de logements saisonniers et de paillotes fermées sur le bord de la route. En fait, c'est surtout dans les terres que j'ai trouvé de la tranquillité et de l'authenticité. 

 

Abandonner le projet de la Bosnie a été une petite déception. D'autant plus que j'ai du aussi laisser de côté la montagne slovène et le parc naturel du Triglav, le froid ayant fait une apparition soudaine. A une semaine près, j'aurai pu découvrir quelques joyaux naturels comme le lac de Bled et la rivière Soca. J'ai parfois l'impression de faire la course avec la météo. Toutefois, la Slovénie a été un coup de cœur de voyage, pour le sourire de ses habitants, pour la poésie de ces paysages. J'aimerai y revenir un jour, pour visiter ce que j'ai manqué, mais cette fois-ci au bon moment de l'année, et voire même  un peu plus léger. Ma déception a tout de même été apaisée par la découverte de ce monument troglodyte exceptionnel, le château de Prejdama, et puis la révélation Piran, merveille de la côte adriatique. Et comment rester de marbre devant Rovinj, le mont St-Michel d'Istrie.

 

Autre ville majeure à mettre à mon actif, Trieste. Et un nouveau pays, accessoirement : l'Italie. J'ai toujours adoré traverser les frontières, même si dans l'espace Shengen cela ne représente plus grand chose. On dénote toujours quelques menus changements qui attisent l'attention et la curiosité. Bizarrement, les abords de frontières sont visuellement souvent assez moches, mais les stimuli de la nouveauté me donnent toujours un sentiment d'exploration et d'initiation. En passant de la Slovénie à l'Italie, puis de l'Italie à la Slovénie, et enfin de la Slovénie à la Croatie, le tout en 3 jours, mes sens ont été en éveil constant.

 

Ce qui m'a le plus marqué lors de mon arrivée en Italie, c'est l'odeur du bon café qui flottait dans l'air. Un peu cliché peut-être. Parfois ce que l'on remarque, c'est ce que l'on s'attend à retrouver … Trieste, cité multiculturelle croato-sloveno-italienne, n'a pas été exactement le genre de ville bike-friendly à laquelle je pouvais m'attendre, après mon arrivée-épopée dans le centre depuis une piste cyclable de toute beauté . C'est une agglomération totalement hostile au vélo, qui n'a ici aucune piste dédiée, aucune place de parking, aucun lieu de subsistance. Je parierai même qu'il y a une réelle volonté de la part de la municipalité de le défavoriser. Du coup je me suis senti un peu seul sur ma monture lorsque j'ai décidé d'arpenter les rues. Une ville atypique, intéressante, mais un peu surannée. Tout le contraire de Ljubljana, ville dynamique qui a su donner la part belle aux deux roues à pédales. Bon, il y a peut-être une explication topographique à tout cela, les collines de l'italienne n'invitant pas forcément au plaisir de rouler à la force du mollet ...

 

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Soteska (juste avant Ljublajana)

Au revoir Autriche, bonjour Slovénie !

Écrit le 05 octobre 2015 à  Soteska (Slovénie) – km 578 nouveau compteur (+2700 ancien compteur)

J'ai mis environ 5 jours à me remettre dans le voyage.
Le déclic, cela a été mon premier hôte warmshower en Slovénie, Anton. Dans sa ferme à 10 km de Maribor, le bestiaire est varié, on y trouve en vrac des lamas, alpagas, baudets, chevaux, chèvres, cochons vietnamiens et chats de campagne. Tous semblent y vivre paisiblement, sous le protecteur amour de leur propriétaire. Moi aussi, j'ai choyé les animaux, tout comme je l'ai été. Partager le quotidien de ce passionné de vélo, moto et de son pays (entre autres), ce fut une bouffée d'air frais, nécessaire et salvatrice.

Anton et ses bêtes
Avant cela, j'ai passé 5 nuits en bivouac, depuis Vienne jusqu'à la frontière slovène. 5 campings sauvages de toute beauté, dans des endroits idylliques, en montagne, en forêt, en bord de rivière. J'ai été coupé du monde pendant tout ce temps, n'adressant la parole que lorsque c'était strictement nécessaire. 


Et puis en Slovénie, tout a changé. Les badauds sont curieux, entament volontiers la discussion et échangent volontiers leur sourire contre le mien.
Alors voilà, me voici enfin de retour sur la route !
Je retrouve peu à peu ma condition physique, même si c'est laborieux. D'autant plus que c'est fini le plat pépère de la route Eurovelo 6. Maintenant, place à la montagne, et à de nombreuses collines.
Il y a un avantage dans tout ça : les paysages sont magnifiques, beaucoup plus variés que ceux de la vallée. Il y a donc une motivation derrière chaque relief. A mon actif un petit pic à plus de 950 m pour se chauffer tranquillement, en Autriche. 


Ce qui change aussi, c'est la météo. Je suis entré à Vienne avec un grand soleil, tout juste en sortie de canicule, et 40 jours plus tard, c'est presque l'hiver qui sonne à la porte. Aussi, il n'y a plus de route vélo balisée. Ni de trace GPS pour mon logiciel de navigation. Je dois composer moi-même mon itinéraire au jour le jour, ce qui me donne une plus grande liberté, mais aussi me donne plus de travail, et la sensation de passer à côté du meilleur chemin parfois.
Petit avantage, cela me donne l'occasion de composer la route avec les locaux, et ainsi glaner de précieux renseignements. Autre changement important, l'heure de coucher du soleil. Je dois me mettre à la recherche d'un bivouac à 17h alors que fin aout je pouvais me permettre d'y penser à partir de 19h.
Autant d'heures en moins de pédalage, cela raccourci les journées.

J'ai aussi pris deux décisions majeures pour la suite de mon voyage. J'ai décidé de zapper Sarajevo. En tous cas, je ne m'y rendrai pas en vélo. La variante météo est trop imprévisible, je peux me taper de la neige, le grand froid, et je ne suis pas équipé pour. Je vais donc prendre la direction de la côte adriatique.C'est pas mal tout de même, non ?
J'avais hésité longuement lors de ma première ébauche d’itinéraire. L'une des raisons pour laquelle je ne l'avais pas choisi, c'était par crainte de m'y retrouver en pleine saison touristique. Maintenant, ce risque n'existe plus, et je pourrais profiter encore quelque temps de la douceur du climat méditerranéen en bonus.

Par contre, je n'ai pas renoncé à faire de la montagne. Mais ce sera celle de Slovénie. Anton m'a refilé quelques bons tuyaux et surtout l'envie de mieux connaître son pays. Il existe une rivière, dont l'eau est bleue comme la mer des caraïbes. Elle s'appelle la rivière Socca et prend sa source dans les Alpes slovènes. Cela me donnera aussi l'occasion de traverser le splendide parc naturel Triglav. Il y a un col à 1600 m, du gros dénivelé positif. C'est un challenge de taille. Je m'y frotterai sous réserve de bonne météo (je viens de regarder,les prévisions ne sont pas si bonnes, j'hésite à y aller).

Toutefois le ciel est avec moi pour le moment. Mis à part le catastrophique jour du départ où je me suis pris une averse bien bien velue, je n'ai pas été mouillé. Et même mieux : j'ai eu parfois du soleil, de la douceur et même souvent le vent dans le dos (rectification : il pleut des cordes depuis mon arrivée hier à Ljubljana) … Dans ces conditions, difficile de ne pas profiter de la route, pourvu que cela dure ! 

J'ai bien sûr souvent une pensée pour tous ceux qui m'ont bien aidé à acquérir ce nouveau vélo. Il est splendide, j'ai les mêmes sensations qu'avec le premier. Il y a eu quelques trucs mineur à ajuster comme l'alignement des roues, qui ont du prendre quelques coups pendant le transport, mais maintenant il est à point.
Me reste plus qu'à pédaler !

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Vienne et Bratislava

Un nouveau départ

Le nouveau départ, c'est pour aujourd'hui ! Le vélo est fin prêt, et je suis rechargé à bloc. Quel plaisir de pouvoir à nouveau chevaucher un super vélo. Comparé à celui que l'on m'avait prêté en attendant, même s'il m'a rendu de fiers services, j'ai l'impression d'être sur coussins d'air !
C'est une énorme satisfaction de pouvoir compter à nouveau sur du tel matériel, une chance incomparable qui m'est donnée à nouveau de pouvoir réaliser ce projet qui me tient tant à coeur.
 

J'ai passé plus d'un mois à Vienne (c'est passé à une telle vitesse !), avec quelques virées occasionnelles à Bratislava, dans un premier temps pour essayer de retrouver mon vélo, et ensuite pour aller rendre visite.
J'ai toujours apprécié aller saluer ma bienfaitrice Martina, qui m'a tant soutenu le jour du vol (et bien après). Elle m'a fait découvrir son pays et sa culture, notamment par le biais de l'excellente cuisine slovaque. En témoigne les quelques kilos que j'ai gaillardement repris.
Et que dire de mes hôtes warmshowers viennois, Birgit et Berni, qui sont devenus mes amis, eux aussi. Ils m'ont aidé à surmonter cette épreuve, m'ont réconforté, et maintenant cela me fait tout drôle de partir ! J'avais pris des habitudes apaisantes, j'ai aimé passer du temps avec eux, nous avons partagé des moments de camaraderie et d'affection.
C'est avec un petit pincement au coeur que je m'éloignerai de cette maison qui a été mon refuge, mon abri, mon oasis.

Et c'est aussi avec quelques craintes que je quitte Vienne. Je sais pertinemment qu'elles s'enloveront dès les premiers coups de pédales, mais elles sont là, et témoignent des défis à venir.
Penser aux étapes de montagne m'a toujours un peu angoissé pendant le voyage, appréhension qui s'est rafermie depuis que nous sommes dorénavant rentrés officiellement dans l'automne, et que les températures chutent allègrement.
Suis-je suffisamment équipé contre le froid ? Et serais-je capable de gravir les dénivelés ? Il y a aussi l'actualité, les réfugiés, et la crainte de me heurter à la fermeture de  certaines frontières, et de devoir encore retarder mon périple (de tout coeur, je leur souhaite de trouver une terre de bon accueil). Aussi, l'inquiétude de me faire de nouveau voler va trainer un certains temps dans ma tête, jusqu'à ce que je retrouve la confiance, sans tromper ma vigilance, je l'espère. J'avais aussi quelques questionnements intérieurs avant mon départ en août, et une fois sur la route je n'avais plus assez de temps pour y penser !
Dans l'action, on trouve toujours une solution, il n'y a pas de place pour le doute et l'égarement. C'est une question de survie.

Qui sait, je suis peut-être atteint du syndrôme typiquement viennois de deuil et mélancolie, cher à Sigmund Freud, le local de l'étape. Si je demande à un autochtone de caractériser sa ville, nombreux ceux qui évoqueront ce sentiment de nostalgie obscure et majestueux, que l'on pourrait peut-être comparer au fado portugais ou à une version autrichienne du spleen parisien.
Alors, finalement, je me suis peut-être bien imprégné du lieu ... Même si la caractérisation précise de ce concept m'échappe bien encore.
 

Ce qui m'attend, c'est tout le contraire : vivre le moment présent ! Il y aura de la joie, de la bonne humeur, et surement même de la sueur. Il y aura peut-être quelques jours de flottement, mais une chose est sûre : c'est reparti pour un tour !
Merci encore à tous pour votre soutien.

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Vienne et Bratislava

La solidarité

La déception et le choc post-vol appartiennent dorénavant au passé, je tire (presque) définitivement un trait sur mon ancien vélo.
Je veux tourner la page et me concentrer sur la suite.
Je continue cependant mes recherches et les démarches administratives, on ne sait jamais, sur un coup de chance, un malentendu, quelqu'un peut tomber dessus, et je voudrais qu'on fasse le lien avec moi si un jour il venait à revenir à la surface. 

Je me partage actuellement entre Bratislava, où j'ai trouvé un hostel sympa, et Vienne, où mes hôtes warmshower ont la bonté de m'offrir le gîte.
A Vienne j'ai ma base logistique, où j'organise la venue et la future préparation de mon nouveau vélo, à Bratislava je garde contact avec les personnes qui m'aident à rechercher le vélo. J'y rencontre aussi des nouvelles personnes, découvre un peu la culture slovaque par la cuisine et la langue … J'ai décidé de profiter de mon séjour forcé ici, pour m'imprégner du lieu et des gens.
Après tout, je ne vais pas me morfondre éternellement dans l'attente de mon prochain coup de pédale !

Le lundi 24 août, à Bratislava, je me suis fait volé ma bicyclette, dans l'après-midi, alors que je me restaurais paisiblement.
J'avais laissé le vélo dans l'entrée du restaurant, si bien que pour une raison inconnue, la fatigue, trop de confiance, je n'avais pas contrôlé si l'antivol était correctement attaché. Un scélérat qui passait dans le coin s'est chargé de le faire à ma place, et est reparti avec le vélo sous le bras.
Pas de chance, moi qui d'habitude fait attention à ce genre de détail, il a fallu une seule erreur de déconcentration pour essuyer ce cauchemardesque larcin.
A vrai dire, c'était le pire scénario envisagé avant mon départ.
J'ai mis un certain temps à réaliser, et puis ensuite mon monde s'est écroulé, tous les projets établis depuis plusieurs mois, les rêves d'aventure, de rencontres, de découverte, je me voyais rentrer à la maison en n'ayant une fois de plus pas pu aller au bout.
Dans ce malheur, une petite compensation : j'avais laissé mes bagages à Vienne ...

Et puis, les jours suivants, l'espoir de nouveau permis. Grâce à tous les messages de soutien, déjà. Pas une personne ne m'a encouragé à rentrer !
Ce n'était qu'incitation à continuer, à me montrer plus fort que le chapardeur …
Cela m'a projeté de nouveau dans le voyage. Et puis, il y a eu cette collecte, la matérialisation de tous ces messages de soutien, et je dois dire, c'est une aide fantastique !
Je suis profondément touché par cet élan de générosité, aussi inattendu que précieux, par vos gentils mots, qui m'aident sacrément bien à me remettre en selle !
Je me sentais jusqu'à présent comme un voyageur solitaire alors qu'en fait je pédalais avec vous tous. Je suis très fier de pouvoir compter sur vous, amis et famille, et la suite de mon voyage aura dorénavant une saveur particulière, celle du bonheur partagé. 

Je vais donc pouvoir investir dans du matériel de qualité, ce qui me permettra de ne pas changer l'itinéraire prévu et d'affronter quelques arpents de montagne des Balkans.
Je suis en ce moment en pourparlers avec la boutique Rando-cycle à Paris pour me faire envoyer ma nouvelle monture depuis la France. Normalement, il devrait arriver vers la fin de la semaine prochaine. Avec quelques jours de montage supplémentaires à prévoir, je repartirai d'ici le lundi 14 septembre sur un destrier flambant neuf et capable d'avaler de nombreux kilomètres sans sourciller.
Vienne compte aussi de nombreux magasins de vélo où je pourrais acheter quelques accessoires indispensables.
Je veux aussi me renforcer au niveau sécurité. Quoi de plus normal ?
Je me promets aussi intérieurement de ne jamais plus connaître d'excès de confiance si je dois m'éloigner de mon vélo. 

Au final, quelle histoire, que d'émotions ! Si je dois tirer un petit bilan de cette mésaventure, j'en sortirais plus de positif que de négatif, vraiment.
Je n'en veux pas à mon voleur, et je ne m'en veux plus. Le voyage est ainsi fait de haut et de bas, et je souhaite que cet épisode soit le dernier du genre.
Et puis, en revenant d'aussi loin, chaque nouvelle douceur goûtée lors de mes prochaines balades sera savourée à sa juste valeur, j'en suis convaincu. Maintenant, je me concentre sur la découverte de ces deux villes antagonistes que sont Vienne et Bratislava.

A bientôt !

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Vienne et Bratislava

Vélo volé à Bratislava

Si il y avait bien un ennemi du cyclocampeur que je n'avais pas envie de mentionner, c'est bien le voleur. Et bien il est arrivé, lundi après-midi, à Bratislava, alors que j'avais naïvement mal fixé mon U au cadre de mon vélo (alors que je suis habituellement proche de la paranoïa concernant la sécurité).
Une mauvaise âme a saisi l'opportunité trop belle de repartir avec ma monture après cette erreur de concentration fatale de ma part.

Je suis encore sous le choc et j'ai encore du mal à réaliser que c'est fini pour ce vélo. Celui-là même que j'avais préparé avec minutie et passion les mois précédant le départ. Pour le moment, je dois encore encaisser le coup, mais je ne pense pas m'en arrêter là.
Il y a peut-être un espoir car la police slovaque semble très concernée par ce vol, c'est une bonne chose.
J'aimerai continuer le voyage et me racheter un vélo pourquoi pas, peut-être moins bien, et changer d'itinéraire si besoin, car clairement il me fallait ce super vélo pour attaquer la montagne des Balkans, avec mon problème au pied. 

Je suis pour le moment à Vienne, chez mes hôtes warmshower. Je dois dire que pour traverser cette épreuve, les soutiens sont essentiels et je n'en manque pas. Tout d'abord, Birgit et Bernie mes hébergeurs compréhensifs ne me mettent aucune pression et me remontent le moral.
Aussi, tout le soutien que j'ai eu à Bratislava, les employés du restaurant où le vélo a été volé.
Mais surtout de la patronne, Martina, qui n'a pas hésité à prendre un après-midi entier pour me consoler, aller faire un tour dans Bratislava avec moi à la recherche du vélo perdu, aller au poste de police pour faire la traductrice et enfin me ramener à la gare. Un nouvel ange-gardien, sans elle je serai encore à Bratislava à effectuer les démarches.
Et puis que dire, tous les encouragements que je reçois par email, facebook et sms ... Si pour le moment je suis encore abasourdi, cela m'aide à remonter la pente et clairement me redonne de la force pour surmonter ce nouvel obstacle.
Et ma famille, bien sûr. Une amie a même initié une collecte sur le web ... Je suis vraiment touché par cette démarche, de ressentir tous ces encouragements à continuer mon voyage (voici le lien vers cette collecte). 

Un gros coup dur, à surmonter, je vous tiens au courant de la suite. Voici quelques photos du voleur.

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Krems on der Donau J47 km2462 Autriche

Les ennemis du cyclocampeur

Écrit à Krems on der Donau (Autriche) le 17/08/2015 - km 2462

Voilà 1 mois et demi que je suis parti, avec aujourd'hui plus de 2400 km au compteur, et à peine à plus d'une centaine de kilomètres de mon premier grand objectif intermédiaire, Vienne.
Les premières semaines de mon voyage, la Vallée de l'Eure, la Beauce, le Bec de l'Allier, les magnifiques bords de la Loire me reviennent déjà comme de lointains souvenirs heureux … Les suivants se distilleront lentement au fil des kilomètres, pour enfin faire parti de mon livre intérieur. Ils me serviront de fioul à méninges, de lubrifiant pour le cœur. Et l'expérience engrangée, à être plus toujours plus efficace et sage face aux impondérables de la route.
 
Walaha
A ce titre, le cheminement du cyclocampeur n'est pas uniquement amour et volupté, il doit régulièrement faire face à certains fantômes.
Les ennemis du voyageur à vélo se montrent parfois pressants, toujours en filigrane, et il advient à l'aventurier de les tenir éloignés ou d'en faire ses compagnons.

Son premier grand ennemi, qui peut-être aussi son meilleur ami, c'est la météo

Ensuite vient la routine. Si sur des vacances d'une quinzaine de jours elle peut servir de rythme, elle devient dangereuse sur le long cours. Elle endort les sens, rend irritable et prévisible, tue l'improvisation. Cela n'exclue pas avoir quelques petits rites qui peuvent servir de repères, rassurants et réconfortants.
Pour la combattre, quels trucs : ne pas se lever et se coucher à la même heure chaque jour, varier les types de « logements » (camping, bivouac, chez l'habitant, en ville, à la campagne …), improviser des visites, ne pas avoir d'objectif kilométrique journalier régulier, rester ouvert aux propositions inopinées … 

Les pannes mécaniques. A part une crevaison et quelques petits réglages à effectuer, elles m'ont épargnées jusqu'à là. Le truc, avoir les outils adéquats et effectuer un entretien régulier. Il ne s'agit pas de devenir obsédé par le moindre bruit mécanique inhabituel, mais plutôt de ne pas laisser traîner trop longtemps un petit dysfonctionnement. Avoir du bon matériel, ça aide aussi.

Les pannes corporelles. Au même titre que les précédentes, un entretien régulier est recommandé. Étirements journaliers, sommeil réparateur, alimentation saine et équilibrée (je fais ce que je peux sur ce point) sont vivement recommandés.
Je veille particulièrement à la santé de mon pied droit, mon tendon d'Achille (littéralement). A partir du 17eme jour j'ai commencé à avoir des douleurs qui ne me quittent plus depuis mais qui ne m'empêche pas de rouler. C'est le principal. Je gère ça sereinement.
Finalement, ce soucis « technique » chronique, c'est le régulateur de mon voyage, je l'accepte comme tel.

Viennent ensuite la monotonie, l'ennui, le manque de curiosité, l'indifférence …  Pour combattre l'ennui en roulant, j'ai trouvé une parade : écouter de la musique. C'est le reboost assuré.
Je partagerai d'ailleurs avec vous une petite playlist en fin de texte.
En Bavière, j'ai été confronté à ce sentiment. Si les agglomérations avaient en général beaucoup de charme, avec des couleurs chatoyantes et des rues accueillantes, il y manquait peut-être cette diversité d'architecture et de paysages qui donnent une dimension supplémentaire au périple.

J'ai adoré Regensburg (Ratisbonne en français). Ancienne cité romaine, ses habitants la présente comme la ville la plus au Nord de l'Italie. Il y règne une ambiance détendue, une atmosphère de dolce vita, comme en témoigne cette placette dans le centre ou les gens viennent entre amis y tremper leur pied en buvant une bière bien fraîche.
C'était aussi la ville de Jorge, l'un de mes deux warmshowers bavarois. Un chic type, tout comme Felix de Ingolstadt, qui lui partait pour un voyage à vélo de 6 semaines qui le mènera jusqu'au Maroc (dans un mode un peu plus sportif, donc). Il s'est engagé pour la cause des migrants, nombreux dans sa ville, et il espère récolter des fonds. J'ai aussi rencontré Matthieu le polonais (dont j'ai francisé le prénom) qui lui a plus de 116.000 km de pédalage européen à son actif (et un vélo avec des clochettes de vaches indiennes) !
Les autres grandes villes où je me suis arrêté : Linz et Passau : cette dernière est vraiment splendide, juste à la frontière entre l'Allemagne et l'Autriche.
 
Regensburg
Il y a eu aussi cette fête traditionnelle Bavaroise à Straubing, la seconde plus importante de la Bavière. Le principe, une grosse fête foraine à la manière de la fête des Loges (pour les enfants), et de nombreux endroits pour boire de la bière (pour les adultes). Avec des concerts, de la bouffe. L'ambiance est sympa et cordiale, l'endroit estidéal pour se lier avec les locaux, détendus, dans leur fief.
Tous arborent le costume traditionnel bavarois : décolletés plongeants de rigueur pour les filles et virils pantalons à bretelles en cuir pour les garçons, avec une chemise à petits carreaux blanc sur couleur qui se rapproche beaucoup de mon propre style vestimentaire (je suis d'ailleurs presque passé inaperçu).
 
Festival de Straubing
L'Autriche, c'est autre chose niveau paysage. C'est une nature grandiose, des plages de sable fin au bord du Danube, une région viticole qui a su garder son caractère médiéval … Une bouffée d'air frais qui me redonne l'envie de lever le nez.
Je suis enfin très pressé de commencer la seconde partie de mon voyage, après Vienne, celle qui me mènera jusqu'à mon second objectif intermédiaire : Sarajevo. Jusqu'à maintenant, les pays que j'ai traversé, c'était une redécouverte, mais à partir de la Slovénie, tout sera nouveau pour moi, et l'excitation est à son comble !
 
Après Passau, en Autriche

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Neuburg on der Donau J36 km1784 Allemagne

La bonté en voyage

Ecrit le 05-08-15 à Neuburg on der Donau, km 1784

Emprunter un chemin coupant un champ de maïs, humer l'odeur du blé fraîchement coupé, le vent dans le dos, se faisant chatouiller le nez par les premiers rayons du soleil … Cela ressemblerait à ça, le sentiment de plénitude ? A l'inverse pour moi, lors de ces petits moments de grâce, j'ai plutôt la sensation d'avoir l'esprit que se vide, petit à petit, pour me concentrer finalement sur ces agréables stimuli de la nature.
Alors c'est peut-être ça, le secret, il faudrait accepter et expérimenter la vacuité complète avant de pouvoir se remplir à nouveau … 
 

Après le lac de Constance j'ai découvert une des plus jolies régions qui soit, située entre là où termine la forêt noire et là où le Danube prend sa source (autour de Tuttlingen).
Une jolie nature, préservée, peu visitée, car c'est aussi très vallonnée, c'est en effet la partie la plus haute la route vélo 6, qui va de Nantes à la Mer Noire (point culminant à 862m). 
 

862 m !

La traversée a été aussi pour moi l'occasion d'une belle aventure. Je cherchais un bivouac au plein milieu de la foret, dans une partie habitée qui me semblait être un restaurant ou hôtel, cherchant à obtenir l'aval du responsable des lieux pour y planter ma tente sans problème.
Finalement, je tombe sur Stephan, le chef cuisto et boss du resto, qui me déniche un super spot et m'invite à l'apéro et au petit-dej (royaux). Il me présente aussi à une famille de français cyclo-campeurs (2 parents 2 fils 1 fille) faisant la route jusqu'à Bethléem : je voyagerai avec eux les 3 jours suivants. Stephan, notre ange gardien du jour, a été de cette bonté que l'on espère rencontrer en voyage.
 

Stephan

Voyager en famille, donc. C'est de l'organisation, du rangement, des horaires, mais aussi et surtout  de la bonne humeur ! J'ai apprécié partager leur quotidien, leurs habitudes, leur manière de voyager sur ces quelques jours. On s'est mutuellement encouragé dans les montées, attendu après les grosses descentes …
C'est sûr, c'est complètement différent que le voyage en solo. Les enfants étaient adorables, de ceux qui préfèrent le bivouac à la dur plutôt que le camping surpeuplé d'enfants de leur âge. 
 

La famille Berchon
S'en est suivi une période plus sèche au niveau des rencontres, une fois rentré en Bavière. C'est en partie du à mon choix de faire du camping en milieu sauvage. Aussi du à cette barrière de la langue. Elle me ferme de nombreuses portes. Et puis aussi, je ne m'y attendais pas, à l’accueil un peu froid d'une partie des bavarois.
Cependant, il ne faut pas que j'oublie : c'est toujours à moi de faire le premier pas. Ce n'est pas parce que il m'est arrivé un tas de trucs sympas jusqu'à présent qu'il faut que j'arrête de faire des efforts. La teneur de la suite de mon voyage ne sera que le résultat de mon implication quotidienne dans les relations humaines.
J'apprécie toutefois cette période plus solitaire, c'est finalement plus conforme à l'idée initiale que je me faisais de mon périple.

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Radolfzell J28 km1379 Allemagne

Ma vie est un road-movie

Écrit le 28 juillet 2015 à Radolfzell (Allemagne) – km 1379

*** 1er bilan intermédiaire ***

Crevaison : 1
Nb de nuits en bivouac : 6 
Nb de nuits Warmshower : 14
Nb de nuits en camping : 5
Nb de nuits invité chez l'habitant : 2 
Nb de bouquins lus : le premier est en cours (même pas le temps de lire ma pauv' dame)
Nb de piqûres d'insectes : je ne compte même plus
Nb de belles rencontres : je ne compte plus non plus, mais c'est nettement préférable aux piqûres de moustiques.


J'ai toujours affectionné le style du road-movie américain, Thelma et Louise, Paris-Texas, etc ... Il y a dans ces films une expression du désir d'avancer, sans se retourner, vers une aventure certaine et ses rebondissements rocambolesques. L'anti-application totale de l'expression "On sait ce que l'on perd, mais on ne sait pas ce que l'on gagne".

Et bien, ce que je vis, en ce moment, est très proche de ce que l'on peut trouver dans ces histoires filmées de voyageurs sur roues : chaque lever de soleil est pour moi l'occasion de vivre une nouvelle aventure, avec ses incertitudes, son lot de rencontres improbables, de micro-décisions à prendre qui affecteront la suite des événements.

En cela, j'essaye de rester le plus ouvert possible, de suivre mon instinct, pour rester à la disposition de mon voyage. Je maximise mes chances de vivre l'inattendu. Et je mesure maintenant l'importance de mon choix de voyager sans contrainte de temps ni d'objectif kilométrique journalier. Je fonce ou temporise, peu importe, je vis l'instant présent.
 
La Véloroute

Depuis mon dernier article, j'ai considérablement réduit le rythme. Mon corps me le réclamait. J'ai diminué la distance journalière à parcourir, et multiplié les journées de "repos" chez mes hôtes du moment.

L'Est de la France et la frontière suisso-allemande sont nettement plus urbanisés que les bords de la Loire, et il est plus aisé de trouver des « Warmshowers » qui acceptent de m'héberger pour une ou deux nuits. Je partage leurs actualités : à Mulhouse, j'ai participé avec Dominique le cyclactiviste à une "Vélorution" (que j'ai même filmée pour le compte de son association) et connu le groupe Alternatiba, qui promotionne la transition énergétique sur leurs tandems à 4 places.

A Bâle, j'ai pu aller nager dans le Rhin avec mon "sac-poisson", grâce aux explications de Nathalie et Bertrand le jeune maraîcher. Laurent et Katia de Montbéliard m'ont enchanté de leur bonne humeur, et prouvé qu'une famille à vélo, c'est tout à fait possible (et même recommandé).

En Suisse à Eiken, j'ai aussi découvert le monde de la talentueuse artiste-peintre suisso-canadienne Chantelle, une superbe rencontre (lien vers son site web). Enfin, sur les bords du lac de Constance à Radolfzell, j'ai croisé le chemin de la généreuse Sidy, brésilienne expatriée depuis 20 ans en Allemagne. Je fais donc moins de kilomètres mais beaucoup plus de rencontres ! Cependant, j'ai des fourmis dans les jambes, et je pense bientôt reprendre un rythme bien plus soutenu.

Le Danube est proche, la Bavière m'attend. Et tout le reste, aussi.
 
Chantelle de Eiken

Au niveau des paysages, je suis passé par de l'un peu plus urbanisé, entrecoupé de passages nature très appréciables. La vallée du Rhin, sur la frontière franco-suisse, est un exemple concret de bonne planification et répartition entre l'industriel, l'urbain et la protection de la faune et flore locale.

Mais le must, ce sont les petits villages fluviaux restaurés de l'époque médiévale, que c'est bôôôôô. On traverse des ponts de bois, des entrées fortifiées, admire des balcons et statues d'époque. Un charme indéniable :)
 
Lac de Constance

Pour revenir une dernière fois sur mon passage français, cela m'a donc permis de mesurer la beauté et la diversité des paysages, mais aussi de l'importance pour l'échange verbal d'un mode d'expression commun.

Je le mesure depuis mon passage en Suisse, la barrière de la langue ne me permet pas de comprendre ce que me disent spontanément les gens dans la rue. Parfois, même, je ne comprends pas d'emblée si c'est plutôt négatif ou positif. L'allemand redéfinit les nuances de la langue, je vais devoir m'y adapter.
Et désoxyder mon poussiéreux anglais avec cette bonne vieille "french touch" nouvellement saupoudré de globish indien passe-partout.

Il y a toutefois quelques menues situations tendues, en raison de l'amour de certains suisses pour les règles implicites : c'est la première fois pendant mon voyage que mon vélo a semblé déranger quelques uns, qui ne sont pas privées de me le faire savoir, avec (ou sans) sourire. J'imagine que cela sera de plus en plus le cas, car je vais emprunter sur les bords du Danube une partie de la véloroute très fréquentée par les cyclotouristes en été. Et qui dit tourisme abondant dit local pas forcément baisant.

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L'Isle sur le Doubs J16 km967 Doubs

Le cyclocampeur

- Le 16 juillet au camping de L'Isle sur Doubs, au kilomètre 967 -

Je profite de mon premier jour de repos, aujourd'hui 16 juillet, pour éviter la première journée de cette nouvelle vague de canicule, et pour récupérer un peu de la fatigue accumulée des presque 1000 kilomètres avalés en un peu plus de deux semaines. 

J'ai vu des paysages spectaculaires (le Bec d'Allier, la Bourgogne et tout dernièrement le Doubs, aux portes de la Suisse), rencontré mon lot de personnes formidables. J'ai aussi découvert des villes charmantes, qui m'ont donné l'envie d'y retourner un jour comme Dôle ou Besançon, pour des raisons différentes.
La « véloroute » est relativement plate. L'itinéraire suit principalement les canaux des fleuves et rivières (de Nantes à la Mer Noire), sur un faux plat presque indétectable, mais donne aussi au cycliste quelques belles montées bien corsées (itinéraire bis) : c'est l'occasion de connaître l'arrière-pays, de briser la monotonie du canal, de scruter les plus belles vues et de traverser les villages.
Le plus intéressant, donc, mais aussi le plus épuisant.

La campagne bourguignonne
L'exaltation initiale se mue en rêverie.
Le cyclocampeur est un observateur éclair de la vie. Mes actualités d'hier, celles d'avant mon voyage, sont remplacées peu à peu par mes préoccupations du jour : où vais-je dormir ? Que vais-je manger ? Quel sera le lieu idoine pour s'arrêter ? Les pensées sont vagabondes, la concentration constante.
Je suis rêveur et déterminé.

Basilique de Paray le Monial
Je pense aussi ralentir mon rythme. Qui veut aller loin ménage sa monture. Et puis, au sortir de mon pays, je souhaite m'imprégner de celui que je traverse.
Pour cela, pas de secret, il faut temporiser. Ce n'est pas que j'ai spécialement envie de quitter la France, mais je crois que partir dans les starting blocks a été ma façon d'évacuer l'excitation du départ. Donc l'avenir passera par moins de kilomètres journaliers (de 70-80 à 50-60 par exemple) ou alors plus de journées de repos.

La charolaise
Je dois toutefois avouer que cette traversée de la France est une grande découverte. Tous les 100-150 bornes, l'architecture et les paysages changent. On peut aussi dégager des traits dominants du caractère des gens par région. Avec tout le biais qu'implique l'observation à vélo.
La France est un pays riche de son patrimoine, de sa culture, par sûr que je trouve autant de diversité ailleurs. C'est une parfaite mise en bouche pour la suite, et un excellent entraînement au pédalage sans perte de repères. Pour le dépaysement, j'attends avec impatience la traversée des Balkans.
Autant que je la redoute : les montagnes qui se dresseront sur mon passage, c'est un sacré challenge. Insurmontable ? Je ferai en fonction de mon état de forme du moment … Let's see !

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Beffes J7 km395 Cher

La dette grecque

Jour 7 à Beffes (18) – km 395 (en réalité je suis arrivé à Bourbon-Lancy et au jour 10 -un peu plus de 500 km - mais il y aura toujours un petit décalage entre le moment ou j'écris l'article et le publie, le temps de trouver une bonne connexion wifi)

La dette grecque : c'est le premier sujet qui vient à la bouche de mes interlocuteurs de passage lorsque j'évoque la destination finale de mon voyage. Alors, forcément, ça politise un peu le parcours, et je pense me faire une idée bien précise sur la question d'ici Athènes ...
Quelque part, cela donne un fil conducteur à mon voyage, et je peux remercier indirectement Goldman & Sachs et JP Morgan de m'avoir donné ce sujet de conversation brise-glace. 
 
Le prologue de ce road trip tient toutes ses promesses, et s'avère même bien plus passionnant et intense que je ne l'avais imaginé depuis mon antre normande.  Il ne m'arrive que de belles choses : chaque jour je fais des rencontres improbables, je déniche des endroits idylliques pour établir mes bivouacs, mes hôtes Warmshower (sorte de couchsurfing pour les cyclistes) sont des gens charmants et enrichissants.
Bref, que du bon, mis à part la chaleur infernale qui m'oblige à modérer mes ardeurs. Je suis exalté, chaque micro-évenement me donne l'occasion de m'extasier. C'est peut-être un état de grâce propre au voyageur solitaire. 
 
La Beauce
Les paysages sont variés, la Vallée de l'Eure fut une bonne mise en bouche, la traversée des interminables plaines de la Beauce sous le cagnard une épreuve. Me retrouver au bord de la Loire, c'est le début de l'aventure. Ce fleuve sauvage est bordé de petites villes médiévales (Gien, La Chapelle-Montlinard), d'îles repères à oiseaux, de villages pittoresques (Ousseau ...) et de gens qui prennent le temps, au rythme de l'eau.
 
Gien
Les moments-forts (non exhaustif) :
- Mon premier arrêt au troquet « l-dos-à-dos » de Fermaincourt, cela a donné le ton du voyage
- Mon premier bivouac au petit Chérisy, au bord de l'Eure, suivi de l'invitation de Jean-Luc artistre-peintre
- La visite de Gien en pleine fête médiévale
- Mon second bivouac au bord de la Loire, éclairé par Nicolas le Berger
- Mon dernier bivouac sur les coteaux du vignole de Sancerre (la classe)
- Avoir participer à une ouverture sur l'écluse de Pezeau (merci Rodolphe l'éclusier)
- Mes deux nuits chez mes warmshowers : Lena, grande aventurière qui m'inspirera pour le reste de mon voyage puis Muriel et Greg, cyclocampeurs en famille enthousiastes et communicatifs.
- Me faire pote avec Alfred le corbeau à la ferme des Barreaux

Je n'ai rien préparé de concret niveau itinéraire, et c'est justement ce qui me permet de vivre des moments pareils, sans arrière-pensée, sans être pressé.
Et je peux peut-être prétendre à la fin, atteindre ce que je recherchais, en entreprenant ce voyage : expérimenter la pure liberté.

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J -7

Et ça repart !

Et c'est maintenant que je reprends le voyage où je l'avais laissé en juin dernier. Pas d'un point de vue géographique, car je ne repars pas depuis l'Inde, mais plutôt moralement. Je m'étais donné une année pour me reconstruire une nouvelle manière de barouder : le contrat sera rempli mercredi prochain, le 1er juillet, lorsque j’enfourcherai ma monture à deux roues non motorisée, pour un périple qui me mènera jusqu'à la Grèce.
Je table sur 4 ou 5 mois. Je m’apprête à affronter les grandes chaleurs de juillet et août en longeant la Loire, à recherche du Danube jusqu'à Vienne. Et puis aux portes de l'automne, je traverserai les Balkans et m'en irai jusqu'en Grèce, si toutefois elle n'a pas explosé en cours de route devant les exigences de Bruxelles (je ne me mouille pas en affirmant toutefois qu'Athènes ne bougera pas sauf en cas d'éléphantesque tremblement de terre).

Voici l'ébauche de mon itinéraire :


Vous connaissez les routes Eurovélo (EV) ? C'est un réseau de pistes cyclables trans-européennes. J'avais emprunté une partie de la numéro 3 lors de ma précédente vadrouille vers Amsterdam, jusqu'à Namur.
Pour cette nouvelle étape, je vais continuer à utiliser ce réseau bien pratique : c'est plutôt rassurant pour un premier voyage au long cours à vélo d'avoir un parcours plus ou moins balisé, du moins au début. 

Depuis Orléans, ce sera donc l'EV6 jusqu'à Vienne. En passant par Bâle, puis la Bavière. De Vienne à Ljubljana, je sillonnerai  l'EV9. Enfin, à partir de Dubroznik et jusqu'à à Athènes, je longerai la côte adriatique par l'EV8. Finalement, il n'y a que la partie entre Ljubljana et Dubrovnik qui sera en freestyle. Avec comme objectif intermédiaire la capitale bosniaque que j'ai très envie de visiter, Sarajevo. Je pense que c'est bon mélange entre ville, montagne, mer et campagne.
En élaborant cet itinéraire, j'avais en tête la diversité des paysages.

Euroveloroute, c'est surtout un projet en cours de réalisation. Si certaines portions de parcours sont bien balisées, d'autres ne le sont pas du tout. Les pistes cyclables ne représentent pas la totalité du réseau - loin de là - , mais même si l'on doit partager le macadam avec des véhicules à moteur, cela devrait se faire sur de petits axes peu fréquentés (en tous cas je l'espère) …
L'état d'avancement du projet est assez disparate selon les pays et les moyens mis en œuvre. Mais le fil conducteur est un heureux vestige de ce que l'Europe aurait du être avant de devenir ce piètre levier économique et rouleau-compresseur politique : un espace où l'on circule librement, un projet philanthrope fruit d'une coopération entre différents états dans le but de rapprocher ses habitants et leur culture, de rendre les frontières intangibles.
Un peu à l'instar du programme Erasmus, qui a rapproché les européens bien plus que n'importe quel accord de libre-marché. Il faut souligner les belles initiatives du vieux continent, et c'est dans cet esprit que j'ai décidé d'aller visiter les cousins continentaux.

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