Gapyeong J100 Corée du Sud

Le jeu des différences

Ecrit le 23 juin 2016 à Gapyeong (Corée du Sud) – km 4200 (je fête mes 10.000 Kms effectués depuis le départ en Normandie !)

Un jour un grand sage (mon hôte warmshower Stephane de Tokyo) m'avait raconté : commencer mon tour d'Asie par le Japon pouvait comporter un risque, celui de rendre fade le reste de mon voyage. C'est un peu vrai, au Japon j'avais l'impression de rouler au paradis des cyclistes. Je redescends sur terre en Corée du Sud, et du coup je ne peux pas m'empêcher de me prendre au petit jeu des comparaisons entre voisins. En voici quelques une, en vrac ...
 
Niveau cuisine, c'est parfois super épicé ! Les feux rouges et passages piétons sont de nouveau considérés comme des options. Les vitres des voitures sont très souvent teintées en noir, c'est aussi le retour des sempiternels chauffards. La musique dance de mauvaise qualité - à fond les ballons - remplace la douce musique d’ascenseur dans les supermarchés. C'est moins cher, généralement. Les convenient stores (combinis) ne sont plus aussi « convenient ». Il y en a aussi beaucoup moins, le ravitaillement en nourriture se complique un petit peu. Niveau wc, je perds le délicieux jet nettoyant du popotin japonais, mais je gagne une apaisante musique classique d'ambiance. Du coup, je peux me soulager pépère en écoutant du Schubert, déféquer pénard en écoutant du Mozart. 
 
Les coréens sont fondus de vélo. J'emprunte en ce moment une longue piste cyclable de 600-700 bornes qui relie Busan dans le sud à la capitale Séoul dans le nord. Je me frotte à une faune de pédaleurs assez hétéroclite : sportifs de haut-niveau, cyclistes du dimanche, randonneurs occasionnels, vieillards qui ont fait de la petite reine leur moyen de déplacement principal … Cela me fait un point commun avec tous ces gens et m'attire bien souvent leur sympathie. Je note aussi l'usage répandu du vélo-radio. Ils adorent rouler en musique. Je peux donc monter sans vergogne le son de ma petite enceinte portative achetée à Hiroshima. Et rejoins ainsi mélodieusement la grande famille des usagers à deux roues coréens. 
 
Cette voie verte comporte ses avantages et inconvénients. Les mêmes que ceux de l'Eurovélo 6, à vrai dire. Difficile de se motiver pour en sortir et j'imagine que je passe à côté de pas mal de choses. Les infrastructures sont excellentes et les endroits à bivouac nombreux (mention spéciale à ces petites maisons en bois destinées au pic-nic, elle me feront un excellent abri lorsque la saison des pluies commencera). Sortir de ce sentier balisé signifie affronter un trafic parfois dense et se frotter à de gros dénivelés. Ceci dit, même au bord de la rivière, on doit souvent se coltiner des grimpettes à plus de 10 % (voire 15 ou 20 …). Parait-il, c'est la manière « Korean Style » d'appréhender les pentes, et on peut aisément effectuer une analogie avec le développement économique rapide du pays sur ces dernières années … Tout droit, plus vite !
 
Le style coréen, c'est aussi de la gentillesse débordante. Je récolte moins de sourires qu'au Japon, mais plus de petits cadeaux. J'ai même pensé à rebaptiser mon blog avec le titre « Forever Caravane du Tour de France ». Les petits vieux adorent me parler, en coréen, bien sûr, et même si je ne pige rien cela semble faire l'affaire. Car ici rien que les patronymes sont déjà imprononçables, alors une phrase complète … Cependant, c'est toujours avec un grand plaisir que j'apprends ces nouveaux mots-clefs et ces nouvelles habitudes alimentaires. C'est inhérent à la découverte d'une contrée.
 

Le mercure commence à grimper nettement avec des températures dépassant maintenant les 30°C dans l'après-midi. Grosses chaleurs qui n'empêchent cependant pas la coquetterie : j'applique avec un soin quotidien mes crèmes de jour de nuit : protection solaire indice 50 le matin et spray anti-moustique le soir. En définitive, la Corée du Sud m'offre un bref aperçu des menus difficultés qui se présenteront sur ma route asiatique. Sans pour autant perdre de vue mes objectifs principaux : expérimenter la liberté, rencontrer de belles personnes et profiter sereinement de ce que la route a à m'offrir. 

 

Après une traversée en solo depuis Busan jusqu'à Chungju, j'ai goûté à nouveau pendant quelques jours au plaisir du voyage en groupe. Avec mes acolytes Anais et Gilles que j'avais déjà rencontré au Japon sur le Shimanami Kaido (nous avons même pu supporter ensemble nos équipes respectives pour le dernier match de poule de l'Eurocup : France-Suisse) et une neophyte dans le monde du cyclotourisme, Carolina. Avant cela, je n'ai jamais eu le loisir de me sentir seul … Je remercie les Jung, Jay, Dong, Seungha, James et Katie, et les autres sympathiques personnes rencontrées sur le chemin qui m'ont permis de découvrir de la meilleure des manières la chaleur de l'hospitalité coréenne : le plus souvent autour d'un copieux et succulent repas. 
 

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Fukuoka J84 Japon

Cap sur la Corée !

Ecrit le 7 juin 2016 à Fukuoka – km 3566

Le Japon en quelques chiffres

Plus de 2700 km au compteur
Entre 10 et 12 jours de pause (pendant les lesquels je me balade le plus souvent à vélo !)
Une moyenne de 52-54 km par jour
3 cols à plus de 1000 m (dont un à 1500m)
Une route barrée m'occasionnant un rebrousse-chemin (arrivé à 1500 m)

62 nuits :

> 42 nuits en bivouac dans 38 lieux différents - dont 3 terrains de camping gratuit
> 10 nuits chez 6 hôtes warmshower
> 7 nuits chez 4 hôtes couchsurfing
> 3 nuits chez l'habitant, sur 2 invitations (hors réseau d'hospitalité)


0 crevaison (!)
1 chaîne neuve
2 nouvelles paires de freins
1 problème mécanique non résolu


Quelques trous dans ma tente :/ (?)
Une nouvelle espèce de moustiques anthropophages


Et de nombreuses et nombreux :
Belles rencontres, bento box, onsens ... et surtout souvenirs impérissables !




Ces quelques statistiques ne peuvent cependant pas résumer l'expérience qu'a représenté pour moi cette traversée du Japon. J'en rêvais depuis longtemps, cette fois-ci le vécu a dépassé l'imaginaire ... Je suis allé de surprises en découvertes, de découvertes en ravissements. Avec l'Inde, c'est le pays qui m'a procuré le plus grand dépaysement, dans un style tout à fait différent. Alors que le pays du dodelinement de tête me proposait un défi constant passant par une rude mise à l'épreuve des nerfs et un arc-en-ciel d'émotions, le Japon m'a bercé dans sa sécurité (parfois outrancière), la bienveillance désintéressée de ses autochtones et l'harmonie ronronnante entre technologie et tradition. Je me suis peu à peu débarrassé de toute la pression inhérante à la recherche d'un bivouac quotidien en Europe méditerranéenne pour une sérénité absolue, me donnant la possibilité de profiter calmement de chacun des événements de la route. Au Japon, c'est le vélo sans pression. Et je signe tout de suite pour la continuité en Corée du Sud, mon prochain pays étape.


Je quitte donc le Japon avec un petit pincement au cœur, mais avec une excitation certaine de découvrir une nouvelle contrée, une nouvelle culture ! Je retourne cette fois-ci sur le continent, pour un pays présentant toutefois de nouveau un profil insulaire car cerné par les eaux et la Corée du Nord (qui pour le moment n'est guère plus pédalable que la mer de Chine). On dit aussi de ce pays qu'il fait la symbiose entre la Chine et le Japon, dans la mentalité et la cuisine notamment. Je me prépare aussi à affronter la saison des pluies, qui a commencé hier à Fukuoka. Je voulais prolonger de quelques jours mon séjour sur Kuyshu, l'île la plus au sud de l'archipel nippon, mais la météo me dirige tout naturellement vers un débarquement rapide à Busan, qui accueillera ces grosses précipitations annuelles un peu plus tard (en tous cas c'est ce que j'espère).


Ces derniers jours ont été un temps d'intense réflexion sur la suite de mon voyage. Avant ce nouveau départ en mars dernier, j'avais plus ou moins planifié la route jusqu'à Séoul, et me voilà à un peu moins de 800 km de coups de pédales de cet objectif intermédiaire. Beaucoup de facteurs sont à prendre en compte, comme la durée des visas et leur lieu d'obtention (ce qui me pose un problème pour la Chine), la météo asiatique de cette période pas vraiment hospitalière (pluie, fortes chaleurs, typhons), et les modes de transport à employer pour palier aux deux problèmes suscités. Il y aura peut-être un moment où je devrais poser mon vélo quelques temps ... La réflexion est en cours.


Depuis les îles paradisiaques de Shimanami Kaido, j'ai traversé une zone côtière urbanisée pas franchement agréable, autour d'Hiroshima (à un jour près je serrais la main d'Obama qui lui n'a pas fait le chemin en vélo, le fainéant). Avec en "high-light" le mémorial de cette catastrophe nucléaire survenue à l'issu de la seconde guerre mondiale. A vrai dire, ce fut un peu un musée des horreurs didactique, tout y est fait pour qu'on se rende compte progressivement de l'ampleur et l'inutilité de ce crime contre l'humanité. Puis après un repli stratégique dans l'intérieur montagneux et campagnard du pays, j'ai eu les surprises des villages historiques Iwakuni et Tsuwano, de la balnéaire Hagi et de l'atypique plateau d'Akiyoshido. Pelé des sempiternels arbres, on s'y croirait presque en Irlande. Sur ce même plateau j'ai visité une immense grotte, avec de curieuses formations rocheuses. C'est ici aussi que j'ai rencontré la famille de Claire et Yoshi, couple taiwano-japonais qui m'a sympathiquement invité au gîte et au couvert à Fukuoka. Finalement, c'est là-bas dans cette ville portuaire que je vis mes derniers instants nippons, je trouve le repos et me resociabilise grâce au réseau couchsurfing.


 

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