Imabari J66 Japon

Le voyageur persévérant

Ecrit à Imabari, le 22 mai 2015 - km 2880

 

La persévérance. Je crois bien que c'est la qualité première du cyclocampeur. S'il n'en a pas, il l'apprend, et s'il l'a déjà, et bien on peut dire que cette forme de voyage lui sied parfaitement. Les distances d'un de ces longs périples à vélo peuvent sembler interminables au regard d'une mappemonde. Mais le baroudeur pédaleur, lui, sait qu'à la force de ses cuisses il pourrait rejoindre n'importe quelle destination. En prenant son temps. Il ne s'agit pas ici de visiter un maximum de spots touristiques, ni de cocher triomphalement les cases d'une hypothétique « to do list », mais plutôt de se focaliser sur un objectif, et d'apprécier à leur juste valeur chacun des kilomètres qui le séparent de celui-ci. Avec plaisir, opiniâtreté et endurance. Apprendre à ne pas obtenir tout, tout de suite. De la persévérance, il m'en faudra donc pour atteindre mon but final, Bangkok. 

 

Je fais donc de mon mieux d'ici là pour célébrer chaque portion de mon chemin. De m'attarder sur certains détails, d'essayer de sauvegarder mon esprit contemplatif. Les ultimes kilomètres me donnent matière à cela. Shikoku, l'une des 4 îles majeures de l'archipel nippon, me procure beaucoup de joie dans les paysages, le bestiaire et les efforts consentis pour les mériter. Depuis Kyoto, je traversais une longue zone urbanisée, plate, qui m'a redonné les forces physiques et l'envie de me replonger dans quelques reliefs montagneux. Les hauteurs modestes de la vallée d'Iya et des gorges avoisinantes ont été ce sain détour. 

 

 

Mais la ville n'a pas démérité pour autant, car elle m'a donné l'opportunité de mieux comprendre la culture japonaise. Avec Osaka la tentaculaire (merci Maasa pour le couchsurfing), Kobe la balnéaire et Nara et ses sympathiques daims en liberté (et un super warmshower chez Tiphaine et Tristan). Sans oublier l'île d'Awaji, qui m'a offert une belle route côtière et un idéal bivouac en bord de mer. Après Shikoku, cela a encore été une affaire d'îles … Il faut dire qu'au Japon il pourrait difficilement en être autrement. J'ai trouvé le repos et fait quelques rencontres sympas sur le petit archipel de Shimanami situé entre Imabari et Onomichi, une chouette halte avec des airs de Caraïbes, en empruntant une idyllique voie vélo traversant de nombreux ponts.

 

Avec le retour des températures estivales, je redécouvre le plaisir du bivouac facile. Je n'ai plus la pression d'absolument armer la tente avant le coucher du soleil, car je peux m'attarder la nuit sans pour autant commencer à me geler les orteils. Ajouté à cela, trouver un spot de camping au Japon est une mission des plus aisées, car si l'on veille à ne gêner personne, on vous laissera tranquille. Au contraire, ce sera sous le regard surpris voire amusé des curieux promeneurs de l'aube que l'on se réveillera et pliera son paquetage. Cela m'ouvre la porte au campement dans les parcs publics, les aires de repos, et toute sorte d'endroits dans lesquels je n'aurai pas osé planter le piquet dans la plupart des pays d'Europe.

 

Le Japon, c'est aussi le pays de la musique d'ascenseur. J'avais déjà mentionné le fait qu'ici tout se fait en musique. J'avais apprécié ces petits jingles amusants pour signifier qu'une tâche était finie, comme récupérer l'argent dans le DAB, le changement du feu rouge au vert piétonnier, le marquage des heures clés de la journée (midi, 17h ou 18h) … On vit ici au rythme de ces petites mélodies. Au départ, je m'étais aussi pris de sympathie pour ces musiques de salle d'attente un peu ringardes qui sévissent dans tous les supermarchés, combinis et autres lieux publics. Jusqu'à ce que je me rende compte que ce sont les même titres qui passent partout en boucle … Je soupçonne même l'objet du crime d'être un seul et même album, une sorte de best-seller de la musique d'ambiance, composé de reprises de U2 à la clarinette ou du dernier tube de Taylor Swift façon Jean-Michel Jarre. Un véritable cauchemar pour les nerfs. Ah, les pauvres employés qui doivent endurer ce châtiment quotidien !

 

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Kyoto J54 Japon

Le Japon des samouraïs

Ecrit le 8 mai 2016 à Kyoto - km 2200

Ma première rencontre avec la civilisation nipponne il y a un mois de ça, fut de nuit en sortant de l'aéroport l'un de ses petits magasins que les locaux appellent "konbinis", abbréviation japonisante de l'anglais "convienent store", en français épicerie. En fait, le konbini, c'est bien plus que cela. Pour le cyclocampeur, c'est le lieu de ravitaillement ultime. On y trouve de tout : de l'eau chaude, de l'eau froide, des toilettes (propres), de l'électricité, des distributeurs automatiques de billets (les seuls qui acceptent les cartes étrangères avec ceux de la Poste) ... et de la nourriture bien sûr ! Les fameux bentos offre pour moins de 5 euros un plateau-repas équilibré, varié et délicieux. Un véritable bonheur quotidien. Et surtout, c'est le seul et unique endroit où je peux déposer mon petit sac de détritus du jour, car bizarrement, au Japon, on croule sous les emballages, mais il n'y a pas de poubelles publiques. Pour moi, c'est un hommage aux valeurs du pays, pour sa propreté, son côté pratique ("convenient", donc) et pour la politesse et délicatesse de ses employés. 
 

Entre 2 conbinis j'entame ma troisième vague de découverte, placée sous le signe de l'apprentissage. Elle est intimement associée aux rencontres, que je fais notamment via les réseaux d'hospitalité Warmshower et Couchsurfing. C'est par ce biais que j'en apprends chaque jour plus sur la culture autochtone, sur les bonnes manières à adopter (merci Patrice de Nagoya), sur l'histoire du pays, sur les coutumes et les aspects pratiques de la vie quotidienne (merci Gilles de Gifu).

 

Depuis Matsumoto, j'ai eu l'occasion de m'immerger dans le Japon de l'époque des samourais. Tout d'abord en visitant (de près ou de loin) des chateaux chargés d'Histoire (Nagoya, Mastumoto, Itayama, Gifu), puis en traversant des petits villages traditionnels avec ses temples et maisonettes faites de bois foncé (Narai-juku, Tsumago-juku, Magome-juku, Samegai-juku ...). Ce sont les petites routes et les itinéraires bis qui m'ont révélé toutes ces merveilles. Dès que j'en ai l'occasion, je m'éloigne de la route principale, et ceci est possible depuis que je suis sorti des chaussées de montagne.

 

Après, ce ne fut pas la période idéale pour la fréquentation des lieux touristiques, car ici, c'est la "Golden week", semaine où la plupart des employés sont en congés. La visite de leur propre pays reste un must pour la plupart d'entre eux. C'est à dire, à ce moment de l'année, un village pittoresque isolé peut aisément se transformer en Disneyland un week-end de la toussaint. Mais bon, je fais avec, et de bon coeur, car cela me donne moultes occasions de tailler la bavette avec le chalant et de récolter une belle moisson de sourires. Finalement, en déambulant avec mon vélo chargé, la principale attraction touristique, j'ai parfois l'impression que c'est moi !

 

Mes sensations de cycliste s'affinent, mes cuisses se durcissent, ces nombreux dénivélés m'ont forgé une excellente condition physique et la plupart des douleurs de position appartiennent (presque) désormais au passé. J'ai une santé de fer, mais le plus important dans un voyage au long cours, c'est d'avoir un moral d'acier. J'ai passé le cap de ces 2 mois sur la route avec quelques accents nostalgiques des moments passés avec amis et famille. Rien de plus normal, après tout. Ce qui ne change pas par contre, c'est ce bonheur intense que me procure ces premiers coups de pédales matinaux, après une ou deux journées de pause. A ce moment, j'oublie tout, mon esprit vagabonde puis se réjouit à l'idée de partir encore une fois à la découverte de l'inconnu.

 

Je ne pouvais pas mieux terminer cette portion de parcours qu'en passant par Kyoto. Tout ce que j'ai vu clairsemé depuis Matsumoto est dans cette capitale culturelle ici concentré : temples bouddhistes, temples shintoïstes et autres monuments emblématiques, cahutes traditionnelles en bois, quartiers historiques, parcs zen et verdoyant ...  le tout saupoudré par une belle ribambelle de japonaises qui se parent de leur plus beau kimono pour arpenter les rues. Kyoto, c'est cool. Et c'était un petit challenge pour moi d'y passer 3 jours en mode camping urbain. Pari réussi et même une belle option pour l'avenir, la liberté de circuler à vélo et de choisir son lieu de bivouac en ville donne une indépendance et et autonomie accrue !

 

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