Jo, Hanoï

Série "Happy Expats", portrait n°3

Publié le 20 Apr 2020
Catégorie Reportages

En Mars 2016, je rencontrais Yohan à Istanbul. Nous échangeons alors nos expériences de cyclocampeurs … Il me parle avec entrain de son expérience à Hanoï, au Vietnam, qui me semble être le lieu tout indiqué pour effectuer un séjour prolongé. Ses atouts : une ville cosmopolite, des loyers peu chers,une cuisine locale excellente et quelques vélocistes sérieux sur place pour s’occuper de l’entretien de mon vélo. 

 

Me voyant intéressé, il me donne le contact d'un ami resté sur place : c’est ainsi qu’au mois de septembre 2016 je rencontrais Jo (Jonathan), un garçon au grand coeur qui est très vite devenu mon ami. Il m’a tout de suite donner les clés pour commencer à apprécier une ville qui au premier abord me paraissait plutôt hostile. Son expérience et sa gouaille ont guidé mes premiers pas dans la capitale vietnamienne. C’est grâce à lui que j’ai pu m’approprier ce lieu, convertir cette jungle urbaine frénétique en une abondance de petits coins bucoliques.

 

Ce qui lie Jo à Hanoï est digne d’un roman sentimental. Une histoire d’amour qui mêle séparations difficiles et retrouvailles exaltantes. Du récit de ses aventures, je retiens surtout sa détermination à s’améliorer en tant que personne et sa débauche d’énergie pour aller de l’avant quoi qu’il arrive. C’est avec un très grand plaisir que je vous présente le 3e volet de ma mini-série “Happy Expat” :

Jo est né à Bruxelles il y a une trentaine d'années et a passé la majeure partie de son adolescence à Mons en Belgique ...

 

Seb : Comment as-tu atterri à Hanoï ?

 

Jo : C’est une longue histoire :)

 

A la base, je suis venu en Asie pour apprendre … l’anglais ! Mon souhait initial était de me rendre en Australie mais mon niveau linguistique n’était pas suffisant. Avant de partir, j’ai du batailler contre mon père qui voulait que je garde mon boulot à Belgacom (principal opérateur téléphonique en Belgique). Pour lui, cela représentait la sécurité de l’emploi. 

 

Je voulais aussi tenter l’expérience dans l’humanitaire : je trouve finalement une mission du côté de Halong Bay, dans le nord du Vietnam (septembre 2014). Une fois sur place, j’ai tout d’abord été surpris par le côté indiscipliné des locaux. Je m’imaginais alors qu’on vivait partout en Asie comme on vit au Japon !

 

Cette expérience dans l’humanitaire fut un véritable fiasco. On m’avait proposé un poste de prof de sport, mais en arrivant là-bas je me retrouve coincé à faire le prof d’anglais (avec mon niveau élémentaire en la matière t’imagines un peu la situation) … Déjà, ça commençait mal.  Par la suite, j’apprends que les enfants que j’étais censé “aider” doivent débourser un paquet d’argent pour assister à mes cours : l’organisme m’avait présenté comme un professeur expérimenté, venant des Etats-unis ... En bref, la grosse grosse arnaque. J’ai donc arrêté les frais au bout de 3 mois.  

 

Ceci dit, je ne voulais pas repartir aussitôt en Belgique. Et comme j’avais déjà de l’expérience dans la restauration, je commence à chercher un boulot à Hanoï, la capitale du pays. Sans m’en rendre compte, je commence déjà à m’attacher à cette ville, à ce pays. Je pars ensuite un peu plus  de 6 mois en Thaïlande pour une expérience mitigée (avril 2015). Après un bref retour à Hanoï début 2016, je décide de réaliser mon rêve en allant tenter ma chance au Japon (avril 2016). Une fois sur place, je me rends compte que tout n’est pas si facile. Je me retrouve notamment confronté à des problèmes de visa et de permis de travail. Alors qu’au Vietnam, on ne me compliquait pas tant la vie ! De surcroît, j’avais commencé à y tisser des liens, à créer de belles relations ... Je me décide finalement à revenir à Hanoï, une nouvelle fois (septembre 2016) ! C’est à ce moment que je t’ai rencontré :)

 

Le Vietnam m’offrait alors la possibilité d’envisager une vie plus stable avec un salaire convenable, tout en m’épanouissant dans mon travail. Malgré cette perspective réjouissante, c’est le moment que je choisis pour faire une connerie qui me met dans un sale pétrin. J’étais complètement perdu, la grosse remise en question personnelle ... Et puis là, faut pas chercher, le miracle a eu lieu : le destin joue finalement en faveur. On me propose de devenir gérant d’un petit resort à Ninh Binh, un spot hautement touristique à une centaines de kilomètre au sud d’Hanoï (décembre 2016). Je ne rate pas le coche. Pendant 2 ans, je fais mes preuves et ensuite tout s’enchaîne : je suis promu sur un grand projet d'hôtel de 200 chambres, puis dans un autre hôtel de 120 chambres, dans le sud du Vietnam, tout près de Saïgon (juin 2018). 

 

Avec le recul, c’est bien le Vietnam qui m’a le plus réussi. Je commence à mesurer l’étendu du chemin parcouru mais ne compte pas m’arrêter pour autant. Le lien avec ce pays devient de plus en plus fort … Ce serait un peu comme dans une histoire avec une fille. Une fille avec qui tu passes du temps. Et plus le temps passe, plus tu te rends compte que la fille est chouette, qu’elle te veut du bien et que si tu t’investis dans la relation cela peut devenir super productif. Et voilà, c’est comme ça que je suis tombé amoureux du Vietnam et de Hanoï en particulier.

 

Seb : Qu'est-ce qui te pousse, te motive à rester à Hanoï ?


Jo : Si je regarde bien, à mon arrivée au Vietnam, mon CV n’était pas le meilleur, loin de là. Mais on m’a donné ma chance, et j’ai pris du galon en ayant la possibilité de démontrer mes qualités et de monter en compétence. Avec le recul, je me dis que cela n’aurait pas été aussi évident dans un autre pays (et en particulier en Belgique). J’aime aussi le dynamisme du Vietnam, le fait d’avoir l’occasion de pouvoir rencontrer plein de gens. Si la communauté d’expats du sud (Saïgon) est plutôt axée business, celle du nord (Hanoï) est plus simple et relax. Elle est aussi plus francophone. Je me sens bien au nord comme au sud, mais je me sens comme chez moi à Hanoï :)

 

Seb : Qu'est-ce qui fait selon toi de Hanoï l'endroit idéal ?


Jo : Les points forts du Vietnam et de Hanoï en particulier : déjà, y’a énormément d’opportunités de carrière. Ensuite, je n’y ai pas ressenti beaucoup de racisme (je ne dis pas qu’il n’y en a pas). En fait, les vietnamiens n’arrivent pas trop à faire la différence entre un arabe, un espagnol, un belge, un français … Ils valorisent surtout les efforts d’intégration, te considèrent si tu montres ton intention de faire quelque chose de bien pour le pays. On peut les percevoir comme un peuple de guerriers, fiers, avec un peu trop d’égo ; mais au final ils ne sont pas rancuniers. Enfin, ils ne se prennent pas trop la tête et sont faciles à vivre. J’apprécie particulièrement leur franchise. Dernier détail, que je trouve merveilleux : si tu arrives à te faire un ami vietnamien, c’est pour la vie ! 



Précédent volet : Stéphane, Tokyo

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De ma Normandie à Amsterdam

1 mois de voyage sur mon vélo

Publié le 30 Sep 2014
Catégorie France

Ce sera finalement plus qu'une étape supplémentaire, ce retour en France. Je dois réinventer mon voyage, m'adapter, prendre en compte ce nouveau paramètre de santé, et m'armer de patience.

Il y a des rencontres qui marquent une vie, même si sur le moment on ne se rend pas compte. Yves en fait inconstestablement parti. Quarantenaire barbu et cycliste, je l'ai rencontré à Lisbonne pendant l'été 2012, à l'auberge Alfama, alors qu'il entreprenait un audacieux voyage à vélo de Lyon à Capetown, en Afrique du Sud. Curieux mais dubitatif quant à son mode de transport, j'avais toutefois pris beaucoup de plaisir à découvrir et partager son enthousiasme pour la découverte, sa passion pour la liberté.

 

2 ans plus tard, en Inde, lorsque me déplacer à pied devenait un problème, j'optais pour des solutions de déplacement alternatives : la moto et le vélo. J'affectionnais particulièrement ce dernier pour son côté pratique, économique et la possibilité qu'il me donnait de rester en contact avec mon environnement direct. A Rishikesh, où je m'étais posé 2 mois, j'en avais loué un, ce qui avait grandement facilité mes allées et venues entre les différentes parties du village. Depuis, l'idée a fait son chemin … Finalement, pourquoi pas moi ? Pourquoi ne pas organiser un grand voyage autour ce mode de transport?
 
J'ai donc récupéré un vélo qui traînait dans mon garage (un très honnête VTC Gitane), lui ai ajouté un porte-bagage, des nouveaux pneus, une nouvelle selle, des extensions de guidon, quelques sacoches bon marché, et j'étais fin prêt à me lancer pour un test grandeur nature, un périple vélocipédique de longue haleine. Et quoi de mieux pour un premier voyage à deux roues que d'aller faire un tour du côté de la Hollande, le pays de la bicyclette ?

C'est ainsi que s'est dessinée la route de ce Normandie-Amsterdam … Ce mois d'août a été consacré à la traversée du nord de la France, de la Belgique en longeant la Sambre, et de la Hollande en longeant la Meuse. Jusqu'à Amsterdam. Au total plus de 1100 km. J'ai pu expérimenter le couchsurfing, pratiquer le camping et le bivouac. Ce fut un grand moment de liberté et de rencontres, malgré les intempéries et les petites galères mécaniques. Le vélo : c'est banco ! Et une sérieuse option à creuser pour mes voyages futurs.

Mes meilleurs souvenirs de pédalage ? Le Vexin français, l'Avesnois, la frontière belgo-hollandaise et sa vallée de la Meuse, les dunes de Zandvoort de la mer du Nord et les petits villages de pêcheurs au bord du lac Markermeer. Ce qui m'a le plus marqué : la traversée des usines carolos juste avant l'arrivée dans le centre-ville de Charleroi : j'ai eu carrément l'impression de pédaler dans un décor de vieux film d'anticipation ! 
 
Cependant, ce mode de transport implique certaines contraintes. Tout d'abord, il m'a laissé une petite impression de passer à côté de certaines choses. Lorsqu'on a un objectif en tête (kilométrique par exemple), s'arrêter devient un dilemne. Je suis passé plusieurs fois à côté de chouettes endroits, mais dont la visite m'aurait fait rater un rendez-vous avec mon hôte du soir. Dans cette même logique, interrompre son effort pour effectuer une pause-photo se révèle parfois compliqué. Du coup, la manière de penser la photographie change complètement, on approfondit moins son sujet. Cela devient plus superficiel, on apprécie la surface des choses, sans avoir le désir ou la possibilité de réellement connaître l'envers du décor. Mais bon, j'imagine qu'il doit exister un moyen d'adapter ma manière de shooter au voyage à vélo, en redoublant d'effort et de travail ...


Résumons ...

 

Pour :


- sentiment de liberté
- contact avec la nature et l'environnement
- économique et écologique
- effort physique plaisant 
- compatible avec mon problème au pied
- capital sympathie des autres voyageurs envers les cyclo-randonneurs, rencontres

 

Contre :


- Contrainte horaire
- Pas vraiment compatible avec la photo : il faut s'arrêter et poser le vélo à chaque cliché
- Si on ne fait pas l'effort d'aller vers les autres, le vélo peut nous enfermer dans une bulle (ce qui peut présenter certains avantages, parfois)
- Sentiment désagréable de découvrir les choses seulement en surface, de manière superficielle
- On devient assez dépendant vis à vis de la météo (quelles saucées je me suis pris pendant ce mois d'août d'ailleurs !)

Affaire à suivre ...

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