Seoul J120 Corée du Sud

La (non)dynamique du cyclocampeur

Publié le 21 Jul 2016
Catégorie Corée du Sud
Ecrit à Oulan-Bator le 19 juillet 2016

Me voilà à Oulan Bator depuis le 14 juillet, où je suis arrivé en pleine semaine de congés annuels. Ce qui m'a valu la surprise de constater la fermeture des consulats et service d'immigration jusqu'au 18 juillet. C'est donc avec ce petit contre-temps que je peux commencer mon marathon administratif, pour obtenir tout d'abord une prolongation de mon visa mongol jusqu'à la mi-septembre (c'est aujourd'hui fait), et l'obtention du St Graal : le visa chinois. Si tout se passe bien, je pourrais reprendre la route d'ici mardi prochain, le 25 juillet. J'essaye donc de profiter des joies de la capitale mongole, assez sympathique au demeurant quoiqu'un peu chaotique, et de l'ambiance « yourte urbaine » de mon auberge. Je m'y attarderai dans mon prochain article. Pour le moment, je voulais surtout revenir sur la seconde partie de mon expérience coréenne. 
 
C'est que j'y ai pris une vraie leçon d'hospitalité. Je n'avais jamais rien vu de tel auparavant. Que cela soit de la part de mon amie de 12 ans Joy, chez qui j'ai créché une bonne dizaine de jours à Chuncheon, ou mon merveilleux hôte warmshower Jin, qui m'a guidé et choyé pendant une bonne semaine à Seoul, ou bien encore Jeongmi et les autres rencontres de la route, chacun a voulu me montrer le meilleur de sa culture, de sa ville, le tout avec une dévotion et un enthousiasme sans borne. Cela s'est principalement traduit par de nombreux et copieux gueuletons, pour achever de me convaincre de l'excellence de la cuisine locale. Je me suis bien remplumé au passage.
 
Après 3 heureux mois de pédalage au Japon et en Corée, j'avais ressenti l'envie de me poser quelques temps. Comme un besoin d'immobilisme mais aussi et surtout une impérieuse nécessité d'établir un quartier général pour organiser la suite de mon voyage. Après avoir pris la décision de voler en Mongolie, il m'a fallu penser et repenser une bonne partie de ma logistique : changer certaines pièces de vélo (pour usure ou pour m'adapter aux chemins plus cabossés), parer à toutes les éventualités et imprévus que peut représenter le transport d'un vélo par avion, la préparation en amont de papelards pour les visas, ou encore « upgrader » mon équipement dans le but de gagner en autonomie … Cela a été un stress constant, dans un pays dans lequel je ne parle pas la langue et ne connaît pas les codes, les endroits où me ravitailler … Joy et Jin m'ont été d'une aide précieuse, sans eux je serai parti en Mongolie complètement à l'arrache. Alors à mes anges-gardiens du mois : merci infiniment ! Et j'espère sincèrement ne plus à avoir à trimballer mon vélo en avion de nouveau avant mon retour.
 

Cela a donc été une période un peu tendue, un peu bizarre, où je n'ai pas été complètement serein. Cependant, j'ai aussi passé de supers moments. Seoul est une ville bouillonnante, dans laquelle je me suis senti très à l'aise. Même si rien n'y est prévu pour le vélo, il y règne une atmosphère de symbiose entre le moderne et le traditionnel. On y trouve des monuments emblématiques, des restos extra, des endroits branchés pour sortir le soir (Hongdae), des petits quartiers tranquilles loin de la cohue du centre Seoul, des parcs verdoyants et surplombant la ville, des marchés animés et des musées bien fournis. J'ai aussi beaucoup apprécié Chuncheon, ville de taille moyenne lotie entre de verdoyantes montagnes. A seulement 1h30 de transport ferroviaire de Seoul, on y trouve la paix et la nature (ce qui lui vaut d'être assez prisée des touristes locaux). 

 

En fait, je crois que le fait de ne plus avancer chaque jour à vélo m'a retiré une bonne partie de la dynamique de mon voyage. J'écoutais l'autre jour le podcast d'une émission radiophonique française (Le temps d'un bivouac sur France Inter) sur le thème du transsibérien, ce mythique train russe qui relie Moscou à Vladivostok en une semaine. Géraldine Dunbar, l'invité baroudeuse y expliquait qu'après avoir pris le lancinant rythme du train dans la peau, lorsque celui-ci s'arrête, une forme d'angoisse se manifeste … Bref, on a qu'une seule envie, c'est qu'il reparte le plus tôt possible. Cette analyse est tout à fait transposable pour le voyage à vélo ! Il me tarde donc de remonter dans le wagon de la vadrouille et de sentir à nouveau le vent et le soleil me chatouiller les oreilles. De voir les paysages défiler lentement devant mes yeux, de m'exposer aux rencontres, de me sentir sortir de ma zone de confort. Chers usagers-lecteurs, prenez garde à la fermeture automatiques des portes !

 

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Gapyeong J100 Corée du Sud

Le jeu des différences

Ecrit le 23 juin 2016 à Gapyeong (Corée du Sud) – km 4200 (je fête mes 10.000 Kms effectués depuis le départ en Normandie !)

Un jour un grand sage (mon hôte warmshower Stephane de Tokyo) m'avait raconté : commencer mon tour d'Asie par le Japon pouvait comporter un risque, celui de rendre fade le reste de mon voyage. C'est un peu vrai, au Japon j'avais l'impression de rouler au paradis des cyclistes. Je redescends sur terre en Corée du Sud, et du coup je ne peux pas m'empêcher de me prendre au petit jeu des comparaisons entre voisins. En voici quelques une, en vrac ...
 
Niveau cuisine, c'est parfois super épicé ! Les feux rouges et passages piétons sont de nouveau considérés comme des options. Les vitres des voitures sont très souvent teintées en noir, c'est aussi le retour des sempiternels chauffards. La musique dance de mauvaise qualité - à fond les ballons - remplace la douce musique d’ascenseur dans les supermarchés. C'est moins cher, généralement. Les convenient stores (combinis) ne sont plus aussi « convenient ». Il y en a aussi beaucoup moins, le ravitaillement en nourriture se complique un petit peu. Niveau wc, je perds le délicieux jet nettoyant du popotin japonais, mais je gagne une apaisante musique classique d'ambiance. Du coup, je peux me soulager pépère en écoutant du Schubert, déféquer pénard en écoutant du Mozart. 
 
Les coréens sont fondus de vélo. J'emprunte en ce moment une longue piste cyclable de 600-700 bornes qui relie Busan dans le sud à la capitale Séoul dans le nord. Je me frotte à une faune de pédaleurs assez hétéroclite : sportifs de haut-niveau, cyclistes du dimanche, randonneurs occasionnels, vieillards qui ont fait de la petite reine leur moyen de déplacement principal … Cela me fait un point commun avec tous ces gens et m'attire bien souvent leur sympathie. Je note aussi l'usage répandu du vélo-radio. Ils adorent rouler en musique. Je peux donc monter sans vergogne le son de ma petite enceinte portative achetée à Hiroshima. Et rejoins ainsi mélodieusement la grande famille des usagers à deux roues coréens. 
 
Cette voie verte comporte ses avantages et inconvénients. Les mêmes que ceux de l'Eurovélo 6, à vrai dire. Difficile de se motiver pour en sortir et j'imagine que je passe à côté de pas mal de choses. Les infrastructures sont excellentes et les endroits à bivouac nombreux (mention spéciale à ces petites maisons en bois destinées au pic-nic, elle me feront un excellent abri lorsque la saison des pluies commencera). Sortir de ce sentier balisé signifie affronter un trafic parfois dense et se frotter à de gros dénivelés. Ceci dit, même au bord de la rivière, on doit souvent se coltiner des grimpettes à plus de 10 % (voire 15 ou 20 …). Parait-il, c'est la manière « Korean Style » d'appréhender les pentes, et on peut aisément effectuer une analogie avec le développement économique rapide du pays sur ces dernières années … Tout droit, plus vite !
 
Le style coréen, c'est aussi de la gentillesse débordante. Je récolte moins de sourires qu'au Japon, mais plus de petits cadeaux. J'ai même pensé à rebaptiser mon blog avec le titre « Forever Caravane du Tour de France ». Les petits vieux adorent me parler, en coréen, bien sûr, et même si je ne pige rien cela semble faire l'affaire. Car ici rien que les patronymes sont déjà imprononçables, alors une phrase complète … Cependant, c'est toujours avec un grand plaisir que j'apprends ces nouveaux mots-clefs et ces nouvelles habitudes alimentaires. C'est inhérent à la découverte d'une contrée.
 

Le mercure commence à grimper nettement avec des températures dépassant maintenant les 30°C dans l'après-midi. Grosses chaleurs qui n'empêchent cependant pas la coquetterie : j'applique avec un soin quotidien mes crèmes de jour de nuit : protection solaire indice 50 le matin et spray anti-moustique le soir. En définitive, la Corée du Sud m'offre un bref aperçu des menus difficultés qui se présenteront sur ma route asiatique. Sans pour autant perdre de vue mes objectifs principaux : expérimenter la liberté, rencontrer de belles personnes et profiter sereinement de ce que la route a à m'offrir. 

 

Après une traversée en solo depuis Busan jusqu'à Chungju, j'ai goûté à nouveau pendant quelques jours au plaisir du voyage en groupe. Avec mes acolytes Anais et Gilles que j'avais déjà rencontré au Japon sur le Shimanami Kaido (nous avons même pu supporter ensemble nos équipes respectives pour le dernier match de poule de l'Eurocup : France-Suisse) et une neophyte dans le monde du cyclotourisme, Carolina. Avant cela, je n'ai jamais eu le loisir de me sentir seul … Je remercie les Jung, Jay, Dong, Seungha, James et Katie, et les autres sympathiques personnes rencontrées sur le chemin qui m'ont permis de découvrir de la meilleure des manières la chaleur de l'hospitalité coréenne : le plus souvent autour d'un copieux et succulent repas. 
 

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