Bangkok J435 Thaïlande

La péninsule thaïlandaise

Ecrit le 25 mai 2017 à Bangkok – km 12900 (18900 depuis le départ)

Difficile de réellement savoir d'où me vient cette passion pour le voyage, mais il y a quelques influences qui doivent probablement ressurgir de mon enfance. Je me souviens avoir été époustouflé par les vieux James Bond, qui commençaient le plus souvent par un plan travelling d'un endroit extraordinaire, comme la baie de Rio. Ces premières émotions de baroudeur m'ont peut-être encouragé inconsciemment à aller vérifier moi-même la beauté du monde. Je me devais donc d'aller traîner mes roues dans le sud de la Thaïlande et sa précieuse mer d'Andaman, lieu de tournage du légendaire volet « L'homme au pistolet d'or ». 

 

Bien que je ne me suis pas exactement rendu sur l'île maléfique du film, je n'ai pour dire pas été déçu du détour, et peux vous assurer maintenant que c'est encore plus beau en vrai que sur le grand écran. Des plages de rêve, des bouts de rocher suspendus entre ciel et mer, du sable aussi blanc et fin que du coton, les ennemis du célèbre agent 007 ne plantaient pas leur forteresse diabolique sur n'importe quel lopin de terre. Les îles paradisiaques ne sont pas en reste. Ce qui m'amène à passer du cinéma à la petite lucarne et l'émission cultissime des aventuriers en herbe: Koh Lanta. Marcher sur les traces de feu Roger Moore et de Moundir, ce n'est tout de même pas rien (pour moi en tous cas). 

 

Je quitte la rude sécheresse du nord pour retrouver la verdure, de plus en plus fournie au fur et à mesure que je m'avance vers le sud. Bonjour exploitations d'hévéas, plantations de palmiers, champs de cocotiers, forêts primaires (ou plutôt ce qu'il en reste), dunes et mangroves. Ce vert n'est pas isolé car le bleu des éléments eau et air l'accompagne. Quel panache de couleurs ! Les couchers de soleil étoffent la palette de toutes les nuances du spectre, offrant le soir à mes yeux ébahis un tableau chaque jour inédit. Dans une explosion de formes et de tonalités. La nuit tombée, les orages et éclairs qui passent au loin se savourent comme des feux d'artifice. L'horizon offre un spectacle permanent. Et parfois, on peut même savourer dans l'obscurité de la forêt un gracieux ballet de lucioles, celles-ci s'improvisant alors égayeuses de bivouac. Des moments magiques. 

 

Un spectacle que je partage avec ma nouvelle compagnonne de route. Eh, mon hôte de Chiang Mai, s'est décidée à tenter l'expérience du cyclotourisme. Nous avons passé plus d'un mois ensemble à traverser la péninsule thaïlandaise du nord vers le sud, affrontant en duo l'épreuve physique que représentait l'extrême chaleur du mois d'avril. Les conditions météorologiques sont extrêmes, à la chaleur étouffante s'est rajoutée une moiteur persistante et accablante, et il n'est pas rare de se taper un fort vent de face plusieurs jours de suite (qui paradoxalement devient béni pour faire sécher nos fringues trempées de sueur en fin de journée). 

 

Fort heureusement, son beau pays regorge de ressources pour combattre la canicule. Notre plus grand ami, celui qui nous a souvent sauvé la vie et rafraîchi le cerveau, j'ai dénommé le dieu Smoothie. A la noix de coco, à la mangue, au thé vert ou encore à la fraise, ce cocktail de fruit et de glace passés au mixeur nous permet de faire baisser la température corporelle de quelques degrés dans les moments les plus brûlants de la journée. Cet arrêt au stand divin nous permet le plus souvent de recharger nos gourdes en glaçons, afin d'affronter le bouillant tarmac avec un peu plus de sérénité.

 

L'autre difficulté de rouler dans de telles conditions, c'est la fatigue mentale. Voyager à deux permet justement le soutien mutuel et le partage des souffrances. C'est sûr, il faut faire plus de concessions, essayer de minimiser l'impact de sa mauvaise humeur, mais dans la plupart des situations, rouler groupé, c'est un sacré atout dans le combat quotidien. 

 

Eh m'a aussi entrouvert les portes de la culture thaïlandaise, un univers empreint de spiritualité et de croyances, peuplé des esprits bienfaisants d'illustres ancêtres. C'est sûr que je n'aurais pas eu le même regard sur ce petit monde si j'avais traversé seul cette partie du pays. Nous avons aussi consciencieusement tenté de découvrir chacune des spécialités culinaires régionales (et seul le Dieu Smoothie sait réellement combien il y en a). Un sacrifice de l'estomac toutefois assez agréable à (di)gérer. Avec pour mon plus grand plaisir (ou pour ma plus grande perte), l'omniprésence dans l'assiette de la noix de coco, ma saveur préférée !

 

Bien que maintenant accompagné, les autochtones se montrent toujours aussi curieux à mon égard. Et bien souvent revient cette question : « where are you go ? ». Je l'interprétais au début comme un« Where are you from », mais j'étais dans l'erreur. Ce qui intéresse les thaïs, ce n'est pas d'où je viens, mais où je vais ! … Where are you going ?! … C'est assez atypique comme phrase d'accroche, et dénote le côté indubitablement positif des thaïlandais. Se tourner vers l'avenir plutôt que de s'intéresser au passé.

 

Au début du mois d'avril, j'ai pris le train depuis Chiang Mai jusqu'à Bangkok, où je suis resté 4 jours à découvrir les quartiers les plus touristiques : Kao San Road, le Palais Royal, China Town ou encore le marché de Chatuchak … Bangkok vibre en permanence dans une moiteur omniprésente. C'était un moment un peu spécial de me retrouver là-bas, la capitale thaï ayant été longtemps l'objectif final de mon périple. J'y ai fait une rencontre sympa : Benoît et Alice, que je connaissais indirectement par le biais d'autres cyclocampeurs.

 

Eh m'a ensuite rejoint sur place, puis nous avons pris de nouveau le train pour nous épargner la sortie de Bangkok et commencer le trip en terre non hostile. La station balnéaire de Hua Hin a été notre point de départ sur la côte Est de la péninsule, que nous avons suivie jusqu'à Surathani. Cette portion de périple a été paisible et agréable, avec de magnifiques bivouacs sur la plage et une petite route qui longe le littoral la plupart du temps. Le tout saupoudré de quelques parcs nationaux, ce fut une belle découverte. 

 

Ce fut aussi à ce moment que se célébrait le nouvel an thaï (le Song Khram) : la tradition, c'est de s'asperger allégrement d'eau par tous les moyens possibles : seaux, robinets, jets, pistolets, depuis la route ou depuis les pick-up, tout ce joli monde se retrouve rapidement trempé de la tête aux pieds pendant les jours les plus chauds de l'année. Je pensais que nous allions être des victimes de choix, mais en fait, j'ai été surpris par la politesse et bienveillance des enfants, qui ne nous arrosaient qu'après avoir obtenu notre accord. Nous avons juste eu le malheur de traverser la ville de Bankrut en pleine effervescence, et nous nous sommes pris logiquement une belle misère dans une atmosphère éthylique un peu stressante à expérimenter à vélo.

 

Après Surathani, nous avons quitté le bord de mer avec l'objectif de rejoindre la côte Ouest de la péninsule. Ces 3 jours furent très durs physiquement, nous avons du entre autre emprunter de longs tronçons de grosse route. La transpiration persistante commençait à attaquer notre peau et notre moral. Nous avons toutefois traversé des paysages féeriques avant de rejoindre la baie de Krabi. Entre montagnes karstiques et jungle luxuriante.

 

Notre premier contact avec la côte Ouest a été des plus mitigé. Bien sûr, difficile de rester de marbre devant ce panorama de rêve, mais tout aussi compliqué de l'apprécier dans cet environnement entièrement dédié au tourisme de masse. Ban Ao Nan, c'était Disneyland sans le Space Mountain. Nous fumes ravis de déguerpir vers la ville de Krabi (où j'ai effectué mon extension de visa en 5 minutes chrono) puis encore plus au large, vers Koh Lanta, où l'on commença de nouveau à humer le parfum de l'aventure. 

 

Koh Lanta, comme je le mentionnais plus haut dans l'article, c'est une terre de légende pour pas mal de français. En réalité, on n'a pas vraiment l'impression de se retrouver sur une île. L'accès à la plage est notamment assez compliqué, si on ne veut pas casser sa tirelire pour se loger. A mon humble avis, l'endroit a du devenir trop commercial. Cela reste tout de même une place privilégiée pour zieuter de superbes couchers de soleil et un bon point de départ pour les tours vers les îles avoisinantes. Nous avons craqué pour l'un d'entre eux et passé la journée à faire du snorkeling et bavouiller sur des plages à l'eau cristalline (que peut-être même Moundir a foulé … Quelle émotion !).

 

Notre île, celle qui nous a donné l'impression de fuir la civilisation, ce fut Koh Muk. Nous avons débarqué sur cette île pour nous laisser happer quelques jours par la douceur de vivre et l’absence de choix d'activité. Et effectivement, pas vraiment grand chose d'autre à faire que de profiter de la mer et de parler aux pêcheurs du coin. Nous avons ensuite beaucoup apprécié Trang et ses alentours. Entre bivouacs balnéaires et révélations culinaires, nous avons adoré l'authenticité de la région. 

 

Pour finir en beauté avant de revenir sur Bangkok (en train), retour sur la côte Est et la capitale culturelle du sud : Songkhla et sa ville jumelle Hat Yai. Le moment fort aura été sans conteste ces quelques jours autour du petit bourg de Patthalung et son lac colonisé par des milliers (millions?) de fleurs de lotus rose, des oiseaux migrateurs et des buffles d'eau.  

 

Tout au long de cette aventure, lorsque le bivouac n'était pas possible et que la prochaine guesthouse était trop éloignée, nous avons régulièrement été amenés à demander l'hospitalité dans les temples bouddhistes. Nous avons toujours été accueillis les bras ouverts, et je voudrais remercier du fond du cœur chacun des moines qui n'ont pas hésité à ouvrir leur porte à ces 2 cyclocampeurs dégoulinant de sueur et marqués de fatigue. Nous avons même eu parfois l'impression que nous étions déjà attendus !

 

Mais voilà, il était pour moi venu le temps de changer d'air. Avec cette humidité constante, toutes mes affaires commençaient à pourrir, moi inclus. Et cela n'allait pas s'arranger avec la mousson. J'avais plusieurs possibilités de poursuite d'itinéraire dans les cordes, parmi lesquelles continuer à rouler encore plus au sud en Asie, un possible retour en Europe et une nouvelle aventure en Amérique Sud. La décision n'a pas été facile à prendre bien que j'y pense depuis la Chine. Cependant, il a bien fallu que je tranche. C'est donc … la suite au prochain article !

 

PS : vous remarquerez peut-être lors du visionnage des images, les habituelles photos de canidés ont été remplacées volontairement par des clichés de gentils chats mignons qui ne chassent pas les cyclistes. J'ai décidé de boycotter les chiens jusqu'à nouvel ordre. Ils devront cravacher dur pour se racheter de leur intolérable comportement sur les 2-3 derniers mois. La goutte d'eau, c'est d'avoir retrouvé un beau matin ma belle chemise bleue Columbia par terre, roulée dans la poussière et en partie dévorée par un de ses maudits clebs. Peut-être même que si un jour je retourne au Vietnam, j'irai faire un détour au resto ...

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Chiang Mai J384 Thailande

Le paradis du cyclocampeur ?

Ecrit à Chiang Mai, le 4 avril 2017 – km 11340 (au total 17340 km depuis la France)

C'est avec curiosité et envie que je m'engageais sur les routes du pays qui à la base devait être l'étape finale de ce voyage. Jusqu'à présent, chaque contrée sur ce continent m'a proposé des plaisirs différents et des challenges renouvelés, et je dois avouer que je ne m'imaginais pas en mettant les roues au Japon il y a un an de ça découvrir autant de richesses et de différences entre chacun des pays asiatiques. La Thaïlande va même un cran plus loin dans les sensations de liberté et de bien-être. 

 

Le réseau routier y est pour beaucoup. Du bel asphalte pour de nombreuses petites routes de campagne, à l'instar des voies communales françaises. Il me donne la capacité d'improviser, de flâner au jour le jour sans pour autant me retrouver dans des bourbiers sans nom. Avec souvent au détour d'une de ces chaussées bucoliques, l'apparition soudaine et lointaine, voire mystique d'un pharamineux bouddha en or ou d'un stupa non moins colossal. Cela pose le décor.

 

A cela, j'ajoute la sympathie sans fin des locaux. Mais quand ce dégoulinement de bienveillance et d'amabilité va-t-il s'arrêter ? Même si je retrouve ici un relatif anonymat, ils ne sont jamais avares d'un sourire bien placé ou d'une petite conversation au coin d'une rue. Ils s'assurent aussi régulièrement que je pédale dans la bonne direction ou que je ne manque de rien. D'ailleurs, le voyage pourrait aussi bien se résumer à ça : la récolte aux sourires. Au plaisir simple de saluer et se faire saluer en retour. C'est hautement addictif et toujours amusant de constater dans les yeux des badauds l'incrédulité ou l'enthousiasme. Les Thaïlandais, les gens les plus sympas du monde !

 

Il y a aussi le retour à une cuisine variée et délicieuse. Brochettes, pad thai, kaosai, riz sauté, fruits exotiques au goût extraordinaire ... les nombreuses spécialités locales me comblent papilles et estomac. En fait, je passe mon temps à bouffer. Réchaud et popote se retrouvent progressivement bien cachées tout au fond de mes sacoches, l'accès à cette manne nourricière étant facile et peu chère via les multiples et achalandés marchés de jour et de nuit. Il est tout aussi aisé de se ravitailler en liquide : avec ces petites bornes distributrices d'eau potable, je remplis mes gourdes pour seulement quelques baths !

 

Cela fait de moi de nouveau un cyclo-campeur totalement disposé à recevoir ces petits moments de bonheur intense qui arrivent furtivement, sans prévenir, et qui décuplent l'énergie de continuer. J'irai même jusqu'à affirmer : le voyage pourrait aussi bien se justifier uniquement par la recherche de ces moments fugaces, où les astres semblent converger vers la procuration de cette félicité tant convoitée. J'apprécie aussi beaucoup ce temps en solitaire. Cette solitude que je recherche et qui me permet la méditation en mouvement et une reprise en main de mon destin nomade. 

 

Serais-je arrivé au paradis des cyclo-campeurs ? Peut-être, oui, par intermittence. Car je redescends bien vite sur terre, lorsque je me retrouve à pousser mon vélo sur une pente à 15-20 % dans un petit fumet de champ brûlé le tout sous un cagnard dépassant allégrement les 40°C. Ces instants-là me donnent plutôt un avant-goût de ce que pourrait être l'enfer.

 

J'arrive en Thaïlande pile poil pour le début de l'été et ses températures caniculaires. Le nord du pays qui aurait du être si vert et luxuriant me propose maintenant des paysages arides et un sol dur comme de la pierre. L'horizon est en permanence feutré par les émanations de fumée issues de la culture sur brûlis et les incendies volontaires de forêts (sans pour autant gêner la respiration et l'expérience cycliste). Je retrouve toutefois ce vert chatoyant subsistant sur les rizières encore irriguées, et la nuit le mercure tombe juste assez pour me permettre de respirer et de me régénérer pour le jour suivant. Le répit dure jusqu'à environ 10h du mat, après ça cogne sévère. 

 

J'imagine aussi qu'il doit y avoir un problème dans la formation des ingénieurs de la DDE locale. Ou qu'ils ont suivi leur cursus en Corée du Sud. Depuis ce pays justement je n'ai jamais vu de gradients de côte aussi démesurés ! Il n'y a aucune notion de progression dans les montées, quand on pense avoir fait le plus dur, et bien souvent ils en rajoutent une nouvelle couche. Il vaut mieux regarder ses cartes à deux fois avant de s'engager sur une petite route de montagne. Pour le salut de l'âme et des mollets. 

 

Pour une raison inconnue cette fois-ci, c'est le retour des chiens agressifs. Sans toutefois atteindre le niveau de paranoïa provoqué par les attaques canines grecques, je dois de nouveau faire gaffe à ces poursuites inopportunes de clébards énervés. Une combinaison de chiens stupides et de portails ouverts. Bizarrement, ils se la ramenaient moins dans les pays où ils passaient à la casserole. 

 

Après la frontière avec le Laos, j'ai tout d'abord rejoint Chiang Rai et son magnifique temple blanc. Pour ensuite continuer sur les petites routes pour relier le lac de Phayaho. J'ai ensuite essuyé mes premiers reliefs en me rendant à Nan puis Nanoi, où je fus accueilli les bras ouvert par Nan, sa famille et ses amis. J'ai ensuite découvert Phrae et l'architecture de ses maisons traditionnelles en bois de teck. Pour enfin prendre la direction de Chiang Mai en passant par la paisible et pittoresque Lampang. J'ai choisi cette route pour son éloignement de l'itinéraire touristique habituel et privilégier les rencontres. Un choix que j'estime plus que payant et qui m'aura apporté beaucoup de plaisir et de tranquillité. Il y a eu notamment de beaux et nombreux bivouacs. J'ai même eu le privilège de me faire héberger dans un petit temple où j'ai dormi sous l’œil bienveillant du bouddha.

 

Je suis actuellement à Chiang Mai, seconde ville du pays et capitale du nord, qui regorge de petits trésors de marchés et de temples tout aussi charmants les uns que les autres. Une escapade culinaire et reposante guidée par Eh, locale de l'étape, qui a eu la gentillesse de m'héberger quelques jours et la bonté de me faire découvrir ses restaurants préférés. Prochaine destination : Bangkok !

 

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Houaxay J353 Laos

Laos, sur la montagne

Ecrit à Houaxay le 4 mars 2017 - Km 10500 (total 16500 depuis la France)

Ce silence … 

L'enfer des klaxons s'est donc arrêté à la frontière ! Alléluia !

 

Vraiment, je ne me suis rendu compte réellement de l'intensité de la Chine et du Vietnam une fois passée la frontière. Ce qui m'a frappé en premier, c'est ce calme, cette absence d'avertisseur sonore, cette impression qu'en fermant les yeux je pouvais enfin entendre les bruits de la nature (et ceci inclus les coqs à mon plus grand regret). J'en rajoute un peu, car ce n'est pas comme ça dans tout le pays, mais après avoir été harcelé en continu par 5 mois de stimuli auditifs divers et variés, j'ai savouré la paix de mes premiers coups de pédales en terre non hostile.

 


Même la musique semble se mettre au diapason : l'abrutissante techno sino-viet (l'équivalent de notre infâme eurodance) est miraculeusement remplacée par des rythmes presque caribéens, à tendance reggae, cumbia ou zouk. Cela pose une ambiance. Les locaux savent aussi prendre le temps. Ils sont plus réservés, respectueux, avec le sourire moins facile mais tout aussi radieux. Et puis soudain, surgi de nulle part ...

… « Sabaidiiiiiii !! »

 

Encore plus mignon qu'une vidéo de chatons sur Facebook, les enfants prennent un malin plaisir à me saluer et agiter leur main au passage de mon vélo, alors qu'ados et adultes me gratifient le plus souvent d'un petit sourire complice, comme s'ils laissaient aux plus jeunes la primeur de se livrer à ce jeu de salutations fort sympathique. Si au Vietnam j'ai parfois eu l'impression d'être aussi populaire que Mickael Jackson, je me vois propulsé ici dans le rôle de la reine d'Angleterre. Je salue généreusement les badauds qui me rendent chaudement la pareille. 

 

Autre démarcation, c'est le nombre croissant d'autochtones pratiquant l'anglais. Cela simplifie les échanges et atténue cette sensation de « lost in translation ». Je pensais aussi avoir tout vu tant au niveau du gradient des côtes au Vietnam : les pentes laotiennes m'imposent des raidillons qui explosent les cuisses (et ce qui m'attend en Thaïlande devrait être bien plus corsé) !

 

Le point ultime qui change la vie du cyclocampeur, c'est la facilité déconcertante avec laquelle on déniche un beau bivouac. La faible densité de population du pays est telle que la nature offre de nouveau de nombreux et magnifiques spots de camping sauvage. Et lorsque ce n'est pas le cas, les terrains publics (par exemple une cour d'école) procurent un espace confortable et idéal pour passer la nuit. Avec souvent en prime la bénédiction bienveillante des locaux. 

 

Tout cela offre une expérience cycliste paisible et agréable. Je voyage de nouveau l'esprit tranquille, faisant vagabonder mes pensées sereinement, digérant lentement mais sûrement les événements hauts en couleurs de ces derniers mois. C'est aussi le premier réel dépaysement depuis mon débarquement en Chine. Pour un environnement pittoresque et un univers tout droit sorti d'une carte postale.

 

Février au Laos, c'est la haute saison touristique. J'ai d'ailleurs croisé le chemin de nombreux pédaleurs. C'est comme si tous les vélocistes du monde entier s'étaient donné rendez-vous sur ces routes, à un carrefour stratégique du sud-est asiatique. Avec certains, j'ai passé des moments formidables, avec d'autres j'ai partagé ma route, ou seulement tailler une bavette en guise de pause. C'est amusant de voir qu'il y a autant de personnalités que de façon de voyager à vélo. Du vacancier léger parti pour quelques semaines à l'aventurier chevronné qui a lâché notre monde cruel, je découvre un étonnant panel de baroudeurs à pédales. Mention spéciale à Lorenzo, basque espagnol, 91 pays à son actif pour 200.000 km et 19 ans de vadrouille en continu. Cela force le respect et l'admiration, forcément. Presque 20 ans de nomadisme et toujours avide de découvertes. Et aussi et surtout un grand bonjour à tous les autres, par ordre de rencontre : Nico et Alex (France), Jaimi (Angleterre), Henry et Wally (Belgique), Christa (Suisse), Homère (France), Antoine (France), Connie (Allemagne), Daniel (France), mes frogs adorés (Nico et Gokben), Bastien et Alexine (France, blog Tand'un rêve), Verena (Allemagne), Justin et Philippe (France), Meytte et JB (France), Marco (Italie) ... Liste non exhaustive, je n'ai malheureusement pas retenu tous les prénoms ! 

 

Depuis la frontière j'ai rejoint Ponshavan par la sereine route 7. Un plateau pour une transition parfaite entre le temps pourri du nord vietnam et les températures estivales de l'intérieur du Laos. Quelques montagnes plus tard, j'ai découvert Phoukoum puis Luang Prabang où j'ai fait une pause d'une semaine. Le temps de m'organiser pour faire un allez-retour en bus à Vientiane, j'avais mon visa thaïlandais à grapiller. Gratuit pour 2 mois, cadeau du nouveau roi thai. J'ai repris la route 13 puis la 1C pour atteindre ensuite Nong Khiaw. A partir de là, j'ai pratiqué un peu de piste jusqu'à Mung Ngio, petite bourgade touristique ma foi fort agréable. J'ai ensuite pris le bateau jusqu'à Mung Khua, tout près de la frontière vietnamienne (et de Dien Bien Phu où j'étais passé quelques mois auparavant). J'ai ressenti l'influence du pays limitrophe en flânant et trouvant dans les marchés des petits pains baguettes et autres delicatessen made in Vietnam. Je me suis enfin rapproché de la frontière chinoise en passant par Oudanxay (route 2E) puis Luang Nantha (route 13N puis 3) pour enfin me diriger vers la frontière thailandaise et Houaxay. Là encore, j'ai de nouveau perçu l'influence chinoise dans la région. J'ai retrouvé mes chauffeurs klaxonneurs, mes routiers lourds du pied et mes joyeux compères sans gêne. Cela me manquait tellement ! Présence aussi signalée par les nombreux travaux entrepris dans le coin pour exploiter les ressources naturelles, comme en témoignent ces nombreux barrages en construction. La Chine, pays de bâtisseurs, au pouvoir de destruction tranquille. Là où ils passent, la nature trépasse.

 

Je savoure donc ces splendides paysages laotiens en pensant que si j'y reviens un jour je ne suis pas sûr de les revoir. Car si la montagne réclame le sacrifice des mollets et le don de sueur abondante, la récompense est pour les yeux : de somptueuses lignes d'horizons, de féeriques levers et couchers de soleil, à savourer dans le calme, la tranquillité et la simplicité de ce pays qui j'espère conservera ses charmes aussi longtemps que ses bambins garderont leur innocence et spontanéité. 

 

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Nam Can J313 Vietnam

Franchir des caps

Ecrit à Nam Can (Vietnam) le lundi 23 janvier 2017 – km 9370 (au total 15370 depuis le départ de France). Édité et mis à jour à Luan Prabang (Laos) le 07 février 2017.

Me voilà arrivé à Luan Prabang. Quelle aventure mes amis ! Avant de tout vous raconter sur mes premiers coups de pédales au Laos, je voudrais revenir sur la dernière partie de mon périple vietnamien ...


Il y a des fois où rien ne se passe comme prévu. Ce qui est somme toute assez prévisible en voyage. Tout comme mon départ d'Hanoi, qui n'a pas été celui que j'espérais. La motivation est retombée comme un soufflé après quelques décourageantes péripéties et un retour impromptu dans cette ville qui décidément me colle à la peau. 

 

Tout d'abord pour régler un problème mécanique (comme si je n'avais pas eu assez de temps pour m'en occuper auparavant). À ce problème technique s'est ajouté un problème météorologique, avec un temps exécrable sur tout le nord du Vietnam, ainsi qu'un problème grippal qui m'a cloué au lit pendant 2 jours. Les cerises sur le gâteau, ce furent ces deux petites chutes sans conséquence physique mais qui ont quelque peu égratiné mon moral ... Ce qui n'était pas prévu non plus, mais qui a été en revanche très positif, ce fut d'effectuer les premières journées de ce faux-départ en compagnie de Nico et Gokben.

 

Cela fait maintenant un bail que je suis parti de France. Il y a bien eu des moments pendant ma longue baroude où je me suis posé des questions sur les motivations et le sens de mon voyage. Généralement à des périodes charnières : au bout de 3 mois, 6 mois, 1 an … Je passe maintenant le cap des 1 an et demi, et celui-ci a été de loin le plus délicat à franchir. D’abord, reprendre l'aventure après avoir goûté (trop peu) aux joies oubliées de la vie sédentaire n'est jamais chose aisée. J'avais aussi emmené sur la route tous les doutes réveillés pendant mon séjour à Hanoï. En cela, ce faux-départ a été la métaphore parfaite de cette mini-crise passagère, comme si je devais remettre de nouveau tout à plat, pour repenser ma manière de voyager devenue peut-être trop rigoureuse et accepter de nouveau le « lâcher-prise ». 

 

Cette suite d'événements malvenus a donc finalement été une bénédiction. Tout mon itinéraire, toutes mes certitudes, tout cela s'est envolé au fur et à mesure de toutes ces petites mésaventures, et j'ai du tout recomposer dans une excitante improvisation. C'est celle-ci, en amie bien intentionnée, qui m'a donné ces nouvelles joies de cyclo-campeur et des sensations de baroudeur heureux retrouvées. Je suis de nouveau sur ma lancée, bien décidé à croquer le Laos et la Thaïlande dans la joie et la bonne humeur. 

 

C'est la route qui s'est chargée de me remettre la patate. Avec son lot de beaux paysages, de rencontres fortuites et de moments humains. Après mon second retour d'Hanoi, depuis Ninh Binh, j'ai repris le Ho Chi Minh trail, pour ensuite bifurquer vers la frontière vietnamienne en empruntant une voie loin du trafic tumultueux habituellement rencontré au Vietnam (la QL48c). J'y ai traversé des petits villages pittoresques, me faisant saluer plusieurs centaines de fois par jour et me faisant inviter généreusement par les locaux … Et même par des policiers (par deux fois) ! Ceux-ci se donnant pour mission du jour de me charger consciencieusement la bourriche à coup de schnaps vietnamien. Le nouvel an chinois (ou« têt ») n'est pas encore célébré officiellement que les préparations battent déjà leur plein ... Cela promet pour les festivités. Fort heureusement pour mon foie, je serai déjà loin quand tout ceci aura commencé.

 

Le Vietnam, c'est aussi « the Big Sound ». La musique à fond claque dans les espaces publics et les décibels retentissent dans les innombrables karaokés (parfois même au petit matin). Les radios de rue crachées sur haut-parleur et la folie klaxonnière viennent compléter ce beau capharnaüm dans la joie et la saturation des oreilles. La nuit venue, quand le chaos sonore touche enfin à sa fin, c'est le moment qu'a choisi le coq pour entrer en scène ...

 

Je croyais bien naïvement que son chant accompagnait le lever du soleil … En pratique, il commence bien plus tôt son sournois petit jeu musical, vers les 3 heures pétantes. Pour souvent ne plus s'arrêter de la matinée. A vrai dire, je ne comprends vraiment pas comment mon beau pays la France a pu prendre ce gallinacé idiot comme emblème. A moins que la perfide volaille ne soit d'humeur vengeresse : sachant pertinemment qu'il va finir tôt ou tard à la casserole, l'infernal poulet se serait décidé à irriter ses bourreaux en guise d'épilogue. Au final, peut-être pas si inadéquat que ça, ce choix de blason national ;)

 

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Hanoi J294 Vietnam

Hanoi l'Européenne

Ecrit le 4 janvier 2017 à Hanoi 

 

Pour soigner ce moral en berne, j'avais donc décidé de poser mes sacoches à Hanoi pour une durée d'un peu plus d'un mois. J'avais besoin de me sentir appartenir à un lieu, de prendre des repères, me trouver une routine, fréquenter des gens plus d'un jour ou deux … C'est Yohann, cyclo-campeur rencontré à Istanbul qui m'a vanté les mérites de la ville et m'a donné l'idée d'y faire une pause. J'avais aussi un contact sur place, Jonathan, qui m'a mis bien à l'aise et s'est appliqué à me révéler quelques secrets bien gardés de la capitale vietnamienne. 

 

Concrètement, ma première impression d'Hanoi a été celle d'une ville congestionnée et polluée. Il m'a fallu quelques jours pour commencer à l'apprécier et m'y sentir comme chez moi. Ce qui m'a frappé en premier, c'est ce lourd trafic urbain, intense et étouffant. On pourrait le comparer au flux d'une rivière, toujours en mouvement, rien ne pouvant entraver le flot des scooters et des voitures. Pendant les heures de pointe, il n'est pas rare de voir déborder les deux roues sur le trottoir. Et tant pis pour les piétons ! En fait, la seule règle valable dans tout ce marasme, c'est qu'il n'y en a pas. Tout est permis, et le seul facteur qui permet d'éviter de nombreux accidents c'est la vitesse moyenne générale assez basse. Tout le monde reste sur ses gardes et sait que le danger peut arriver de tous les côtés. A Hanoi, chaque chauffeur est un chauffard potentiel … Après, pendant les heures creuses, la cité devient presque agréable à parcourir. Et après minuit, il n'y a presque plus personne pour chauffer le tarmac. 

 

Car Hanoi est une ville de contraste. Si l'on s'attarde un peu à déambuler dans toutes ces ruelles labyrinthes, on y découvre de nombreux coins tranquilles voire même romantiques. C'est ce qui fait tout le charme de la ville. Plus on la connaît, plus on repère de ces petits endroits privilégiés et plus on s'identifie à la cité. Hanoi dévoile ses mystères au compte-goutte, juste assez pour avoir envie d'y rester chaque jour encore un peu plus. J'ai même parfois eu l'impression de retrouver l'ambiance de ma bien-aimée Barcelone ! Avec toutes ses petites places secrètes, son architecture désordonnée et ses nombreux cafés-terrasses. 

 

Ce qui tranche par contre avec la capitale catalane, c'est le manque flagrant de liberté. On ressent fortement la présence policière, et si le couvre-feu n'est plus de mise, les réflexes sont restés et la grande majorité des habitants sont loin d'être des noctambules. La plupart des terrasses du centre sont évacuées à minuit pile par des escouades de contrôle officielles, à coup de haut-parleur. C'est alors l'heure du repli stratégique. Il existe quelques endroits pour les couche-tard, fréquentés pêle-mêle par les backpackers, expats et une partie de la jeunesse locale. Lieux tolérés par les inquisiteurs locaux moyennant graissage de patte régulier. Au sein de la capitale viet, la petite corruption bat son plein. 

 

Ce qui fait aussi la particularité d'Hanoi, se sont ses nombreux lacs et étendues d'eau. Ils aèrent la ville et sont propices à la relaxation. Ce sont les poumons de la cité, des indispensables régulateurs de stress urbain et des fournisseurs prolifiques de ces petits coins romantiques précédemment évoqués. J'ai moi-même choisi d'habiter près de l'un de ses réservoirs, celui de Gian Vô. Le plus grand d'entre eux, Tay ho (ou West Lake), est un monde à part, riche, paisible, où j'ai aimé me ressourcer quotidiennement pour m'extirper du chaos ambiant. C'était aussi l'endroit idéal pour continuer à pratiquer la bicyclette. 16 km pour un tour complet.

 

Au final, j'ai vraiment aimé Hanoi, j'ai adoré m'y perdre, m'y retrouver, et cela a été surtout l'occasion de me donner de nouveau l'envie de voyager, de repartir. De faire une pause salvatrice. J'ai aussi découvert un endroit où je pourrais parfaitement couler quelques mois si jamais un jour une opportunité professionnelle s'y présente. 

 

Ce serait pour moi l'occasion de revenir y manger mon « Bun Cha » quotidien. C'est mon repas préféré au Vietnam. Je ne rate jamais l'occasion de m'en enfiler un. Concrètement, c'est une sorte de marinade à la sauce poisson contenant du porc braisé et des légumes (carottes, papaye …). On y rajoute ensuite à sa guise vermicelles et herbes fraîches (coriandre, menthe, salade, etc …). Le tout est frais et délicieux. Chic et pas cher. Et surtout très addictif. Sans compter que chaque établissement a sa propre façon de l'accommoder, c'est un plaisir renouvelable et sans fin.

 

Cette fin de mois de décembre a été aussi celle de retrouvailles cyclocampestes, avec le retour annoncé d'Alessio et Binh qui eux ont décidé de s'installer et de se rapprocher de leur famille après une grosse boucle dans le Laos. Ce fut aussi une étape supplémentaire dans le voyage de Nico et Gokben, mes hôtes warmshower de Chengdu. Tous les 5, nous avons fini l'année en apothéose, avec un séjour court mais mémorable sur l'île de Catba, tout près de la baie d'Halong. Nous y avons fêté comme il se doit le passage à l'année 2017. 

 

Alors voilà, pour cette nouvelle année, je vous souhaite de beaux voyages, de nombreuses découvertes, quelques (bonnes) surprises, mais aussi de l'amour et une santé de fer ! Que 2017 soit l'année des rêves qui se réalisent !

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Hanoi J274 Vietnam

La constante asiatique

Ecrit à Hanoi, le jeudi 15 septembre 2016 – km 8500 (soit environ 14500 km depuis le départ de France!)


Je suis arrivé à Hanoi il y a 3 semaines environ, et j’ai décidé de m’établir ici pour un bon gros mois et de profiter des attraits d’une vie « normale ». C’est à dire : avec une douche chaude quotidienne, une machine à laver à disposition, un vrai lit pour moi tout seul et une routine à établir.

 

Avant cela, j’avais passé 3 semaines à voyager dans le nord ouest du pays, période sur laquelle je voudrais revenir dans cet article et ainsi combler ainsi le petit retard que j’ai accumulé dans le contage de mes aventurettes. Retour au début du mois de novembre, Lao Cai, ville-frontière au bord de la Chine, long travelling cinéma sur le fleuve rouge et un horizon alpin plein de promesses …

 

Nous sommes toujours en équipe, moi, Alessio, Binh et Tim. J’ai décidé de changer mes plans et de les accompagner jusqu’à la frontière laotienne. Pour atteindre Dien Bien Phu, nous devons traverser des massifs montagneux aux pentes bien raides et dans une météo exécrable. Non seulement nous ne pouvons pas profiter des paysages grandioses qui devaient s’offrir à nous (Sapa), mais nous essuyons de larges averses et taillons notre route dans un brouillard épais. Le moral est atteint, mais nous tenons le cap. Avec toujours l’espérance de voir cette purée de pois s’envoler et nos yeux enfin s’écarquiller. Ce temps pourri nous offre tout de même de belles aventures humaines au sein des minorités montagnardes (autour de Lai Chau).

 

Les efforts et la patience finiront par payer, car enfin, au détour d’un col, nous faisons de nouveau connaissance avec le soleil, qui par la même occasion se décide à nous rendre notre sourire et bonne humeur. A partir de Sin Hau, c’est de nouveau la lune de miel, la communion avec des paysages de rêve et du pédalage easy-going. Nous déroulons jusqu’à Dien Bien Phu, y passons quelques jours, épuisons les réserves nourriture de quelques restaurateurs du coin, et c’est déjà le moment de se dire au revoir. Je n’ai plus qu’à reprendre la route seul jusqu’à Son La, regouter au plaisir du bivouac en solitaire, et enfin prendre un bus qui me mènera jusqu’à Hanoi (mon premier bus depuis la France!).

 

Voyager en groupe, après l’épisode européen avec mes amis équipés en vélos Brompton (Mona, Max et Calvin), cela a été encore une expérience exceptionnelle et intense, et m’a donné une nouvelle fois l’occasion de me faire des amis pour la vie. Nous avons passé moments grandioses et plans galères dans une solidarité à toute épreuve, dans une volonté permanente de partage. Voyager ensemble, c’est aussi profiter des compétences élargies d’un groupe : Binh, locale de l’étape, nous a initiés quotidiennement aux délices culinaires de son pays et nous a gratifiés de quelques belles explications culturelles. Alessio, chef de cuisine de métier et de talent, a toujours été à la recherche de nouveaux produits à goûter et nous faire découvrir … J’espère avoir pu porter ma petite pierre à cet édifice de cyclocampeurs, d’une manière ou d’une autre !

 

Oui, car la cuisine vietnamienne, c’est un régal permanent. Beaucoup de points communs avec la cuisine chinoise, il y a des nouilles, du riz, des soupes, du tofu … Mais les saveurs sont très différentes. C’est beaucoup moins épicé, déjà. La coriandre et la menthe sont omniprésentes, pour mon plus grand plaisir. La viande, de meilleur qualité, est aussi servie plus généreusement. Et cerise sur le gâteau, l’apparition de petits pains baguettes comparables à ce que l’on peut trouver en France ! Bref, la cuisine viet, c’est frais, c’est bon, c’est chic et pas cher.

 

Les points communs entre la Chine et le Vietnam ne sont pas uniquement culinaires. Depuis le début de mon voyage en Asie, c’est là où j’ai ressenti le moins de différence entre niveaux de vie de deux pays limitrophes. Au petit jeu des comparaisons, ce serait un peu comme passer de la France vers l’Italie ou l’Espagne. L’autre point commun, partagé avec tout le reste des pays du continent asiatique dans lesquels j’ai eu la chance de voyager, c’est ce sourire. Ici encore, omniprésent. J’ai parfois eu à répondre à presque une centaine de salutations spontanées, sur une journée. Moi qui me demandais à quoi ressemblait une vie de célébrité, j’ai eu ici un début de réponse … Et c’est un truc qui va vraiment me manquer lors mon retour en Europe. Pas la vie de rock star, hein, vous m’aurez compris, mais ce joli sourire indélébile et désintéressé. Car c’est bien lui, la véritable constante asiatique.

 

La nouveauté au Vietnam, c’est ce taux d’inflation « gringo ». C’est un système d’indexation très complexe et extrêmement réactif. Dès lors qu’un occidental s’approche d’un produit de consommation courante, celui-ci voit son prix s’envoler du simple au double (voire triple). Bigrement efficace, mais un peu déconvenant. Surtout quand il se trouve que je suis l’occidental en question. Apparemment, ce taux d’inflation varie en fonction de l’ardeur à la négociation. Pas sûr que je sois encore prêt pour ça …

 

Surtout qu’après toutes ces péripéties chinoises du mois précédent, cette mauvaise météo, j’ai constaté une tendance propre à la ronchonnerie, à me laisser facilement affecter négativement par les petits obstacles de la vie quotidienne. Il fallait que je me reprenne en main, rapidement …

 

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Hekou J236 Chine

Happy end à la chinoise

Ecrit à Sapa au Vietnam, un jour de pluie battante, au chaud dans mon lit, le 9 novembre 2016 – Km 7800

La Chine en quelques chiffres :

1800 kilomètres effectués à vélo
3 trains : Oulan-Bator/ Pékin (28 heures), Pékin/Chengdu (à peu près pareil) et Dali/Kunming (6 heures)

Mes nuits : 57 au total

10 bivouacs dans 10 endroits différents.
7 nuits passées en warmshower chez 2 hôtes différents
26 nuits en hostel
6 nuits en hotel
8 invitations chez l'habitant ou chez des travailleurs

C'est aussi ...

4 ou 5 cols à plus de 3000 mètres d'altitude.
Un estomac comblé de petits bonheurs quotidiens
De nombreuses tâches sur mes vêtements issues de ces mêmes petits bonheurs :)
Un disque dur de grillé, un ipod boiteux ...
2 décibels de moins à l'oreille gauche (celle qui réceptionne les coups de klaxon)
Un grand moment de stress
Des amis sur qui compter
Des paysages à couper le souffle
Et des dizaines de sourires quotidiens

--

Si je devais résumer la Chine en une phrase, une idée, un geste, ce serait un grand "Hello" lancé de nulle part suivi d'un malicieux éclat de rire. Je n'ai jamais cessé d'être étonné et surpris par l'enthousiasme et la jovialité générale des gens que je croisais sur mon passage. 

 

L'histoire se termine donc beaucoup mieux qu'elle n'avait commencé. Comme si petit à petit je m'étais enfin acclimaté à ce pays, que j'avais réussi à en dompter les contrastes. Les voyants sont passés progressivement au vert. 

 

Tout d'abord, ma banque m'a remboursé très rapidement la grosse somme qui avait été frauduleusement ponctionnée sur mon compte (très pro, un ptit coup de pub pour Boursorama pour le coup). Ensuite, la météo a été (presque) clémente. Enfin, j'ai trouvé un chouette groupe de cyclistes pour compléter cette dernière portion de Chine. A plusieurs, les joies sont partagées, les difficultés diluées. 

 

C'est ainsi que j'ai embarqué en train avec Tim (Nouvelle-Zélande) depuis Dali vers Kunming, nous y avons effectué nos visas vietnamiens puis nous avons rejoint de nouveau à vélo le couple des "patates roulantes", mes chers Alessio (Italie) et Binh (Vietnam), juste avant d'entreprendre l'exploration de la zone des rizières en terrasse de la région de Yuanyang. Sans conteste l'un des moments forts de ce voyage en Chine. Ce site est classé patrimoine mondial à l'Unesco, avec toute la folie touristique qui tourne autour. Nous avons tout de même trouvé le moyen de tracer notre chemin en gardant cet esprit d'aventure qui caractérise notre mode de déplacement, en faisant le choix d'emprunter une petite route de montagne partiellement en construction, nous faisant passer par de petits villages cotoyants d'abruptes falaises. Un peu de frustation tout de même, un épais brouillard nous ayant empêché d'admirer durant la totalité du parcours les magnifiques paysages qui aurait du s'offrir à nous, tout en nous donnant en échange une atmosphère surréaliste et indescriptible ... Digne d'un film de zombie !

 

Ce qui m'a particulièrement plu en Chine, ce fut l'impression de naviguer la plupart du temps en dehors des sentiers battus, et ce même dans les endroits les plus prisés par les visiteurs. Les rabatteurs n'y sévissent que très peu, et on peut effectuer ses achats tranquillement même dans les plus gros hotspots touristiques comme Dali ou Lijiang. J'ai eu aussi l'agréable sensation que les relations entre étrangers et locaux n'étaient pas forcément motivées par des considérations économiques, laissant la porte ouverte à un contact sain et sans arrière pensée. 

 

J'ai aussi été ravi de pouvoir bivouaquer sans aucun problème. J'ai mis du temps à me sentir à l'aise pour planter ma tente sur ces terres un peu plus fréquentés qu'à l'accoutumée, mais finalement les locaux se montrent clairement plus amusés et curieux que méfiants. Il est vrai qu'en groupe, on se sent plus fort et plus relax au moment d'établir le camp ! 

 

Au final, je sors ravi mais fatigué de cette expérience au sein de l'empire du milieu. J'aurai eu des débuts difficiles, de nombreuses petites galères, de nombreuses situations d'incompréhension ... Cela a été rude par moment, tous ces dénivelés, ces routes compliquées, ce bruit incessant, ces différences culturelles fortes, cette impression de voir mon destin parfois m'échapper. Mais ce sont paradoxalement ces moments délicats qui rendent les saveurs du voyage si particulières. Je pars de ce pays sans savoir pour le moment s'il va me manquer réellement un jour, mais ce qui est sûr, c'est que cela va me donner de nombreux souvenirs et quelques histoires rocambolesques à raconter.

 

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Kunming J216 Chine

Les tribulations d'un galérien en Chine

Ecrit à Kunming, le dimanche 23 octobre 2016. Km 7250

J’avais vraiment commencé à apprécier de plus en plus l’aventure chinoise. L’état des routes s’était amélioré et la beauté des paysages se faisait plus notable. Depuis le lac Lugu, j’étais rentré dans la province du Yunnan et je commençais à découvrir une Chine de plus en plus rurale et authentique. Certains empruntent la route de la soie, la route du rhum ou encore la route des épices, moi j’emprunte les routes en construction. Cela me donne au moins l’avantage de me faire héberger par les travailleurs de le DDE locale, et c’est toujours l’occasion d’un bon gueuleton et de belles rencontres en perspective.

 

Après l’épopée du Mont Gadoue (Meigu), j’ai tenté ma chance sur une chaussée en chantier depuis 9 ans, entre Ninglang et Lijiang. Avec quelques appréhensions … Cette-fois-ci, le pari aura été gagnant, car j’ai profité d’un asphalte tout neuf et bien confortable, le tout sans le tumulte des assourdissants pachydermes de la route, l’accès leur étant coupé à mi-chemin : il faut emprunter une barque pour pouvoir prétendre rejoindre les deux villes. A la fois pittoresque et régulateur de trafic routier.  A la place des dangereux camions et horribles bus, je croise des deux roues pétaradants, des chèvres, des vaches et quelques chiens enragés. Je gagne quand même au change !

 


Les chinois sont toujours aussi sympas et hospitaliers, jamais avares d’une salutation enthousiaste ou d’un sourire rendu. C’est la grande satisfaction de ce voyage. Même si la communication ne passe pas forcément toujours bien, je peux toujours m’attendre à obtenir de l’aide, même non demandée. J’ai même parfois l'impression d’être traité comme une rock star avec mon statut d’aventurier à vélo. Ou encore d’être de temps en temps observé comme une bête curieuse. Ce n’est pas vraiment dérangeant et je préfère largement ça à l’indifférence. 

 


Je voudrais par contre revenir sur un point de mon article précédent. La bicyclette, une fois sortie des zones urbanisées et de leurs espaces dédiés aux deux roues, n’a plus du tout sa place sur le macadam. Sur les petites et escarpées routes de montagne, le vélo est un problème qui se règle à coup de klaxon. Je pourrais même écrire un roman sur les déviances routières des chinois … Dont voici les 3 spéciales, celles que j’affectionne particulièrement :

1. me faire klaxonner à 2 mètres de distance par un camion ou un bus, à coup de 150 décibels
2. voir arriver en face deux véhicules … occupant l’espace des deux voies
3. et ma préférée : doubler une voiture à l’arrêt (bien souvent bouchant la voie cyclable), et voir celle-ci redémarrer juste au moment où j’arrive à son niveau. Ba oui quoi, je pourrais klaxonner quand même !

Pas de quoi me décourager complètement pour le moment.

 


Je me demande aussi si les klaxons peuvent affecter le matériel électronique, car après la déchéance du disque dur de mon ordinateur, c’est un peu l’hécatombe de ce côté là. La majorité de mes câbles USB ont déjà rendu l’âme, mon précieux ipod nano ne s’allume plus que si je le branche au secteur, le câble de mes écouteurs s’est vu légèrement sectionné, ma batterie tampon ne se charge plus correctement, et j’ai aussi repéré un début de faiblesse de mon matos photo, boiter et objectif. Sans compter les frayeurs que m’ont provoqué les freeze de mon fidèle mais vieillissant smartphone. J’ai une autre théorie sur le sujet. Tous ces items made in China se sentent de retour sur leur terre, et pensent peut-être que c’est le bon moment pour reposer en paix près des leurs … 

 

Toutes ces petites galères ont été annonciatrices d’une plus grande, de celles qu’on pense qu’elles n’arrivent qu’aux autres (un peu comme le vol d’un vélo par exemple). Ma carte bancaire a été piratée (je suppose) et des paiements frauduleux ont été effectués sur internet à hauteur de 2700 euros (pour le moment, j’espère que la note ne va pas être plus salée dans les jours qui viennent). J’ai bien sûr fait opposition immédiatement une fois le pot aux roses découvert et contacté ma banque pour que ce problème majeur se résolve au plus vite, et que je puisse de nouveau voyager l’esprit en paix. Pour le moment, je ne peux que constater l’ampleur de la catastrophe et attendre la réponse des enquêteurs quant à la suite de cette affaire  (30 jours max).

 


J’ai donc passé ma semaine à Dali à effectuer appels et papiers, à m’inquiéter, et je suis de nouveau malgré moi rentré dans le cercle infernal de l’administration chinoise. Celle du dicton « possible n’est pas chinois ». Moi qui ne voulait pas étendre mon visa ici pour ne pas encore avoir à faire à l’inertie de la bureaucratie locale, j’ai eu en fait bien plus de rab que je ne pouvais imaginer. En fait, il « suffit » de s’adresser à la bonne personne au bon moment pour que la situation se débloque rapidement (avec un sourire et même parfois un thé). Mais le problème, c’est de trouver cette personne ! Cela peut s’avérer à la limite de l’impossible, et toujours à la frontière du découragement. 

 


J’ai pu heureusement compter sur le soutien inconditionnel de mes proches, et aussi sur mes bien-aimés rollingpotatoes (Alessio et Binh) qui ont accéléré leurs coups de pédales pour me rejoindre à Dali et venir m’aider à relativiser cette fâcheuse situation. Il y a aussi eu la bienveillance précieuse de mon hôte warmshower, Heimat, manager de l’auberge Dali Mufu, qui m’a accompagné à la police locale (malgré son emploi du temps très serré) et qui m’a permis d’évoluer sans soucis supplémentaire dans l’environnement cosy et serein de son établissement. Je suis dorénavant de nouveau en mouvement, en train vers Kunming, bien décidé à terminer mon aventure chinoise sur une bonne note, et avec l’espérance que la poisse qui me suit depuis ces quelques semaines me lâche enfin à la frontière sino-vietnamienne.

 


Depuis mon départ de Chendgu, j’ai eu 4 ou 5 cols à 3000 mètres à franchir. L’avantage d’avoir effectué le premier col dans de la grosse gadoue, c’est que les suivants m’ont semblé bien plus simple à gravir. Je suis passé par Xichang, j’ai ensuite trouvé une petite auberge sympa sur la lac Lugu, l’un des plus beaux endroits que j’ai pu voir en Chine. La route a été tout aussi magnifique entre Ninglang et Lijiang, où je suis resté aussi quelques jours pour profiter de la vieille ville. Avec toujours autant de belles rencontres ! C’est sur la route entre Lijiang et Dali que je me suis rendu compte de l’utilisation frauduleuse de ma carte, et c’est donc logiquement que je suis resté presque une semaine dans cette bourgade touristique, dont finalement je n’aurai pas vu grand-chose ...

 

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Meigu J191 Chine

La Chine en proverbes (chinois)

Écrit à Meigu le 1 octobre 2016. Km 6320

Pour cette première partie de voyage en Chine, j'ai passé plus de temps à port qu'en croisière. Il me tardait donc de reprendre ma barque à deux roues pour ne plus la quitter et me laisser dériver « gentiment » vers Bangkok. On dit de la Chine qu'elle est le pays du proverbe (chinois). Déclinons donc cet article en quelques dictons. 
 

« La Chine, ce sont les routes du paradis avec des chauffeurs venus de l'enfer »

Quelles belles routes, quelles belles voies cyclables ! Vraiment, en Chine, on roule sur un billard (enfin pas tout le temps, j'y reviendrai). Le hic, c'est que c'est un peu l'anarchie sur le macadam. Les voies cyclables sont utilisées à contre-sens ou comme place de parking. Au quotidien, ce sont des refus de priorité, du non-respect de la signalisation, de belles queues de poisson, des dépassements sans aucune visibilté, des inopinés coups de klaxons …  Faut s'accrocher !

 

« Le pays du vélo alerte »

Mais la bonne surprise vient de la situation de la petite reine dans la circulation. C'est un moyen de transport très utilisé, et donc le cycliste a tout à fait sa place même dans un trafic dense. La conduite est tout de même bien sportive. La particularité, ce sont les innombrables véhicules électriques : bicyclettes, trottinettes, scooter, tuk-tuk, tout le bestiaire du deux roues y est ici représenté. Pour un confort auditif accru et une pollution bien moindre (bien des villes européennes devraient s'en inspirer).

 


« La Chine, le pays du matin bruyant »

Il y a ici un sport national dans lequel les chinois peuvent rivaliser à l'aise avec les indiens, c'est le développé de klaxon. Pour la beauté du jeu, pour la beauté du geste, la main est lourde, artistique et systématique sur le buzzer avertisseur. Les cinglants coups de trompe des camions me glacent particulièrement le sang. A chacun d'entre eux c'est une petite plume de mon moral qui s'envole tristement vers l'horizon.

 

« Le pays du soleil qui ne se lève pas »

Arrivé en Chine, je me suis bien cru revenu en Normandie pour un aspect. L'absence de soleil. Et même de ciel. Entre la pollution et le temps pourri, j'ai passé parfois une dizaine de jours sans voir l'ombre d'un rayon de lumière. Par contre, quand il est de sortie, il fait pas semblant : c'est l'effet grille-pain assuré.

 

«  Possible n'est pas chinois »

S'il n'est pas possible de voir le soleil, il n'est pas non plus possible de récupérer mon vélo le jour d'arrivée, pas possible de mettre le compteur dans un taxi, pas possible de trouver un bivouac tranquille, pas possible d'aller sur facebook et google, pas possible d'emprunter une portion de route (interdite aux étrangers, ce qui me vaudra de rajouter 2 cols à 3000 mètres à franchir...), pas possible de faire toute une petite foule de choses qui bout à bout donne envie de baisser les bras. Bon, je dramatise un peu, et suis pleinement conscient que la plupart de ces impasses naissent de la barrière de la langue (ah ba oui car c'est pas possible de parler anglais non plus). La solution est bien souvent à porter de main et un peu de patience et quelques sourires suffisent parfois à se sortir de bien des quiprocos. Lost in translation, version chinoise. 

 

« Le pays des libertés qui commencent là où finissent celles des autres »

Dans un pays réputé pour ses privations de libertés, chacun semble vouloir s'octroyer la sienne sans vraiment se soucier de celles des autres. Les endroits non fumeurs sont donc enfumés, les espaces d'eau interdit à la nage avec de nombreux baigneurs, sans m'étaler sur l'effet que cette mentalité individualiste peut avoir sur le partage d'une chambre en auberge ou le trafic routier. Une petite différence éducationnelle à laquelle il faut savoir s'adapter :)

 


«  Le pays des papilles en émoi »

D'ailleurs, je leur pardonne tout, ce sont tellement d'excellents cuisiniers ! Chacun de leurs mets me procure le réconfort nécessaire pour me remettre de l'un de ces petits chocs culturels. C'est parfois un peu épicé, mais vraiment savoureux (l'un des premiers mots que j'ai d'ailleurs appris à dire c'est « pula », que l'on peut traduire "sans piment"). J'ai également l'impression qu'une vie entière ne suffirait pas à découvrir toute la diversité de la cuisine chinoise. 

 

 

« Le pays du sourire, de la générosité et de l'hospitalité »

Comme je le mentionnais, il est ici très difficile de trouver un bivouac. Même à la campagne, chaque parcelle de terrain est utilisée ou occupée. Je n'ai donc pas d'autre choix que de demander la permission à l'habitant pour planter ma tente. Le plus souvent, je n'aurai même pas à la déplier, je dormirai dans un lit bien chaud avec le ventre bien rempli (un des autres mots que j'ai appris assez rapidement, c'est « shebba », pour dire - je t' ... - ça va j'ai assez mangé ). C'est en plus une formidable occasion de partager le mode de vie local, et représente un réel et appréciable point positif de ce périple en Chine jusqu'à présent. J'aime aussi leur bonne humeur et leur propension à rigoler de tout, cela permet de tout relativiser. 



J'ai tout d'abord passé une semaine à Pékin, où j'ai découvert une capitale vivante et culturelle. J'aurai eu un peu le temps de faire mon touriste « lonely planet » entre les démêlés administratifs pour récupérer mon vélo du train de Oulan-Bator et l'infructueuse pêche à l'information pour remettre mon vélo dans le train pour Chengdu. J'ai tout de même pu aller voir les must-see comme la cité interdite, la place Tien'Anmen, la muraille de Chine, le site olympique et le Lama Temple. Mais ce que j'ai préféré, c'est de déambuler dans les petites ruelles des hutongs dans le vieux Pékin. 

 

A Chendgu, j'ai rejoint les cyclocampeurs « rolling potatoes » (que j'avais rencontré à Séoul) et été hébergé par des supers warmshowers, les « frogs on wheels ». J'y aurai vu les fameux pandas. Ce qui devait être une courte pause de quelques jours s'est transformée en séjour d'une semaine, car le disque dur de mon ordinateur a rendu l'âme et j'ai passé 4 jours (et nuits) à tout remettre en ordre. Finalement, Chengdu, c'était le meilleur endroit pour régler ce genre de tuile matérielle. J'ai pu y retrouver un modèle de disque dur difficile à dénicher et Nico l'un de mes hôtes m'a patiemment aidé à régler mes multiples et irritants problèmes d'installation. Mais c'était aussi surtout l'occasion de passer de chouettes moments en excellente compagnie.

 

Je suis depuis 1 semaine de retour sur la route, en solo, je prends la direction des montagnes du Sichuan et du Yunnan. J'ai visité le site d'un bouddha géant à Leshan, et franchi un 2925 mètres (le mont Meigu) dans la boue et la douleur. C'était la dizaine de kilomètres la plus délicate de mon voyage, une ascension dans un enfer d'humidité. La descente n'a pas été avare en bourbiers non plus. Des cols à 3000, j'en aurai encore beaucoup d'autres sur ma route, mais j'espère que les prochains ne se feront pas dans la gadoue. J'ai du tomber sur une des rares chaussées en cours de construction en Chine, et d'ailleurs, à l'heure actuelle, je suis en train de faire une petite journée de pause (*), recueilli justement et gentiment par les constructeurs de cette maudite route - qui devrait être terminée dans une petite année (!). L'absence d'asphalte m'a fait plonger dans la profonde ruralité chinoise, celle des minorités. C'est d'un contraste saisissant avec la modernité et l’opulence que l'on peut trouver dans les villes … Tout cela me procure cependant de merveilleuses aventures, bien loin de la zone de confort à laquelle je m'étais de nouveau habitué ce dernier mois.

 

(*) Je suis en fait à Xichang, mais il y a toujours un laps de temps entre le moment où j'écris l'article et réussis à trouver du wifi pour mettre à jour le blog.

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Oulan Bator J173 Mongolie

Le Bilan Mongol

Écrit dans le train de Oulan-Bator à Pékin le vendredi 9 septembre 2016 – km 5850
 
La Mongolie, c'était …
 
Presque 2 mois de voyage. Un peu plus d'un mois de pédalage et 26 nuits à Oulan-Bator (13+13).
1500 km effectués sur le mois en vadrouille, dont un peu moins de la moitié sur piste
0 crevaison (spécial dédicace à mes nouveaux pneus Schwalbe Marathon Plus Tour)
Quelques problèmes de transit intestinal, quelques coups de soleil et de nombreuses piqûres de moustiques.
Un lumbago, et une petite semaine « d'arrêt maladie »
Du vent de face, de la pluie, de la grêle, tout ce que le ciel sait faire de mieux
De belles amitiés tissées à la Gana's guesthouse d'Oulan-Bator et sur la route
Des paysages à couper le souffle, un horizon toujours inspirant
Des kilos de mouton ingurgité
De merveilleux bivouacs quotidiens
Et même sans cheval, un voyage épique (!)

"La Mongolie, ce sont les paysages de Normandie avec un ciel sahélien" Sylvain Tesson, l'Axe du Loup
 
De Kharkorin à Oulan-Bator, cette dernière portion de périple mongol m'a apporté son lot de réjouissances, malgré une baisse nette des invitations et du nombre de rencontres. J'avais la possibilité d'emprunter une belle route asphaltée jusqu'à la capitale mongole, j'ai cependant privilégié la piste autant que faire se peut, pour rester dans l'esprit d'aventure et de découverte. J'ai ainsi traversé les splendides parc nationaux de Khogno Khan et de Hustai, planté ma tente dans les dunes de Mongol Els, observé les chevaux sauvages de Prevalski … Et suis arrivé complètement lessivé du dos à Oulan-Bator ! J'aurai aussi appris une notion essentielle : en Mongolie, les raccourcis n'existent pas. J'ai à plusieurs reprises entrepris de couper court pour finalement me retrouver bloquer devant une rivière, une falaise ou même une base militaire.
 

J'ai rejoint de nouveau ma bien aimée Gana's guesthouse comme si je revenais à la maison, et j'ai pu ainsi mesurer la différence entre l'état d'esprit timoré du début de mon séjour et l'esprit conquérant et confiant qui a caractérisé mon retour, regonflé à bloc de motivation et d'espoir pour la suite de mes baroudes. La Mongolie m'a incontestablement permis de devenir un voyageur plus aguerri et m'a fait engrangé une estimable expérience qui me permettra d'affronter les futures obstacles de la route d'une manière plus sereine. 
 

Je quitte un pays dur, singulier, vide parfois, mais qui m'aura donné bien des choses. Tous ces sourires, toutes ces larmes - de joie comme de fatigue - , ces nombreuses amitiés - durables ou fugaces - sont autant de magnifiques sensations que j'ai bien du mal à décrire en quelques mots. Au final, la Mongolie aura été une expérience intérieure sublimée par ses déboires extérieurs.
 

Je voulais traverser le désert du Gobi en vélo. J'ai finalement opté pour la voie ferrée. J'ai surtout profité de mon temps à Oulan-Bator pour récupérer de ce périple harassant. Il faut parfois savoir ménager sa monture. La capitale contraste nettement avec le reste du pays. Ici, c'est douche chaude, toilettes à l'occidentale, bars, restaurants, consommation facile et un style de vie nettement plus commode. C'est une ville qui compte 1 million d'habitants (le tiers de la population mongole) et un petit centre « moderne » qui procure parfois l'occasion de recroiser des visages connus. Je contemple donc paisiblement les courbes arides du sud du pays depuis la baie vitrée de ma cabine, ce qui n'est pas non plus la pire des situations. J'aime le train, et emprunter le dernier tronçon du mythique transmongolien représente aussi une belle expérience de voyage. Avec la Chine en ligne de mire ...

 



et un petit bonus ;)

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Kharkorin J150 Mongolie

Où sont les arbres ?

(avec leurs branches et plein de charme)

Ecrit le 17 aout 2016 à Kharkorin – km 5400

J'exagère un peu, il y en a parfois, des arbres, en Mongolie. Mais la plupart du temps, le panorama  tend plus à ressembler à un désert vert, avec ses oasis, ses reliefs accidentés, ses rivières, ses magnifiques lacs. Je ne suis pas en manque de jolis paysages. La Mongolie, c'est aussi le royaume des mouches. Elles y prolifèrent et s'y sentent bien. Dès qu'il y a un peu de soleil et pas trop de vent, elles s'enchantent de ma présence et ne manquent pas de me rendre une petite visite. 

 

Une fois affranchi des chocs culturel et intestinal, je peux enfin profiter de la route. Ou plutôt de la piste. C'est en l'empruntant que j'ai réellement lancé mon aventure. A vrai dire, voyager en Mongolie en restant sur la route asphaltée, ce serait un peu comme essayer de découvrir la France en empruntant l'autoroute. De spectateur, je redeviens acteur de mon voyage.

 

Aux contraintes déjà évoquées dans l'article précédent, on peut rajouter celles liées à la piste en elle-même. Au menu du jour, gadoue, sable, gravier, cailloux, ondulations (*), bosses, passages à guets, le tout servi séparément ou bien simultanément. Il y en a pour tous les goûts, et en général c'est le dos qui déguste en premier. 

 

(*) Ondulations : cela doit être provoqué par le passage à répétition des voitures sur la piste. Il s'y forme parfois des petits agglomérats de sable ou terre meuble qui s'apparenteraient à de multiples dos d'âne disposés les uns après les autres. C'est vraiment compliqué d'avancer sur ce genre de difficultés, à la limite de l'infernal.

 

Dans de telles conditions, les plaisirs les plus simples sont les plus savoureux : observer un aigle voler en rase-motte, surprendre une marmotte se cacher dans son terrier, se réveiller au beau matin au milieu des chevaux, scruter la formation d'un orage à l'horizon, profiter du spectacle qu'offrent les cavaliers rassemblant leur troupeau, saluer les passants, se faire inviter à boire le thé par les nomades … 

 

… Car l'aventure est aussi humaine. Sur cette partie du chemin que l'on pourrait qualifier de « hors des sentiers battus », je n'ai pas manqué d'invitation, la curiosité et l'hospitalité des mongols n'étant pas en reste. J'ai pu ainsi goûter à quelques spécialités locales : thé au beurre de yak, lait de jument fermenté, riz au lait de vache, boyaux de moutons fraîchement préparés, petit gâteaux durs au goût de fromage et autres delicatessen made in yourte. Mon estomac commence à devenir blindé.

 

Je savoure aussi tous les merveilleux bivouacs que cette nature sauvage peut m'offrir. Je n'ai que l'embarras du choix, et quasiment chaque soir, je plante ma tente dans un décor idyllique. Avec pour préoccupation première de me protéger du vent et d'éviter d'éventuelles zones inondables. Je ne suis pas près d'oublier cette portion de mon périple. Je me suis parfois approché de mes limites physiques et mentales. Mais toujours avec une récompense au bout, une petite douceur qui me fait tout relativiser en un instant. Dure et fascinante Mongolie.

 

Depuis Khatgal, je suis redescendu sur Moron où je me suis reposé quelques jours à la guesthouse de la sympathique Baigal. J'y ai recroisé Tom et Olivia, cyclocampeurs eux aussi (www.abeecyclette.com), et de Petri, finlandais voyageant à moto rencontré à Oulan Bator. Puis j'ai débuté la piste à partir de l'oasis d'Ikh-Uul, et traversé la steppe en passant par les villages de Rashaant, Hairhan et Olzit. J'ai ensuite fait une petite halte sur le lac d'Olgi, paradis des oiseaux migrateurs, pour enfin atteindre Kharkorin, ancienne capitale mongole, où je me repose actuellement. J'y ai retrouvé Max et Youna, deux des amis rencontrés à la Gana's guesthouse de Oulan Bator. Eux voyagent à cheval. Et fait la connaissance de 3 autres cyclocampeurs, les « Voyageurs Vagabonds ». La moto et le cheval restent les deux meilleurs moyens de déplacement pour découvrir la Mongolie. Cependant je ne suis pas mécontent d'avoir décidé d'effectuer ce périple à vélo. C'est une expérience unique.

 

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Khatgal J135 Mongolie

La reprise du cyclocampeur

Ecrit le 2 aout 2016 à Khatgal (Mongolie) km 4800

Après un long mois sans pédaler, la reprise s'annonçait poussive … Après ces 15 jours à Séoul/Chuncheon puis ces 15 jours à Oulan Bator, où j'ai passé le plus clair de mon temps à organiser, réparer, prévoir, me renseigner, échafauder des plans, j'étais un peu sorti de mon voyage.

A Oulan Bator, j'avais aussi créé un cercle amical, dans l'intimiste Gana's GuestHouse, une auberge ayant pour particularité de proposer des yourtes en dortoirs plantées directement sur le toit d'un bâtiment. Un lieu de passage et de préparation pour de nombreux voyageurs en quête d'aventure. Je m'y suis laissé bercé par la facilité de la vie et la chaleur des relations. Le défi de reprendre la route était donc aussi de m'extirper de ce petit cocon rassurant, pour me frotter de nouveau au piquant de l'aventure.

 

Après 1 semaine de nouveau sur le chemin, je suis toujours à la recherche de ma condition physique et de mon rythme de croisière. Il faut dire, les conditions de pédalage sont assez difficiles et parsemées de quelques embûches. Tout d'abord, j'ai contracté l'inévitable tourista et ses sympathiques convulsions intestinales. Aussi, la météo est capricieuse et imprévisible : pluie soudaine, vent, grêle, orages, soleil de plomb. Je dois lutter en permanence contre les éléments. Les longues distances sont aussi un facteur épuisant pour le moral : c'est souvent 50-70 km minimum entre deux petits hameaux, avec une étrange sensation de vide entre les deux. La terre y est le plus souvent pelée de ses arbres, et pour trouver de l'ombre, c'est parfois compliqué. Enfin, la présence inopportune d'insectes divers et variés, dont mes amis les moustiques, et celle tout aussi indésirable d'humains sur-alcoolisés et irrespectueux. Bref, en Mongolie, il y a toujours un élément contre lequel je dois combattre, les répits sont rares.

 

Mais ce pays apporte aussi bien sûr son lot de joyeuseté. Le sourire des locaux en est la première. C'est toujours mon carburant pour avancer et éviter les pannes de moral. Je me fais régulièrement encourager par nomades et touristes locaux, et lorsque je m'arrête, j'ai souvent le loisir de papoter - dans la limite de mes capacités linguistiques et de celles de mes interlocuteurs. Les Mongols sont assez curieux, pour mon plus grand plaisir. Par ailleurs, la notion d'espace privé devient un concept quelque peu abstrait.

 

L'autre motivation, c'est la beauté des paysages. Et notamment de ce ciel hors du commun. J'ai tout le temps de l'observer se mouvoir lentement, de le décrypter pour prévoir la météo, de l'admirer dans sa tenue étoilée la nuit venue, d'admirer ses nombreuses nuances de couleurs, ses infinies formes de nuages. Il devient le moteur de mes humeurs, le mojo de mes photos. Il est à la fois mon meilleur allié et mon pire ennemi … Il s'impose de lui-même et c'est tout naturellement qu'il s'approprie une conséquente partie de l'espace de mes pensées et de mes clichés. 

 

Finalement, je réapprends tout doucement à me laisser porter par les événements. Comme cette fois où j'ai accepté de me faire transporter en camionnette pour finalement le soir venu planter ma tente à côté de la yourte de mes convoyeurs. J'ai pu ainsi rentrer dans l'intimité d'une famille de ses éleveurs nomades et comprendre un peu mieux leur (dur) mode de vie. 

 

Depuis Oulan Bator, j'ai pris le 26 juillet un train couchette jusqu'à Erdenet. Et puis j'ai roulé sur une belle route asphaltée (incluant un lift en camion sur plus d'une cent-cinquantaine de kilomètres) en passant par Bulgan, Hutag  Ondor, Moron et enfin Khatgal, où je prends actuellement une pause au bord du lac, un endroit paisible où j'espère enfin récupérer de mes problèmes intestinaux. Cette reprise a été rude, mais stimulante. Je me prépare à aller plus au sud, en passant par la piste. Je n'exclue pas de me faire de nouveau trimballer en camion si l'occasion se présente : les distances sont tellement énormes, je n'aurai de toutes façons pas la possibilité d'effectuer la totalité du trajet prévu par la seule traction de mes cuisses. 

 

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Seoul J120 Corée du Sud

La (non)dynamique du cyclocampeur

Publié le 21 Jul 2016
Catégorie Corée du Sud
Ecrit à Oulan-Bator le 19 juillet 2016

Me voilà à Oulan Bator depuis le 14 juillet, où je suis arrivé en pleine semaine de congés annuels. Ce qui m'a valu la surprise de constater la fermeture des consulats et service d'immigration jusqu'au 18 juillet. C'est donc avec ce petit contre-temps que je peux commencer mon marathon administratif, pour obtenir tout d'abord une prolongation de mon visa mongol jusqu'à la mi-septembre (c'est aujourd'hui fait), et l'obtention du St Graal : le visa chinois. Si tout se passe bien, je pourrais reprendre la route d'ici mardi prochain, le 25 juillet. J'essaye donc de profiter des joies de la capitale mongole, assez sympathique au demeurant quoiqu'un peu chaotique, et de l'ambiance « yourte urbaine » de mon auberge. Je m'y attarderai dans mon prochain article. Pour le moment, je voulais surtout revenir sur la seconde partie de mon expérience coréenne. 
 
C'est que j'y ai pris une vraie leçon d'hospitalité. Je n'avais jamais rien vu de tel auparavant. Que cela soit de la part de mon amie de 12 ans Joy, chez qui j'ai créché une bonne dizaine de jours à Chuncheon, ou mon merveilleux hôte warmshower Jin, qui m'a guidé et choyé pendant une bonne semaine à Seoul, ou bien encore Jeongmi et les autres rencontres de la route, chacun a voulu me montrer le meilleur de sa culture, de sa ville, le tout avec une dévotion et un enthousiasme sans borne. Cela s'est principalement traduit par de nombreux et copieux gueuletons, pour achever de me convaincre de l'excellence de la cuisine locale. Je me suis bien remplumé au passage.
 
Après 3 heureux mois de pédalage au Japon et en Corée, j'avais ressenti l'envie de me poser quelques temps. Comme un besoin d'immobilisme mais aussi et surtout une impérieuse nécessité d'établir un quartier général pour organiser la suite de mon voyage. Après avoir pris la décision de voler en Mongolie, il m'a fallu penser et repenser une bonne partie de ma logistique : changer certaines pièces de vélo (pour usure ou pour m'adapter aux chemins plus cabossés), parer à toutes les éventualités et imprévus que peut représenter le transport d'un vélo par avion, la préparation en amont de papelards pour les visas, ou encore « upgrader » mon équipement dans le but de gagner en autonomie … Cela a été un stress constant, dans un pays dans lequel je ne parle pas la langue et ne connaît pas les codes, les endroits où me ravitailler … Joy et Jin m'ont été d'une aide précieuse, sans eux je serai parti en Mongolie complètement à l'arrache. Alors à mes anges-gardiens du mois : merci infiniment ! Et j'espère sincèrement ne plus à avoir à trimballer mon vélo en avion de nouveau avant mon retour.
 

Cela a donc été une période un peu tendue, un peu bizarre, où je n'ai pas été complètement serein. Cependant, j'ai aussi passé de supers moments. Seoul est une ville bouillonnante, dans laquelle je me suis senti très à l'aise. Même si rien n'y est prévu pour le vélo, il y règne une atmosphère de symbiose entre le moderne et le traditionnel. On y trouve des monuments emblématiques, des restos extra, des endroits branchés pour sortir le soir (Hongdae), des petits quartiers tranquilles loin de la cohue du centre Seoul, des parcs verdoyants et surplombant la ville, des marchés animés et des musées bien fournis. J'ai aussi beaucoup apprécié Chuncheon, ville de taille moyenne lotie entre de verdoyantes montagnes. A seulement 1h30 de transport ferroviaire de Seoul, on y trouve la paix et la nature (ce qui lui vaut d'être assez prisée des touristes locaux). 

 

En fait, je crois que le fait de ne plus avancer chaque jour à vélo m'a retiré une bonne partie de la dynamique de mon voyage. J'écoutais l'autre jour le podcast d'une émission radiophonique française (Le temps d'un bivouac sur France Inter) sur le thème du transsibérien, ce mythique train russe qui relie Moscou à Vladivostok en une semaine. Géraldine Dunbar, l'invité baroudeuse y expliquait qu'après avoir pris le lancinant rythme du train dans la peau, lorsque celui-ci s'arrête, une forme d'angoisse se manifeste … Bref, on a qu'une seule envie, c'est qu'il reparte le plus tôt possible. Cette analyse est tout à fait transposable pour le voyage à vélo ! Il me tarde donc de remonter dans le wagon de la vadrouille et de sentir à nouveau le vent et le soleil me chatouiller les oreilles. De voir les paysages défiler lentement devant mes yeux, de m'exposer aux rencontres, de me sentir sortir de ma zone de confort. Chers usagers-lecteurs, prenez garde à la fermeture automatiques des portes !

 

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Gapyeong J100 Corée du Sud

Le jeu des différences

Ecrit le 23 juin 2016 à Gapyeong (Corée du Sud) – km 4200 (je fête mes 10.000 Kms effectués depuis le départ en Normandie !)

Un jour un grand sage (mon hôte warmshower Stephane de Tokyo) m'avait raconté : commencer mon tour d'Asie par le Japon pouvait comporter un risque, celui de rendre fade le reste de mon voyage. C'est un peu vrai, au Japon j'avais l'impression de rouler au paradis des cyclistes. Je redescends sur terre en Corée du Sud, et du coup je ne peux pas m'empêcher de me prendre au petit jeu des comparaisons entre voisins. En voici quelques une, en vrac ...
 
Niveau cuisine, c'est parfois super épicé ! Les feux rouges et passages piétons sont de nouveau considérés comme des options. Les vitres des voitures sont très souvent teintées en noir, c'est aussi le retour des sempiternels chauffards. La musique dance de mauvaise qualité - à fond les ballons - remplace la douce musique d’ascenseur dans les supermarchés. C'est moins cher, généralement. Les convenient stores (combinis) ne sont plus aussi « convenient ». Il y en a aussi beaucoup moins, le ravitaillement en nourriture se complique un petit peu. Niveau wc, je perds le délicieux jet nettoyant du popotin japonais, mais je gagne une apaisante musique classique d'ambiance. Du coup, je peux me soulager pépère en écoutant du Schubert, déféquer pénard en écoutant du Mozart. 
 
Les coréens sont fondus de vélo. J'emprunte en ce moment une longue piste cyclable de 600-700 bornes qui relie Busan dans le sud à la capitale Séoul dans le nord. Je me frotte à une faune de pédaleurs assez hétéroclite : sportifs de haut-niveau, cyclistes du dimanche, randonneurs occasionnels, vieillards qui ont fait de la petite reine leur moyen de déplacement principal … Cela me fait un point commun avec tous ces gens et m'attire bien souvent leur sympathie. Je note aussi l'usage répandu du vélo-radio. Ils adorent rouler en musique. Je peux donc monter sans vergogne le son de ma petite enceinte portative achetée à Hiroshima. Et rejoins ainsi mélodieusement la grande famille des usagers à deux roues coréens. 
 
Cette voie verte comporte ses avantages et inconvénients. Les mêmes que ceux de l'Eurovélo 6, à vrai dire. Difficile de se motiver pour en sortir et j'imagine que je passe à côté de pas mal de choses. Les infrastructures sont excellentes et les endroits à bivouac nombreux (mention spéciale à ces petites maisons en bois destinées au pic-nic, elle me feront un excellent abri lorsque la saison des pluies commencera). Sortir de ce sentier balisé signifie affronter un trafic parfois dense et se frotter à de gros dénivelés. Ceci dit, même au bord de la rivière, on doit souvent se coltiner des grimpettes à plus de 10 % (voire 15 ou 20 …). Parait-il, c'est la manière « Korean Style » d'appréhender les pentes, et on peut aisément effectuer une analogie avec le développement économique rapide du pays sur ces dernières années … Tout droit, plus vite !
 
Le style coréen, c'est aussi de la gentillesse débordante. Je récolte moins de sourires qu'au Japon, mais plus de petits cadeaux. J'ai même pensé à rebaptiser mon blog avec le titre « Forever Caravane du Tour de France ». Les petits vieux adorent me parler, en coréen, bien sûr, et même si je ne pige rien cela semble faire l'affaire. Car ici rien que les patronymes sont déjà imprononçables, alors une phrase complète … Cependant, c'est toujours avec un grand plaisir que j'apprends ces nouveaux mots-clefs et ces nouvelles habitudes alimentaires. C'est inhérent à la découverte d'une contrée.
 

Le mercure commence à grimper nettement avec des températures dépassant maintenant les 30°C dans l'après-midi. Grosses chaleurs qui n'empêchent cependant pas la coquetterie : j'applique avec un soin quotidien mes crèmes de jour de nuit : protection solaire indice 50 le matin et spray anti-moustique le soir. En définitive, la Corée du Sud m'offre un bref aperçu des menus difficultés qui se présenteront sur ma route asiatique. Sans pour autant perdre de vue mes objectifs principaux : expérimenter la liberté, rencontrer de belles personnes et profiter sereinement de ce que la route a à m'offrir. 

 

Après une traversée en solo depuis Busan jusqu'à Chungju, j'ai goûté à nouveau pendant quelques jours au plaisir du voyage en groupe. Avec mes acolytes Anais et Gilles que j'avais déjà rencontré au Japon sur le Shimanami Kaido (nous avons même pu supporter ensemble nos équipes respectives pour le dernier match de poule de l'Eurocup : France-Suisse) et une neophyte dans le monde du cyclotourisme, Carolina. Avant cela, je n'ai jamais eu le loisir de me sentir seul … Je remercie les Jung, Jay, Dong, Seungha, James et Katie, et les autres sympathiques personnes rencontrées sur le chemin qui m'ont permis de découvrir de la meilleure des manières la chaleur de l'hospitalité coréenne : le plus souvent autour d'un copieux et succulent repas. 
 

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Fukuoka J84 Japon

Cap sur la Corée !

Ecrit le 7 juin 2016 à Fukuoka – km 3566

Le Japon en quelques chiffres

Plus de 2700 km au compteur
Entre 10 et 12 jours de pause (pendant les lesquels je me balade le plus souvent à vélo !)
Une moyenne de 52-54 km par jour
3 cols à plus de 1000 m (dont un à 1500m)
Une route barrée m'occasionnant un rebrousse-chemin (arrivé à 1500 m)

62 nuits :

> 42 nuits en bivouac dans 38 lieux différents - dont 3 terrains de camping gratuit
> 10 nuits chez 6 hôtes warmshower
> 7 nuits chez 4 hôtes couchsurfing
> 3 nuits chez l'habitant, sur 2 invitations (hors réseau d'hospitalité)


0 crevaison (!)
1 chaîne neuve
2 nouvelles paires de freins
1 problème mécanique non résolu


Quelques trous dans ma tente :/ (?)
Une nouvelle espèce de moustiques anthropophages


Et de nombreuses et nombreux :
Belles rencontres, bento box, onsens ... et surtout souvenirs impérissables !




Ces quelques statistiques ne peuvent cependant pas résumer l'expérience qu'a représenté pour moi cette traversée du Japon. J'en rêvais depuis longtemps, cette fois-ci le vécu a dépassé l'imaginaire ... Je suis allé de surprises en découvertes, de découvertes en ravissements. Avec l'Inde, c'est le pays qui m'a procuré le plus grand dépaysement, dans un style tout à fait différent. Alors que le pays du dodelinement de tête me proposait un défi constant passant par une rude mise à l'épreuve des nerfs et un arc-en-ciel d'émotions, le Japon m'a bercé dans sa sécurité (parfois outrancière), la bienveillance désintéressée de ses autochtones et l'harmonie ronronnante entre technologie et tradition. Je me suis peu à peu débarrassé de toute la pression inhérante à la recherche d'un bivouac quotidien en Europe méditerranéenne pour une sérénité absolue, me donnant la possibilité de profiter calmement de chacun des événements de la route. Au Japon, c'est le vélo sans pression. Et je signe tout de suite pour la continuité en Corée du Sud, mon prochain pays étape.


Je quitte donc le Japon avec un petit pincement au cœur, mais avec une excitation certaine de découvrir une nouvelle contrée, une nouvelle culture ! Je retourne cette fois-ci sur le continent, pour un pays présentant toutefois de nouveau un profil insulaire car cerné par les eaux et la Corée du Nord (qui pour le moment n'est guère plus pédalable que la mer de Chine). On dit aussi de ce pays qu'il fait la symbiose entre la Chine et le Japon, dans la mentalité et la cuisine notamment. Je me prépare aussi à affronter la saison des pluies, qui a commencé hier à Fukuoka. Je voulais prolonger de quelques jours mon séjour sur Kuyshu, l'île la plus au sud de l'archipel nippon, mais la météo me dirige tout naturellement vers un débarquement rapide à Busan, qui accueillera ces grosses précipitations annuelles un peu plus tard (en tous cas c'est ce que j'espère).


Ces derniers jours ont été un temps d'intense réflexion sur la suite de mon voyage. Avant ce nouveau départ en mars dernier, j'avais plus ou moins planifié la route jusqu'à Séoul, et me voilà à un peu moins de 800 km de coups de pédales de cet objectif intermédiaire. Beaucoup de facteurs sont à prendre en compte, comme la durée des visas et leur lieu d'obtention (ce qui me pose un problème pour la Chine), la météo asiatique de cette période pas vraiment hospitalière (pluie, fortes chaleurs, typhons), et les modes de transport à employer pour palier aux deux problèmes suscités. Il y aura peut-être un moment où je devrais poser mon vélo quelques temps ... La réflexion est en cours.


Depuis les îles paradisiaques de Shimanami Kaido, j'ai traversé une zone côtière urbanisée pas franchement agréable, autour d'Hiroshima (à un jour près je serrais la main d'Obama qui lui n'a pas fait le chemin en vélo, le fainéant). Avec en "high-light" le mémorial de cette catastrophe nucléaire survenue à l'issu de la seconde guerre mondiale. A vrai dire, ce fut un peu un musée des horreurs didactique, tout y est fait pour qu'on se rende compte progressivement de l'ampleur et l'inutilité de ce crime contre l'humanité. Puis après un repli stratégique dans l'intérieur montagneux et campagnard du pays, j'ai eu les surprises des villages historiques Iwakuni et Tsuwano, de la balnéaire Hagi et de l'atypique plateau d'Akiyoshido. Pelé des sempiternels arbres, on s'y croirait presque en Irlande. Sur ce même plateau j'ai visité une immense grotte, avec de curieuses formations rocheuses. C'est ici aussi que j'ai rencontré la famille de Claire et Yoshi, couple taiwano-japonais qui m'a sympathiquement invité au gîte et au couvert à Fukuoka. Finalement, c'est là-bas dans cette ville portuaire que je vis mes derniers instants nippons, je trouve le repos et me resociabilise grâce au réseau couchsurfing.


 

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Imabari J66 Japon

Le voyageur persévérant

Ecrit à Imabari, le 22 mai 2015 - km 2880

 

La persévérance. Je crois bien que c'est la qualité première du cyclocampeur. S'il n'en a pas, il l'apprend, et s'il l'a déjà, et bien on peut dire que cette forme de voyage lui sied parfaitement. Les distances d'un de ces longs périples à vélo peuvent sembler interminables au regard d'une mappemonde. Mais le baroudeur pédaleur, lui, sait qu'à la force de ses cuisses il pourrait rejoindre n'importe quelle destination. En prenant son temps. Il ne s'agit pas ici de visiter un maximum de spots touristiques, ni de cocher triomphalement les cases d'une hypothétique « to do list », mais plutôt de se focaliser sur un objectif, et d'apprécier à leur juste valeur chacun des kilomètres qui le séparent de celui-ci. Avec plaisir, opiniâtreté et endurance. Apprendre à ne pas obtenir tout, tout de suite. De la persévérance, il m'en faudra donc pour atteindre mon but final, Bangkok. 

 

Je fais donc de mon mieux d'ici là pour célébrer chaque portion de mon chemin. De m'attarder sur certains détails, d'essayer de sauvegarder mon esprit contemplatif. Les ultimes kilomètres me donnent matière à cela. Shikoku, l'une des 4 îles majeures de l'archipel nippon, me procure beaucoup de joie dans les paysages, le bestiaire et les efforts consentis pour les mériter. Depuis Kyoto, je traversais une longue zone urbanisée, plate, qui m'a redonné les forces physiques et l'envie de me replonger dans quelques reliefs montagneux. Les hauteurs modestes de la vallée d'Iya et des gorges avoisinantes ont été ce sain détour. 

 

 

Mais la ville n'a pas démérité pour autant, car elle m'a donné l'opportunité de mieux comprendre la culture japonaise. Avec Osaka la tentaculaire (merci Maasa pour le couchsurfing), Kobe la balnéaire et Nara et ses sympathiques daims en liberté (et un super warmshower chez Tiphaine et Tristan). Sans oublier l'île d'Awaji, qui m'a offert une belle route côtière et un idéal bivouac en bord de mer. Après Shikoku, cela a encore été une affaire d'îles … Il faut dire qu'au Japon il pourrait difficilement en être autrement. J'ai trouvé le repos et fait quelques rencontres sympas sur le petit archipel de Shimanami situé entre Imabari et Onomichi, une chouette halte avec des airs de Caraïbes, en empruntant une idyllique voie vélo traversant de nombreux ponts.

 

Avec le retour des températures estivales, je redécouvre le plaisir du bivouac facile. Je n'ai plus la pression d'absolument armer la tente avant le coucher du soleil, car je peux m'attarder la nuit sans pour autant commencer à me geler les orteils. Ajouté à cela, trouver un spot de camping au Japon est une mission des plus aisées, car si l'on veille à ne gêner personne, on vous laissera tranquille. Au contraire, ce sera sous le regard surpris voire amusé des curieux promeneurs de l'aube que l'on se réveillera et pliera son paquetage. Cela m'ouvre la porte au campement dans les parcs publics, les aires de repos, et toute sorte d'endroits dans lesquels je n'aurai pas osé planter le piquet dans la plupart des pays d'Europe.

 

Le Japon, c'est aussi le pays de la musique d'ascenseur. J'avais déjà mentionné le fait qu'ici tout se fait en musique. J'avais apprécié ces petits jingles amusants pour signifier qu'une tâche était finie, comme récupérer l'argent dans le DAB, le changement du feu rouge au vert piétonnier, le marquage des heures clés de la journée (midi, 17h ou 18h) … On vit ici au rythme de ces petites mélodies. Au départ, je m'étais aussi pris de sympathie pour ces musiques de salle d'attente un peu ringardes qui sévissent dans tous les supermarchés, combinis et autres lieux publics. Jusqu'à ce que je me rende compte que ce sont les même titres qui passent partout en boucle … Je soupçonne même l'objet du crime d'être un seul et même album, une sorte de best-seller de la musique d'ambiance, composé de reprises de U2 à la clarinette ou du dernier tube de Taylor Swift façon Jean-Michel Jarre. Un véritable cauchemar pour les nerfs. Ah, les pauvres employés qui doivent endurer ce châtiment quotidien !

 

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Kyoto J54 Japon

Le Japon des samouraïs

Ecrit le 8 mai 2016 à Kyoto - km 2200

Ma première rencontre avec la civilisation nipponne il y a un mois de ça, fut de nuit en sortant de l'aéroport l'un de ses petits magasins que les locaux appellent "konbinis", abbréviation japonisante de l'anglais "convienent store", en français épicerie. En fait, le konbini, c'est bien plus que cela. Pour le cyclocampeur, c'est le lieu de ravitaillement ultime. On y trouve de tout : de l'eau chaude, de l'eau froide, des toilettes (propres), de l'électricité, des distributeurs automatiques de billets (les seuls qui acceptent les cartes étrangères avec ceux de la Poste) ... et de la nourriture bien sûr ! Les fameux bentos offre pour moins de 5 euros un plateau-repas équilibré, varié et délicieux. Un véritable bonheur quotidien. Et surtout, c'est le seul et unique endroit où je peux déposer mon petit sac de détritus du jour, car bizarrement, au Japon, on croule sous les emballages, mais il n'y a pas de poubelles publiques. Pour moi, c'est un hommage aux valeurs du pays, pour sa propreté, son côté pratique ("convenient", donc) et pour la politesse et délicatesse de ses employés. 
 

Entre 2 conbinis j'entame ma troisième vague de découverte, placée sous le signe de l'apprentissage. Elle est intimement associée aux rencontres, que je fais notamment via les réseaux d'hospitalité Warmshower et Couchsurfing. C'est par ce biais que j'en apprends chaque jour plus sur la culture autochtone, sur les bonnes manières à adopter (merci Patrice de Nagoya), sur l'histoire du pays, sur les coutumes et les aspects pratiques de la vie quotidienne (merci Gilles de Gifu).

 

Depuis Matsumoto, j'ai eu l'occasion de m'immerger dans le Japon de l'époque des samourais. Tout d'abord en visitant (de près ou de loin) des chateaux chargés d'Histoire (Nagoya, Mastumoto, Itayama, Gifu), puis en traversant des petits villages traditionnels avec ses temples et maisonettes faites de bois foncé (Narai-juku, Tsumago-juku, Magome-juku, Samegai-juku ...). Ce sont les petites routes et les itinéraires bis qui m'ont révélé toutes ces merveilles. Dès que j'en ai l'occasion, je m'éloigne de la route principale, et ceci est possible depuis que je suis sorti des chaussées de montagne.

 

Après, ce ne fut pas la période idéale pour la fréquentation des lieux touristiques, car ici, c'est la "Golden week", semaine où la plupart des employés sont en congés. La visite de leur propre pays reste un must pour la plupart d'entre eux. C'est à dire, à ce moment de l'année, un village pittoresque isolé peut aisément se transformer en Disneyland un week-end de la toussaint. Mais bon, je fais avec, et de bon coeur, car cela me donne moultes occasions de tailler la bavette avec le chalant et de récolter une belle moisson de sourires. Finalement, en déambulant avec mon vélo chargé, la principale attraction touristique, j'ai parfois l'impression que c'est moi !

 

Mes sensations de cycliste s'affinent, mes cuisses se durcissent, ces nombreux dénivélés m'ont forgé une excellente condition physique et la plupart des douleurs de position appartiennent (presque) désormais au passé. J'ai une santé de fer, mais le plus important dans un voyage au long cours, c'est d'avoir un moral d'acier. J'ai passé le cap de ces 2 mois sur la route avec quelques accents nostalgiques des moments passés avec amis et famille. Rien de plus normal, après tout. Ce qui ne change pas par contre, c'est ce bonheur intense que me procure ces premiers coups de pédales matinaux, après une ou deux journées de pause. A ce moment, j'oublie tout, mon esprit vagabonde puis se réjouit à l'idée de partir encore une fois à la découverte de l'inconnu.

 

Je ne pouvais pas mieux terminer cette portion de parcours qu'en passant par Kyoto. Tout ce que j'ai vu clairsemé depuis Matsumoto est dans cette capitale culturelle ici concentré : temples bouddhistes, temples shintoïstes et autres monuments emblématiques, cahutes traditionnelles en bois, quartiers historiques, parcs zen et verdoyant ...  le tout saupoudré par une belle ribambelle de japonaises qui se parent de leur plus beau kimono pour arpenter les rues. Kyoto, c'est cool. Et c'était un petit challenge pour moi d'y passer 3 jours en mode camping urbain. Pari réussi et même une belle option pour l'avenir, la liberté de circuler à vélo et de choisir son lieu de bivouac en ville donne une indépendance et et autonomie accrue !

 

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Matsumoto J44 Japon

L'adaptation du cyclocampeur

Ecrit le 26-04-16 à Matsumoto - km 1665

Ma découverte du Japon procède par vagues ...Si la première a été celle de l'émerveillement (vague qui n'est pas encore retombée), la seconde serait celle de l'adaptation. Par exemple, il m'est assez compliqué de trouver ce que je recherche en général. Des choses simples (en théorie) ! Tout d'abord parce que les produits ne sont pas tout à fait les mêmes, ensuite parce que c'est impossible pour moi de déchiffrer les kanjis et enfin, par le déficit de communication. A l'instar de mes compatriotes, les japonais semblent délaisser la langue de l'empire, de manière assez répandue. Je ne vais pas les blâmer, bien au contraire, mais cette langue d'habitude si pratique pour la communication qu'est l'anglais ne trouve ici que guère quelques pratiquants rôdés et réguliers. Alors je cherche, je fouille les magasins, et le plus souvent je sors bredouille ... 

 

S'il n'y a une chose que je ne découvre plus, c'est bien la gentillesse des locaux. Ils ont toujours un petit mot sympa pour moi (enfin c'est que je suppose), des encouragements (Gambate !) ou des expressions d'admiration (de l'effort physique je présume, on demande souvent à voir mes cuisses). Parfois, je me fais ravitailler tel un coureur du Tour de France. La caravane locale m'a déjà provisionné en biscuits, café, caramels et même serviette de toilettes. Je dois avoir des airs de Laurent Jalabert. 

 

J'apprécie aussi tout le réconfort et l'hygiène que me procurent les « onsens ». On y vient pour profiter des sources thermales, d'une bonne douche revigorante et d'un endroit pour se reposer. Un véritable oasis pour le cyclocampeur. Si je ne trouve aucun camping sur ma route (encore un autre mystère), je peux au moins sauvegarder une certaine fraîcheur et propreté. 

 

Une des motivations pour laquelle j'avais attaqué la montagne, c'était aussi pour continuer à voir éclore les fameux et splendides « sakuras » (cerisiers du Japon). L'altitude décale leur période de floraison. Alors qu'à Tokyo on voyait déjà tomber les derniers pétales, à Nikko, 800 m d'altitude, ils venaient tout juste d'ouvrir leur premiers bourgeons. Un vrai enchantement. Mais à partir de 1300-1500 m, les paysages semblent ne pas être encore sortis de la torpeur de l'hiver. Au point que  je me suis retrouvé confronté à une route coupée. Un barrage saisonnier. Et oui, au Japon à ce moment de l'année, la plupart des chaussées de haute-montagne (les cols à plus de 2000 m) sont encore recouverts de neige ! Et il faudra attendre le déblaiement de ceux-ci pour pouvoir à nouveau les emprunter. Je suis arrivé trop tôt dans les Alpes japonaises, à contre-coeur j'ai du faire demi-tour et reconsidérer mon itinéraire … Quand je mentionnais la difficulté d'obtenir une information ;)

 

Ce rebrousse-chemin m'a tout de même permis de comtempler des paysages magnifiques, et ce site inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco, le temple shintoiste de Toshogu, à Nikko. Et puis j'ai fait étape dans un village-onsen, Kutsasu, et pu profiter d'une source d'eau chaude acide en plein air. J'ai traversé un haut-plateau, et visité le temple Zenko-ji à Nagano, où j'ai pu assister à une célébration religieuse. Enfin, je fais étape dans cette ville lovée entre deux massifs montagneux, Matsumoto, célèbre pour son château. C'est aussi mon premier hôte couchsurfing depuis Tokyo. Cette partie du périple se révèle donc très physique (je ne compte plus les dénivelés journaliers encaissés par mes pauvres cuisses endolories), mais pas avare en découvertes !

 

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Tokyo J30 Japon

A la découverte du Japon

Ecrit le 12-04-16 à Tokyo (Japon) – km 1000

L'adage dit que pour voyager, il faut garder son âme d'enfant, pour rester ouvert et émerveillé face aux découvertes faites en chemin. En arrivant au Japon, c'est le contraire qui se produit, c'est le voyage qui me procure cette rafraîchissante cure de jouvence ! Je me replonge dans les séries animés de mon enfance, celle du Club Dorothée, et constate à quel point cette émission a œuvré pour rapprocher les français de ma génération et la culture japonaise. Je retrouve des éléments d'Olive et Tom par ici, d'autres de "Juliette je t'aime" par là ... De tous ces mangas animés qui traitaient de la vie quotidienne des nippons.

 

Et puis, toutes ces nouveautés ! Je suis le plus souvent étonné et fasciné par mes incessantes trouvailles. Par exemple, pour traiter les soucis de la vie quotidienne, ce pays a parfois opté pour des solutions bien différentes des nôtres. En général, c'est très fonctionnel et bien pensé, et fait appel à la technologie dernier cri. Les choses simples comme aller au restaurant ou faire la cuisine, aller aux toilettes ou prendre sa douche sont le plus souvent sujet à quelques interrogations assez cocasses. Cela relève même du rite initiatique !

 

La nourriture de l'archipel me dévoile aussi tous ses mystères dans la joie des papilles gustatives. Je ne vais pas le cacher, j'aadoore les sushis ;) Et puis tout le reste aussi : ramen, sashimis, rouleaux de printemps, tempura, soba, korokke, gyoza, et autres brochettes ... Tout est délicieux ! C'est un régal quotidien, et il me reste encore pas mal à découvrir. De plus, c'est assez facile de choisir son plat, car généralement les appellations nominatives de chacun des plats sont accompagnées des photos correspondantes dans les menus.

 

Cette iconographie se voit aussi transposée dans la rue. Je pensais avoir du mal à m'en sortir avec les kanjis (signes de l'alphabet japonais), mais la plupart des signalisations sont accompagnées d'idéogrammes assez didactiques. On verra si ce sera toujours le cas en dehors de Tokyo, mais pour le moment, j'apprécie ce sens de l'organisation pointu.

 

Leur sens du détail, aussi. Comme donner délicatement et avec considération (c'est à dire en le tenant avec les deux mains) un simple ticket de caisse, les petites musiques qui accompagnent la fermeture des parc et des magasins, et les jingles amusants des distributeurs automatiques. Je suis enthousiasmé par toutes ces petites choses qui rendent l'ordinaire plus agréable et harmonieux. 

 

Si Tokyo est une ville tentaculaire, il est par contre très aisé de s'y déplacer à vélo. Tout y est pensé pour faciliter la vie du cycliste. Les transports en commun, si je n'ai pas eu encore à les utiliser, semblent fonctionner à merveille. Du coup, on n'a pas cette impression de compression propre au chaos du trafic routier de certaines autres grandes métropoles, comme j'ai pu le ressentir par exemple à Athènes ou Istanbul. De nuit comme de jour, c'est un plaisir de parcourir à pédales la capitale nippone, à condition d'avoir en sa possession une bonne carte et un bon sens de l'orientation (ou un GPS bien à jour) !

 

Bien sûr, il y a quelques bizarreries et illogisme. Comme l'absence de poubelles publiques et l'impossibilité de parquer son vélo aisément (avec menace réelle de fourrière … tellement incompréhensible que personne ne respecte cette interdiction). Il y a aussi ces pachenkos, sorte de casino manga ultra bondés, où les addicts au «gambling» dépensent leur argent dans une atmosphère enfumée et un vacarme assourdissant. Je pourrais mentionner aussi ces micro-bars qui peuvent contenir jusqu'à 4-5 personnes maximum. Dans ces derniers, on a l'impression que le barman nous fait rentrer dans son intimité, et que les clients sont en fait les potes de toujours. 

 

Vraiment, le Japon n'a pas fini de me surprendre, et m'offre de bien belles promesses de voyage. Je fais aussi d'agréables rencontres. Chacune d'entre elle me donne l'occasion de constater la gentillesse et l'hospitalité des autochtones, qui mettent un point d'honneur à m'expliquer aimablement les particularités de leur culture. Je remercie particulièrement Kana de m'avoir si gentiment aider et guider à travers la ville, et ses adorables parents de m'avoir accueilli à bras ouvert (dans leur maison à l'architecture typiquement locale) ! Ma première impression générale des japonais est celle d'une population respectueuse de l'espace vital de chacun, et qui pour autant ne se laisse pas tomber dans une indifférence blasée. 

 

Je suis arrivé dans la soirée du 6 juin à l'aéroport de Naruta, à 70 km de Tokyo. J'ai ensuite remonté mon vélo sur place et passé la première nuit dans la nature, complètement « jetlagué ». J'ai ensuite été accueilli par 3 hôtes warmshower différents, pour 5 nuits au total (Merci Yoshi, Stéphane et Makiko, Akira). J'ai encore eu un sacré coup de chance, car je suis arrivé pile poil pour la semaine de floraison des sakuras (cerisier à fleurs), période pendant laquelle les habitants de l'archipel fêtent l'arrivée du printemps. C'est magnifique et je ne pouvais rêver mieux ! Après escale chez les parents de Kana, donc, me voilà reparti en direction des Alpes japonaises. Au programme, températures fraîches et plusieurs cols pouvant aller jusqu'à 2250 m. C'est un défi physique que je m'impose là, surtout chargé comme je suis, mais je voudrais connaître le Japon de l'intérieur, après avoir connu les extravagances de Tokyo. 

 

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Souvenir

Que me reste-t-il de l'Inde ?

Publié le 12 Oct 2014
Catégorie Inde

Que me reste-t-il de l'Inde ? 

Avant de partir là-bas, j'avais entendu toutes sortes d'histoires, assez négatives dans l'ensemble. J'en avais déduit que les amoureux du pays se gardaient pour eux leurs bonnes expériences, un peu comme un trésor inviolable. Ou tout simplement qu'ils n'arrivaient à trouver les mots justes pour retranscrire leur vécu. En réalité, c'est un peu des deux. C'est aussi tellement plus facile de critiquer et, c'est vrai, on peut disserter des heures sur tout ce qui ne va pas en Inde, la saleté, la promiscuité, le droit des femmes, etc … 

 

On m'avait dit aussi, «  tu vas voir, l'Inde, tu adores ou tu détestes ». Pas de nuance possible. Je m'imaginais alors quitter ce pays avec une opinion bien tranchée. La réalité est bien plus complexe, en effet, s'il n'y a pas de nuance possible dans les sentiments, je ne m'attendais pas à savourer et maudire d'une demi seconde à l'autre, ou même simultanément ! Il s'agit ici bien d'une opposition permanente amour/haine, faisant de ce pays un sujet curieux et passionnant, dont on a envie de saisir le secret (qui semble s'échapper à chaque fois qu'on pense en avoir trouvé la clef). Ce qui reste immuable en revanche, c'est la certitude d'être acteur ou spectateur d'un événement imprévu dès lors qu'on franchit la porte de sa chambre. En Inde, l'aventure est au coin de la rue !
 

Aujourd'hui, je peux assurément vous dire que j'ai aimé l'Inde. Et avec le recul, j'ai même très envie d'y retourner ! Ce qui n'a pas vraiment été le cas juste après mon retour. J'étais même été heureux d'échapper à ce que je considérais alors comme un entonnoir, cette circulation et chaleur infernales, ce chaos oppressant, le bruit incessant des klaxons … Ma première impression en remettant les pieds à Paris, a été celle de revenir dans un petit village paisible, où l'on pouvait apprécier la nature et ses délices. 
 

Ce qui me manque le plus de l'Inde, après ces 4 mois passés en France, c'est finalement ce qui m'avait le plus fatigué pendant mon séjour là-bas : le fait d'avoir en permanence les sens en alerte. Pour me prémunir d'un danger, pour traquer la bonne photo, pour identifier une odeur agréable et inconnue, pour interagir avec les très sociables et causants indiens … Le tout sans aucune once d'agressivité ! C'est un peu compliqué à expliquer : si là-bas l'environnement du quotidien peut se montrer fort hostile, tout le monde garde son calme. Même si on t'embarque dans une histoire louche, ce sera toujours avec sourire, joie et volupté (et un hochement de tête caractéristique). C'est assez déconcertant. J'admire leur capacité à encaisser sans s'énerver, à relativiser en toute circonstance, leur pacifisme. 

 

Et c'est peut-être ça, en définitif, ce qui me reste de l'Inde. Une capacité nouvelle à relativiser les événements. Au quotidien, c'est une recette pas si simple à mettre en œuvre, car on est vite happé par l'agressivité ambiante. Parfois, je me surprends à m'énerver au volant, et puis, je me souviens la manière indienne de gérer la situation … 

J'en conserve aussi de précieux souvenirs, matérialisés par quelques photos dont je vous propose une petite sélection. Namaste !
 

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Rishikesh > France

Retour au bercail

Publié le 18 Jun 2014
Catégorie Inde
Dernières couleurs, derniers sourires, derniers klaxons, je quitte mon Inde l'esprit léger et avec la certitude que j'y reviendrai un jour. Un pays aussi grand, varié et mystérieux mérite bien plus que 4 mois d'exploration ! Rishikesh aura été pour moi un lieu de grande réflexion, où j'aurai pu peser et repeser tous les arguments en faveur ou contre ce retour en terre natale. 
 
Finalement, j'ai décidé de venir me ressourcer dans mon pays, afin de reprendre plus tard la route dans de meilleures conditions. Je ne me prends pas la tête, on verra bien comment cela se passera, j'essaie de me concentrer sur le présent, de me soigner sérieusement, le reste suivra naturellement.
 
Bientôt viendra le temps du bilan (dans un prochain article), mais pour le moment je voulais juste remercier tous les gens formidables que j'ai croisés sur mon chemin, qui ont fait de cette vadrouille un trip mémorable. Des personnes avec qui j'ai pu confronter les points de vue, ou simplement découvrir. Des amitiés durables ou des compagnons de route. Car c'est cela aussi le voyage, les rencontres !
 
C'est aussi l'occasion pour moi de partager mes dernières images de Rishikesh ...
 
Une chose est sûre, il me tarde de reprendre mes pérégrinations. A bientôt donc pour de nouvelles aventures !

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Rishikesh

Une étape supplémentaire

Publié le 2 Jun 2014
Catégorie Inde

J'ai donc pris ma décision : le 12 juin, je rentre en France. Ce n'est qu'une étape supplémentaire, non prévue, qui s'impose comme le meilleur des choix pour gérer la suite de mon tour du monde. Ce sera l'affaire de quelques mois, histoire de me retaper la cheville, pour ensuite repartir (si j'ose dire) du bon pied. Ce qui a dirigé mon choix : une intuition, une foule de petits signes, et la volonté d'écouter mon corps plutôt que de lui dicter ma loi.
 

Ces premiers mois en Inde ont été déterminants dans ce processus de décision. J'y ai appris moultes choses qui vont me permettre de mieux appréhender le reste du périple. Cette patience qui m'a beaucoup manqué avant ce premier départ, je l'ai retrouvé ici. Et c'est avec cette qualité nouvelle que je vais tout mettre en œuvre pour tailler la route de nouveau en pleine possession de mes moyens. Je n'ai aucun regret, bien au contraire.
 


Je suis toujours à Rishikesh, ce qui me donne l'occasion de vous parler brièvement des deux autres quartiers que je fréquente quasiment tous les jours. Complètement différents de mon Laxman Jhula et de son côté tourisme occidental très marqué.
 

A quelques coups de pédales de là, Ram Jhula est un autre petit district beaucoup plus fréquenté par les touristes indiens. On y trouve de nombreux ashrams, sortes de maxi-guesthouses religieuses avec jardin où l'on peut pratiquer le yoga et s'adonner quotidiennement à la méditation (pour ceux qui sont bien dans le trip ou ceux qui n'ont pas peur de s'ennuyer). J'adore aller sur le Parmath Ghât vers les 6 heures du soir, lors de la cérémonie de l'Aarti. L'ambiance y est très relax et spirituelle, et c'est toujours intéressant de voir comment les indiens manifestent leur ferveur religieuse.
 


Le marché de Rishikesh, plus loin dans le centre-ville, me donne l'occasion de me replonger dans un univers plus réalistiquement local : c'est à dire dans un trafic sauvage et un vacarme assourdissant de klaxons (ceci dit mon quartier Laxman Jhula n'est pas en reste à ce niveau là) … Mais quel plaisir de déambuler dans ces rues et de recevoir ces sourires en pagailles ... Et cette bonne humeur si communicative ! En Inde, l'aventure est au bout de la rue.
 

 

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Rishikesh

Là où le temps s'est arrêté

Le temps s'est arrêté pour moi à Rishikesh, Laxman Jhula. Je ne sais pas comment je me suis retrouvé bloqué ici, mais il y a quelque chose de particulier dans cet endroit qui retient les gens de passage. Quand je suis arrivé ici il y a presque un mois, je ne comprenais pas pourquoi une majorité de voyageurs y restaient collés pendant des semaines (voire des mois). J'y voyais surtout un endroit parfait pour y reposer ma cheville. En fait, ça arrive assez souvent ici, de voir des transiteurs pressés finalement poser leurs valises à long terme dans une des nombreuses guesthouses ou hôtels du coin.
 

Je vois plusieurs raisons. Ici, il est proposé de nombreux cours qui en général durent plusieurs jours, voire plusieurs semaines. Il y a du Yoga (qui a été inventé ici même), du Reiki (thérapie des énergies), des cours de massages ayurvédique, de musique, ect … Et pour ceux qui ne veulent rien faire, la bouffe est acceptable et la promiscuité de l'endroit permet à toute la colonie d'occidentaux de forger des relations d'amitié assez facilement, de se créer un petit cocon rassurant, protégeant de la réalité habituelle de la rue indienne. On s'y sent bien, on s'y repose. Et puis il y a le Gange, imposant sa force tranquille. On peut même s'y baigner ! Quand le temps s'y prête, je ne me soustrais jamais à mes deux trempettes quotidiennes. J'ai juste à descendre quelques marches depuis mon hôtel. En fait, Rishikesh, c'est un peu comme le club Med. Un îlot occidental en terre indienne.
 

Les températures ne sont plus si clémentes, la chaleur accable les voyageurs qui s'en vont vers d'autres cieux. Les grands attroupements musicaux hippies d'il y a deux semaines ne sont plus qu'un lointain souvenir et les ghâts sont maintenant presque déserts du matin au soir. C'est l'appel du nord, et pour la grande majorité des membres de la « tribu Laxman Jhula », Daremsala est la prochaine étape visée. Il existe une route typique que beaucoup de voyageurs au long cours en Inde empruntent sans grande variation. Ils passent l'hiver à Goa, et puis quand le mercure y monte la migration se fait progressivement vers le nord, dans des villes comme Pushkar ou Varanasi, pour ensuite passer par Rishikesh et enfin Daremsala. C'est un cycle aussi régulier que celui des saisons. Comme s'ils essayaient de conserver ce cocon dont je parlais précédemment, pour recréer loin de leur terre natale des relations comparables à celle d'une famille.
 
Côté visite, j'ai pu découvrir le ashram où les Beatles avaient effectué leur retraite spirituelle en 1968. C'est maintenant une place abandonnée à la végétation depuis les années 90, le guru Maharishi ayant eu maille à partir avec le gouvernement de l'époque. Un lieu de pèlerinage pour les fans mais aussi une visite intéressante, le site est assez grand et c'est presque avec le sentiment de fouler une terre défendue qu'on parcourt les différents bâtiments de cet ancien espace de méditation médiatique.

Le Sri Neelkantha Mahadeva Temple, dédié au culte de Shiva, est situé dans un petit village perdu au beau milieu des montagnes. J'y ai rencontré un baba russe, qui a tout abandonné de son ancienne existence pour une vie simple et rudimentaire, sur la route, comptant sur la générosité des personnes qu'il croise. Assez singulier, il avait vraiment ce regard indéfinissable qu'ont les babas indiens, mais se faisait trahir par sa peau blanche et ses yeux bleus. Et par un fort accent slave ...
 
Il m'est aussi arrivé une sacré expérience. J'ai accompagné pendant quelques jours une amie dans un hôpital à la suite d'une méchante crise d'épilepsie. Elle est restée inconsciente une bonne demi-journée, et j'ai essayé de veiller sur elle tout en réglant quelques détails de paperasserie : je me suis souvent heurté de fait au mur de l'administration indienne, un mélange d'incompétence et d'inefficacité, un capharnaüm sans queue ni tête. On est aussi bien loin des standards d'hygiène européens, même si l'on m'a assuré que cet établissement était plutôt un bon élève en la matière. Par contre, j'ai apprécié la sympathie et le sérieux du personnel médical. Un modèle d'humanité et de compréhension. Encore une fois en Inde, le pire et le meilleur se côtoient quotidiennement. 
 
A l'heure actuelle, je suis encore à Rishikesh. Je ne sais pas encore pour combien de temps. Une fois en bonne santé j'aimerai m'en échapper. Pour le moment, je savoure le farniente, fais de belles rencontres et réfléchis à différentes options géographiques possibles pour la suite de mon voyage.  Affaire à suivre ...
 

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Haridwar

En amont du Gange

Bien en amont du Gange et de Varanasi, tout prêt de l'Himalaya, les rituels sont toujours immuables dans cet autre ville sainte : baignade dans le fleuve, Aarti (cérémonie religieuse pyrotechnique, voire vidéo) et Puja (bénédiction des curés locaux, les brahmanes). A noter quelques différences : l'eau y est beaucoup plus propre, l'atmosphère plus détendue et saine. Enfin, on s'y repère nettement plus facilement. Cette petite ville est organisée autour du fleuve, à partir du ghât principal, le Har-ki-Pairi. Autour rayonnent des centaines de boutiques dédiées à la vente des mêmes produits : articles pour la Puja et l'Aarti, textiles bas de gamme et nourriture. La concurrence est rude ou le business bien juteux ...
 

J'ai atterri là-bas pendant la célébration de la nouvelle année indienne. Ce passage à 2014 donne l'occasion aux milliers de touristes autochtones de passer un bon moment en famille et de venir visiter la région. Pendent ces 4 jours, je n'y ai pas croisé d'occidentaux. Ils sont tous à Rishikesh. Les sourires sont fréquents, et la curiosité des indiens est telle que je multiplie les brèves discussions. Je me prête aussi volontiers au jeu de la photo : comme moi aussi je ne me gêne pas pour leur tirer le portrait, c'est un peu du donnant-donnant. 
 

Au niveau de la marche, cela a été assez compliqué pour moi. Avec un périmètre d'action très limité, j'ai tout de même essayer de cueillir l'ambiance du coin. Bien difficile d'explorer et de réaliser les photos que je veux dans cette situation, mais j'ai essayé de profiter au mieux des mes petites sorties. Affaire à suivre ...
 

Bonus vidéo : la chanson officielle des Aarti qui passe en boucle sur les ghâts pendant la cérémonie. Le tube religieux de l'été. Sur la vidéo, c'est à Har-ki-Pairi. D'ailleurs, elle est assez bien réalisée, et donne une très bonne idée de l'ambiance.
 
 

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Varanasi

Vivre et mourir à Varanasi

Publié le 18 Apr 2014
Catégorie Inde
Beauté, puissance et décadence. Varanasi. 3 simples mots qui caractérisent cette ville brûlante et enveloppante. Ce serait comme une symbiose de ferveur religieuse et de force noire. Ici, on consume ses morts à ciel ouvert, dans un espace dédié, au bord du Gange. Les cendres sont versées dans le fleuve. Les cadavres considérés comme purs (femmes enceintes, enfants, victimes de morsure de cobra, ect …) y sont jetés tels quels. Le reflet des flammes des bûchers sur les murs recouverts de suie donnent à cet endroit un air d'enfer sur Terre. Des âmes malignes s'y épanouissent, shootées du matin au soir et essayant d'extorquer les touristes de passage. Rien qui ne puisse entraver le recueil des familles des défunts, tout en retenue, tout en dignité. Les femmes ne sont pas autorisées à participer à la cérémonie. Explication locale : elles pleurent. Et ici, on ne tolère pas les effusions émotionnelles en public. Cependant, mourir et se faire incinérer à Benares est considéré comme un privilège : le cercle des réincarnations est ainsi rompu, le nirvana atteint à coup sûr.
 

On ne peut pas réduire Varanasi à ses ghâts de crémation. Le Gange, c'est aussi la vie, la baignade matinale, les bénédictions rituelles. Son eau est considérée comme sacrée et pure par les Hindous, on lui confère même des vertus médicinales. En vérité, même si je la trouve moins polluée que la Seine, je n'y mettrai pas non plus mes pieds. Il existe en Inde un réel débat concernant la pollution de cette portion du fleuve. De nombreux scientifiques se sont penchés sur la capacité hors-norme de régénération de cette eau : ils y ont découvert un taux de bactéries 100 à 1000 fois plus important que dans une banale rivière. Le dépolluer comporterait un risque de destruction de cet équilibre bactériologique. 
 

Derrière ces ghâts, commence la ville ancienne, qui fait tampon entre les bords du Gange et la ville nouvelle. Elle agit comme un filtre qui retient camions voitures et motorickshaws loin de cet espace fluvial, lui donnant un air de bord de plage, apaisant. Restent les gens, les motos et leur klaxons, et les vaches, les innombrables et bien portantes vaches qui font leur ordinaire des immondices jonchant le sol. Dans le dédale des rues, on se perd, on se retrouve, c'est ce qui donne à Varanasi ce charme de petit village quand on commence à y prendre des repères. 
 

J'ai passé 12 jours ici, et j'aurai pu y rester plus longtemps, sans m'en rendre compte, si je n'avais pas eu à revenir à Delhi (avec grand plaisir) pour l'anniversaire de mon ami Vivien. Car on se laisse facilement happer par cette atmosphère ronronnante : chaque jour ressemble au précédent, avec un petit rituel, immuable, réconfortant et faisant oublier le temps qui passe. Debout 5h30 pour observer la vie matinale sur les ghâts, petit dej avec les amis du jour, sieste puis repromenade, parfois. Entre midi et 16h, inutile de planifier, à cause de la chaleur … Bref, Varanasi, c'est la ville idéale pour flâner.  
 

J'ai fait un petit bout de chemin depuis, j'ai célébré des 34 ans à Delhi, puis fait un bref séjour à Haridwar, pendant un festival religieux hindou. Intéressante immersion dans la vie indienne. Ma cheville passe par des épisodes assez douloureux. Je dois impérativement baisser la cadence, qui n'était pourtant pas très élevée. Le voyage prend un côté plus contemplatif qu'aventureux. Je m'adapte. A Rishikesh, où je viens de poser mon sac, j'espère trouver le repos dont j'ai absolument besoin. Le coin me paraît propice à cet exercice, et c'est tant mieux.
 

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